Chanteur, musicien, poète, performer visuel… Daniel Romano marche dans les pas de Bob Dylan. Il fait étape ce samedi au Sonic, ne le ratez pas.
Du punk hardcore aux complaintes country
Difficile à suivre, ce Daniel Romano. D’abord, on eût pu penser en passant en revue sa discographie que cet artiste était né quelque part du côté de Nashville aka Music City, Tennessee. Quand on le vit notamment poser habillé en cow-boy presque électrique sur la pochette de son divin et déchirant Come cry with me, en outlaw à cravate mais sans chapeau sur celle de Workin’ for the music man, ou alangui sur un canapé, une guitare à ses pieds, en devanture de Sleep beneath the willow, autant d’assemblages de complaintes du plus pur style country hérité des anciens, de Johnny Cash à Merle Haggard en passant par Willie Nelson et leur Dieu le père Hank Williams. Sauf que non, le bonhomme est né dans un bled (à l’échelle de l’Amérique du Nord) de 52 000 habitants et des flocons du bord de l’Ontario au Canada. Sauf également que Daniel a d’abord fait ses armes de musicien au sein d’un groupe de punk hardcore pas piqué des caribous baptisé Attack in Black, dont les hauts faits n’ont que peu à voir avec ce qui agite le cœur de la scintillante Nashville. Punk hardcore qu’il délaissa pourtant en même temps que son groupe au profit, on ne sait pourquoi et aussi facilement qu’on change de chemise, de la pedal steel et de cette magnifique musique roots américaine qui donne envie de se faire plaquer et de rouler sans fin vers l’Ouest ou le Sud.
Voir loin, dans les pas de Dylan
On croyait depuis cinq albums avoir trouvé la petite merveille du genre, capable d’écrire au kilomètre, en restant dans les clous esthétiques, des chansons à pleurer. Mais c’était encore juger un peu trop rapidement un jeune homme qui en a trop sous le capot pour se confire dans un style. On le constata l’an dernier avec le déroutant Mosey qui, sans abandonner tout à fait la country, en ouvrait grand les fenêtres, parce que country signifie “pays”, “paysage” et toutes ces sortes de choses qui permettent de voir loin, convoquant les fantômes de Morricone, du Cowboy in Sweden Lee Hazlewood, de Syd Barrett, de Randy Newman (n’en jetez plus) au long d’un album indie-folk-rock de très haute volée. Celui d’un cowboy qui a tombé les bottes pour des semelles de vent. À peine un an plus tard, le revoilà avec Modern Pressure, marchant cette fois dans les pas de Bob Dylan, celui du second âge d’or (Desire, Blood on the Tracks, la Rolling Thunder Revue, le Band), voix nasillarde en avant et orchestrations rock western que l’on jurerait parfois droit sorties des Basement Tapes agrémentées de quelques fantaisies romaniennes. L’exercice de style, évident, pourrait agacer. Sauf que, comme au temps de ses amours country, éclate au visage la qualité principale de Romano, loin d’être négligeable, surtout après sept albums : une capacité à composer, quel que soit le style envisagé, des enfilades de tubes. Ce qui le rend pour le coup beaucoup plus facile à suivre qu’escompté. Car avec des chansons pareilles on peut aller jusqu’au bout du monde, peu importe la destination.
Daniel Romano – Samedi 14 octobre à 20h30, au Sonic.