Le chef triplement étoilé Georges Blanc ouvre en plein cœur de Lyon une brasserie... Le Centre, clin d'œil aux brasseries cardinales de Paul Bocuse, sur fond de guéguerre culinaire.
Le petit monde des casseroles lyonnaises est en ébullition. Dernier acte en date ce mercredi 11 juillet : le rachat par Georges Blanc du restaurant de Nicolas Le Bec, rue Grôlée (2e arrondissement). 580 000 euros tout rond.
Le chef triplement étoilé de Vonnas, dans l'Ain, ouvrira en octobre, après rafraîchissement des lieux par l'architecte d'intérieur Pierre Chaduc, une brasserie de 100 à 120 couverts axée sur la viande (black angus, bœuf de Bavière, wagyu, charolais, etc.). C'est Olivier Metzger, le boucher star des chefs, qui signera la carte, très animale. "Les convives choisiront parmi une dizaine de garnitures et une dizaine de sauces bien typées", explique Georges Blanc. "Comptez 25 euros à midi et un ticket moyen de 40 euros le soir", complète Antoine Maillon, le directeur des opérations du groupe.
Le "Grand Blanc" lance donc les hostilités à Lyon, onze ans après s'être établi aux Brotteaux, avec Le Splendid. À l'époque, l'arrivée du roi de la Bresse s'était jouée sur fond de guéguerre culinaire. "En toute cordialité incisive", écrivait alors Lyon Capitale. "Un petit effet Fouquet venant faire de l'ombre au Roi Soleil."
À l'époque encore, un cuisinier de la galaxie Bocuse tançait dans nos colonnes : "Si Georges Blanc est un excellent entrepreneur, il est incapable de faire cuire un œuf au plat !" Onze ans plus tard, Georges Blanc dégoupille : "Paul Bocuse est le chef le plus connu, ça c'est sûr. En revanche, ce n'est pas le meilleur des cuisiniers." Bonjour l'ambiance.
Morille sur le poulet de Bresse, Georges Blanc a décidé d'appeler sa brasserie... Le Centre, clin d'œil des plus railleur aux brasseries de Paul Bocuse Le Nord, Le Sud, L'Est et L'Ouest. Joint par téléphone, le chef de Collonges s'est réjoui de la "bonne nouvelle", louant le "bon emplacement" de l'établissement. Ironie "bocusienne" en référence au quartier Grôlée, vidé de ses commerces et de ses habitants ?
Le Bec ouvre un gastro à Shanghai, en Indonésie et à Taïwan
De son côté, Nicolas Le Bec part vivre à Shanghai. Il ouvrira d'ici la fin de l'année un gastro de 900 m2 dans le quartier Bund, la "berge des étrangers" pour les Chinois, ancienne concession internationale de Shanghai.
Le restaurant, au 4e étage d'un immeuble qui accueille déjà deux autres établissements italien et anglais de luxe, donne sur l'ancienne ambassade du Royaume-Uni, aujourd'hui reconvertie en club pour banquiers internationaux. C'est dans le Bund que sont également implantés les frères Pourcel, Paul Pairet (Mr & Mrs Bund), Jean-Georges, etc.
Si Nicolas Le Bec réussit à Shanghai, deux autres établissements sont prévus en Indonésie et à Taïwan. Mieux, le groupe indonésien APP (Asia Pulp & Paper), l'un des plus gros producteurs de pâte à papier et de papier de la planète, souhaite se lancer dans la restauration et est décidé à lancer des Rue Le Bec en Indonésie dans une tour en construction.
Quant à sa Rue Le Bec lyonnaise, rien n'est encore décidé. Il y a de très fortes chances que NLB cède la place. Le potentiel est énorme (4,5 millions de chiffre d'affaires) mais l'endroit (qui appartient à VNF, à la Caisse des dépôts et consignations, au groupe Cardinal et à trois autres associés) a un prix.
En cédant son restaurant à son "grand copain" Georges Blanc, Nicolas Le Bec part de Lyon comme il y est venu : en snobant Bocuse. Le chef n'avait pas alors demandé l'aval du "pape" de la gastronomie, comme il était d'usage entre Rhône et Saône. Là, il lui met son meilleur ennemi dans les pattes.
Encore faut il que le service et la cuisine soient à la hauteur !