Collomb - Rivalta
© Tim Douet

Pourquoi Collomb est (encore) venu au secours de Rivalta

La seule sortie de Gérard Collomb hors Lyon fut pour Vénissieux, jeudi soir. Moins pour soutenir Lotfi Ben Khelifa que pour tenter de sauver Bernard Rivalta qui risque de perdre la présidence du Sytral dès dimanche. C’est pour lui qu’il a passé quelques coups de fil mardi. Récit et analyse.

Collomb - Rivalta ()

© Tim Douet

La présidence du Sytral se joue ce dimanche à Vénissieux. Si la liste socialiste, présente au second tour, venait à réaliser moins que la moitié du score de Michèle Picard (PCF) et que Christophe Girard (droite) se situait devant, Bernard Rivalta n'irait pas siéger au Grand Lyon ni, par là même, au Sytral (1). Il laisserait ainsi vacante sa présidence. Le scénario n'a rien de farfelu : dimanche dernier, Lotfi Ben Khelifa (15,8 %) était nettement distancé par la maire communiste (30,7 %) et par l'opposant de droite (22 %). Le candidat socialiste a calculé qu'il lui faudrait 2 200 à 2 300 voix pour sauver Rivalta – il en a recueilli 1 934 au premier tour.

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Collomb à Passi : les conditions de Picard sont toutes acceptées

Le président du Sytral, inquiet, s'est démené pour sauver sa peau. Il s'est notamment invité à la table des négociations d'entre-deux tours, entre Picard et Ben Khelifa, alors qu'il ne faisait pas partie des discussions ces derniers mois. "Je lui ai demandé de venir avec moi", corrige Lotfi Ben Khelifa. "C'est un homme compétent, il nous a apporté beaucoup à Vénissieux", argue-t-il. Une fusion des listes aurait sauvé Rivalta. Durant le bras de fer, les socialistes ont proposé à la municipalité sortante une répartition des postes à la proportionnelle des résultats (1/3 PS, 2/3 PCF). Mais les communistes ont voulu biffer quelques noms de la liste PS, notamment les membres du MoDem. Un casus belli. "Je n'ai pas à subir les caprices des communistes", s'est rengorgée la tête de liste socialiste, qui n'a "pas voulu aller à la gamelle". À ses côtés, Rivalta n'aurait pas tenté d'infléchir sa position.

C'est alors que les positions des uns et des autres se crispaient que Gérard Collomb est entré en piste, venant une fois de plus à la rescousse de son vieux compère. Lundi, le candidat socialiste à Vénissieux avait déjà reçu un coup de fil de David Kimelfeld l'invitant à engager des négociations avec la maire. Mardi, voyant que les discussions patinaient, le maire de Lyon a pris son téléphone pour joindre Michèle Picard (photo ci-contre). En vain : la communiste n'a pas décroché. Collomb a alors appelé Martial Passi, maire PCF de Givors, pour qu'il lui fasse la commission. "Il nous a dit que toutes nos conditions étaient acceptées, relate un communiste vénissian. Mais c'était trop tard, la liste était déjà déposée en préfecture."

Collomb espère “un grand élan” en faveur de Rivalta

Résigné à voir ces deux listes de gauche s'affronter, Gérard Collomb est venu soutenir la liste PS jeudi soir. Il faut souligner que l'unique sortie du maire de Lyon hors de sa ville, cette semaine, n'a pas été pour Bron, Rillieux ou Décines – malgré des risques de basculement – mais bien pour Vénissieux. Mercredi, lors d'une balade urbaine, il avait déclaré : "J'espère qu'il y aura un grand élan pour qu'il [Rivalta, ndlr] soit élu. C'est quelqu'un qui a mené une grande politique", concédant que l'intéressé "peut avoir un caractère vif". "Je lui tire mon chapeau", pour son bilan, a-t-il lancé. Du marché public pipé de 2010 aux indemnités indûment perçues, le maire de Lyon a toujours volé à son secours.

Ce soutien indéfectible laisse nombre de socialistes pantois, et relève de l'énigme, tant le président du Sytral, hargneux et belliqueux en réunions publiques, soulève des oppositions aux grands projets d'agglomération. "C'est moi qui ai le micro, je parlerai toujours plus fort que vous", avait-il ainsi lancé à des opposants du Grand Stade, pour mieux les rabrouer.

“La vision politique est portée par Collomb, Rivalta la met en application”

Rivalta ()

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Un argument revient souvent en faveur de cet ingénieur de formation : “C’est un technicien hors pair.” À vous réparer de ses propres mains une micheline défaillante ! "Il a une compétence technique exceptionnelle, et Collomb est fidèle en amitié, décrypte-t-on au cabinet du maire. De toute façon, la vision politique est portée par Gérard Collomb. Rivalta la met en application." "Il a toujours respecté la prééminence de Collomb", confirme un adjoint lyonnais.

De ce point de vue, l'obligé Rivalta est irréprochable. C'est ainsi que le président de l'agglomération a demandé à son exécutant de s'asseoir sur le plan de déplacements urbains, la feuille de route du Sytral, pour desservir le futur stade des Lumières. Le président du Sytral s’est empressé de prolonger le T2 vers Eurexpo, de préparer une fourche du T3 vers le complexe sportif. Les usagers du C3, eux, devront prendre leur mal en patience…

Malgré ses réserves personnelles, Bernard Rivalta a aussi reconduit Keolis comme exploitant des transports, suivant l'avis de Gérard Collomb. Lors de la campagne, quand le maire candidat avait lancé son projet de nouveau métro dans le 5e arrondissement, il lui a aussitôt servi des argumentaires. Le président du Sytral sait tenir la barre, résistant par exemple à un gros conflit social à l'automne 2009 pour améliorer le fonctionnement des lignes de bus (Atoubus). "Quand il dit que quelque chose va se faire à telle date, ça se fait à telle date. Je crois qu’on a besoin de Bernard Rivalta et que les électeurs de Vénissieux devront réfléchir dimanche", nous a déclaré ce vendredi Thierry Philip. Son professionnalisme, ses compétences compensent-elles ses piètres qualités humaines ?

“Je croise les doigts pour qu’il perde”

"Personne, en dehors de Gérard Collomb, ne regrettera Rivalta, avance Frédéric Vermeulin, l'ex-secrétaire de section PS à Villeurbanne. C'est à cause d'hommes tels que lui que la politique a une si mauvaise image, malgré les milliers d'élus intègres et sincères qui font leur maximum. Il représente à peu près tout ce qu'on peut trouver de plus méprisable en politique. Je suis socialiste et je croise les doigts pour qu'il perde." Le Villeurbannais, qui parle en son nom personnel, traduit bien le ressentiment de socialistes à l'endroit de celui qui ne s'est jamais acquitté de ses cotisations au parti. Frédéric Vermeulin se rappelle un repas de plein air organisé à Villeurbanne. Les militants s'affairaient autour de tables montées à l'aide de tréteaux. Rivalta, lui, avait sorti ses clubs de golf pour taquiner ses balles. "Il n'avait dit bonjour à personne. Il voulait nous montrer qu'il n'était pas de notre monde. Pour moi, ce n'est pas un homme de gauche", maugrée le Villeurbannais. Les électeurs de gauche, Rivalta en aura pourtant bien besoin, dimanche.

(1) À ce jour, Bernard Rivalta est le premier socialiste homme sur la liste des élus “fléchés métropole”. Lotfi Ben Khelifa, tête de liste, ne peut être légalement conseiller communautaire puisqu’il est salarié du Grand Lyon.

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