Banco à Décines – OSS 118

Le stade des ampoules n’est pas encore nommé qu’il est déjà banalisé. Dès son deuxième match à domicile, l’équipe lyonnaise a épuisé notre stock d’images d’Épinal. Vous pourrez toujours repasser avec votre “forteresse imprenable”, votre “effet psychologique” ou votre “modèle économique” ; tout cela a volé en éclats face au rival marseillais, pourtant bien loin de ses standards habituels.

Pis, dimanche à Bastia, face à une équipe qui ne doit pas manger tous les jours, l’OL s’est encore planté. Lors des dix dernières rencontres de Ligue 1, Lyon présente le plus faible ratio de points, celui d’un dernier du classement. Même Troyes a fait mieux sur la période ! Effectivement préoccupant. ON a pourtant changé d’entraîneur ; mais le nouveau, Bruno Genesio, a déjà une tête de mort-vivant, la peau grise, les yeux vides, le cheveu terne et la bouche fatiguée. Je ne suis pas toubib, mais ce garçon a besoin d’une cellule psychologique fortement membrée pour espérer le sortir de l’œil de Caïn. Que cela doit être dur pour un homme de se savoir choisi parce qu’il est le moins-disant “économique”. L’institution n’avait ni les ressources financières disponibles ni un modèle économique suffisamment fiable, donc attractif pour attirer une pointure européenne. À un moment, le “fabriqué local” montre ses limites ; la formation n’est pas une caverne d’Ali Baba, capable de sortir des Benzema en batterie tous les trois ans, mais plutôt d’honnêtes joueurs de Ligue 1 qui parfois se retrouvent à 8 ou 9 dans la composition d’équipe, ce qui est le cas aujourd’hui et je m’étonne que personne ne remarque le côté consanguin de la situation ; toute cette bande se connaît depuis l’adolescence en se tenant avec son code d’honneur à la noix et il est impossible au nouvel arrivant de se voir accepter dans le clan. Les échecs sont patents : Beauvue, Rose, Darder, Valbuena… n’ont jamais trouvé leur place, ni leur épanouissement. “Oh, toi, t’es pas d’ici donc t’écrase, on t’a rien demandé.”

Et le pire de la situation serait que tous ces petits chefs ont vu leur salaire revalorisé dans des proportions telles qu’ils en sont encore à se jauger pour voir si l’autre n’en a pas une plus grosse – de voiture, par exemple. Imaginez, vous qui êtes un intellectuel dénué d’intérêt pour les histoires d’argent, que votre compte en banque soit dorénavant crédité de 200 000 chaque mois, avec son lot de questions existentielles : “Bien, bien, j’investis dans la pizza à Momo ou je fais péter la Bentley blanche ?” Le pognon peut déstabiliser une équipe, c’est fait !

Le modèle économique, pour finir. Mais de quoi parle-t-on ? L’OL n’est pas un modèle économique, c’est un banco économique ; aucun professeur d’économie, aucun banquier digne de ce nom ne peuvent valider un modèle qui repose sur la chance – le foot est un jeu.

Il suffit d’un grain de sable, une blessure, une décision arbitrale contraire, une sextape, la faute à pas de chance, des attitudes de caillera… pour que ce modèle économique vole en éclats. Notre club n’a jamais fait partie de l’élite européenne ; il existerait un championnat des 18 meilleurs clubs européens, il n’est pas certain que l’OL en fasse partie : 4 équipes britanniques, 4 allemandes, 4 italiennes, 4 espagnoles, 2 portugaises, 2 françaises et j’élimine les Hollandais, les Belges et ceux de l’Europe de l’Est. En fait, Lyon est programmé pour la deuxième division européenne… Un jour très prochain, le football sera géré comme le basket aux États-Unis et les clubs seront “franchisés”. Vous pouvez tourner le problème dans tous les sens, notre ville n’aura jamais le poids économique suffisant pour espérer figurer parmi ceux qui passeront à la télé avec la musique qui fait frémir. À Milan, à Madrid ou à Londres, on survit à quelques années de disette. L’institution est si forte et les moyens semblent inépuisables. Mais à Décines ?

À un moment donné, même les bonnes poires fatiguent. Le modèle OL traîne déjà derrière lui quelques casseroles, comme l’introduction en Bourse, qui a surtout servi à plumer de braves gens en leur faisant croire qu’ils venaient d’acquérir du CAC 40… Eh non, c’est bien dans un casino que nous nous trouvons, à la façade cheap avec sa banale toiture métallique bien éloignée des panneaux photovoltaïques promis dans le contrat de mariage.

Pour finir, ayons une pensée attendrie pour le directeur financier de l’Olympique lyonnais. Imaginez son ballet perpétuel à danser au milieu de ces factures que l’on repousse, celles que l’on échelonne, cet argent qu’il faut continuer à emprunter et ces garanties qu’il faut signer, et j’oubliais les salaires qu’il faut honorer à temps, tous ces 200 000 avec les charges qui vont avec…

On dirait le lac Décines.

OSS 118

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