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E. Martinez:“La Cour des Comptes ne prône qu’une baisse des effectifs”

Représentant syndical des pompiers de l’Isère, Éric Martinez reproche à la Cour des comptes son analyse concernant le temps de travail des fonctionnaires, qui est parfois inférieur au seuil légal, et critique le raisonnement des Sages, qui n’obéirait, selon lui, qu’à une logique de réduction des dépenses publiques. Entretien.

Lyon Capitale : Vous avez souhaité réagir à notre article reprenant les différents rapports de la Cour des comptes qui mettent en avant un temps de travail des fonctionnaires parfois inférieur au seuil légal.

Eric Martinez : Les 35 heures, dans la fonction publique, sont issues du décret 2000-815, qui autorise les administrations à déroger à ce temps de travail pour des raisons particulières – travail de nuit, travail le dimanche, travail en équipe, travail en horaires décalés... Et ça, la Cour des comptes ne le dit pas.

Ils ne rencontrent pas le personnel. Se faire une idée uniquement à partir d'échanges avec le patron d'une collectivité, ce n'est pas ce qu'il y a de plus pertinent.

L’un de ces rapports concerne le Sdis de l’Ardèche, pour lequel la chambre régionale des comptes critique un temps de travail effectif trop faible.

Dans ce rapport, la chambre régionale des comptes critique le fait que les pompiers de l'Ardèche travaillent 1596 heures au lieu des 1607 heures annuelles. Ça veut dire que ces pompiers, qui travaillent une dizaine de dimanches par an, de nuit, par équipes ou en horaires décalés, on leur déduit à peine 10 heures sur l'année. Et en plus la Cour des comptes dit que ce n'est pas réglementaire.

Tous les paramètres pouvant diminuer le temps de travail s'appliquent aux pompiers et eux, contrairement au privé, n'ont pas de compensation financière. La Cour des comptes devrait plutôt dire qu’il faudrait qu’ils gagnent plus.

La Cour des comptes est aussi là pour éviter des dérives au sein de la fonction publique…

L'augmentation du temps de travail, notamment chez les pompiers, est faite pour éviter de créer des postes. La Cour des comptes ne prône qu'une chose, une diminution des effectifs pour gagner de l'argent.

C'est une solution de facilité. On diminue et, à un moment, on ne peut pas aller en dessous. Aujourd'hui, on a déjà atteint des limites. Sans compter que ça engendre des dépenses par ailleurs et que ce n'est pas forcément judicieux pour les finances publiques.

“Je n’ai pas connaissance de structure où les gens se tournent les pouces”

Pourtant, les effectifs de la fonction publique territoriale, notamment, augmentent...

Pourquoi les collectivités territoriales ont embauché ? Parce que l'Etat transfère des postes.

On nous dit qu'il y a trop de fonctionnaires, mais, quand on discute avec les pompiers, il en manque de partout. C'est la même chose avec les gendarmes ou dans la fonction publique hospitalière. On a trop tiré sur la ficelle. Je n'ai pas connaissance de structure où il y a trop de monde et où les gens se tournent les pouces.

Le Sdis auquel vous appartenez, celui de l'Isère, a fait l'objet en 2013 d'un rapport de la chambre régionale des comptes. Un rapport que vous dénoncez également ?

Sur les années étudiées, on avait le délai d'intervention qui était l'un des plus mauvais, selon des documents du ministère de l'Intérieur et, curieusement, ce rapport n'a pas relevé ce paramètre.

Or, quand on juge de l'efficience d'un service public, je me dis au contraire qu'il faudrait y accorder une grande valeur. A partir de là, est-ce qu'on peut s'appuyer sur ce rapport et y trouver un intérêt ?

Avez-vous essayé de le contester ?

J'ai envoyé un mail à la CRC Rhône-Alpes pour savoir si, d'un point de vue administratif, on pouvait contester ses rapports, je n'ai jamais eu de réponse.

Bien sûr, ce sont seulement des recommandations, mais les employeurs, selon si ça les arrange ou pas, s'en servent pour démonter les acquis sociaux des agents. Et quand ces recommandations sont plus ou moins réglementaires, ça pose des questions.

Il y a aussi eu, en 2014, un important conflit social au sein du Sdis de l'Isère, contre un projet voulant mettre les agents en conformité avec le seuil légal de 1607 heures. C’est finalement un sujet récurrent ?

Leur volonté était d'économiser, si on peut dire, 30 emplois. Ça a plutôt permis d'éviter d'embaucher 30 personnes dans la collectivité.

Quand on fait le cumul des arrêts de travail, on est quasiment au double du nombre de postes "économisés". On a voulu jouer sur un levier qui a démobilisé le personnel alors que, de l'autre côté, on aurait pu gagner le double d'emplois.

Le calcul selon lequel la collectivité peut économiser le versement d'un salaire en augmentant le temps de travail n'est donc, d'après vous, pas le bon ?

Avec le chômage que l'on connaît, on cherche à augmenter le temps de travail et donc à ne pas recruter. On se trompe. On essaie de jouer sur les dépenses, mais on ne regarde jamais les recettes.

Pour un département, est-ce qu'il vaut mieux qu'il verse un RSA ou qu'il verse un salaire, avec une situation plus favorable pour faire fonctionner l'économie ?

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