Les "Ambassadeurs du Jasmin", voix de la révolte tunisienne à Lyon

Alors que les rebondissements s’enchaînent en Tunisie depuis le départ de l’ex-président Zine el-Abidine Ben Ali, les mouvements de soutien s’organisent solidement en France. A Lyon, la solidarité avec le peuple tunisien se structure depuis peu autour d’une toute jeune association, "Les Ambassadeurs du Jasmin".

A Tunis, la colère de la rue ne s'éteint pas. Ce lundi, des manifestants ont jeté des pierres contre les policiers anti-émeutes devant les bureaux du Premier ministre du gouvernement de transition, affirmant leur exigence de voir démissionner tous les ministres liés à l'ancien régime. Les enseignants du primaire, eux, appellent à la grève illimitée, alors que les écoles devaient rouvrir leurs portes ce lundi matin.
A Lyon, où les manifestations de soutien à la révolution tunisienne se sont multipliées cette dernière semaine, l'ambiance est bien plus pacifique mais la détermination ne faiblit pas. Samedi, ils étaient encore près d'un millier à défiler pour affirmer leur volonté de voir la démocratie triompher en Tunisie.

"On veut être des acteurs de la transition démocratique"

Dimanche après-midi, une petite délégation de membres des "Ambassadeurs du Jasmin" s'est rassemblée devant le Consulat Général de Tunisie, avenue du Maréchal Foch (6e arr.), pour un hommage aux victimes de la Révolution du Jasmin. A cette occasion, l'association a été reçue par le consul, qui a accepté leur demande de campagne d'inscription sur les listes électorales tunisiennes pour les Tunisiens lyonnais. Une première victoire pour les "Ambassadeurs du Jasmin". Fondée par une dizaine de Lyonnais d'origine tunisienne, l'association a pour objectif principal de soutenir le peuple tunisien dans sa marche vers une transition démocratique. Son président, l'ancien élu vaudais Samir Khamassi, la définit comme une "association citoyenne et laïque, créée dans le but de surveiller le bon fonctionnement du processus démocratique en Tunisie et d'informer les Tunisiens de France et tous ceux qui s'intéressent à la situation sur place". Née il y a seulement dix jours, l'association compte déjà une centaine de membres, "aussi bien des Français d'origine tunisienne, que des Tunisiens vivant en France, des étudiants tunisiens et des Français", précise Samir Khamassi. "Nous sommes en contact permanent avec des interlocuteurs en Tunisie. On suit les choses en même temps qu'eux les vivent ". Une manière de participer à la révolution en cours, malgré la distance.

"La Tunisie ne reviendra pas en arrière"

Fierté, enthousiasme, espoir et confiance. Voilà l'état d'esprit de la communauté tunisienne de Lyon face aux évènements. "La Tunisie ne reviendra pas en arrière", affirme le président des "Ambassadeurs du Jasmin". "Les Tunisiens sont extrêmement vigilants et se sont très vite politisés. Ils sont tous les jours dans la rue et leur discours politique est de plus en plus cohérent". Pour Samir Khamassi, Internet a vraiment joué un rôle fondamental dans le mouvement contestataire : "Les Tunisiens ont très bien utilisé le Web. Il y a eu beaucoup de partages via Internet. Beaucoup de Tunisiens s'en sont servis dans la crainte mais au final, tout cela a véritablement amplifié le mouvement. Si toutes les générations sont descendues dans la rue, c'est aussi grâce à Internet ». Selon lui, la révolution peut aboutir à une transition démocratique, mais il faut tout de même rester prudent. "Tous les échelons de l'Etat étaient inféodés au Rassemblement Constitutionnel Démocratique, le parti du président. Il y a 12 000 à 15 000 personnes, notamment dans les administrations, qu'on ne remplacera pas aussi vite. Les renversements ont commencé par le haut de la hiérarchie. Des dirigeants, des chefs d'entreprises ou encore des patrons de presse ont été raccompagnés à la porte. La vie reprend progressivement son cours mais le mouvement d'épuration ne va pas s'arrêter là".

Quant à savoir si l'ancien président Ben Ali sera jugé : "Les Tunisiens réclament un procès, bien sûr, mais il faut prendre son temps. Il faudra juger tous les responsables mais ce n'est pas l'objectif du moment. Pour l'heure, l'objectif principal, c'est la mise en place du processus démocratique". Un processus qui doit absolument amener à la mise en place d'une justice indépendante, d'élections libres, transparentes et surveillées par des observateurs, de partis politiques et d'associations libres ainsi qu'à une liberté de la presse incontestée, pour Samir Khamassi. Même si le combat n'est pas encore totalement gagné, le mouvement tunisien est d'ores et déjà synonyme d'exemplarité dans le monde arabe et notamment au Maghreb. "Si la Tunisie peut servir d'amorce à d'autres révolutions, tant mieux", estime Samir Khamassi. "Pour l'heure, ce qui est sûr, c'est que l'éveil de la conscience des peuples est en route."

Contact : lesambassadeursdujasmin@gmail.com

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