Grand Blanc
© Philippe Mazzoni

Concert : l’onde de choc Grand Blanc au Marché Gare

Originaire de Lorraine, catalogué parmi les nouveaux espoirs de la pop en français, Grand Blanc surfe, à coups de new et cold wave froide comme une lame, sur l’onde de choc d’une jeunesse passée dans une région mourante. À Lyon, ce sera... vendredi la nuit, avec Alexis & the Brainbow.

Grand Blanc, c’est ce drôle d’animal à la fois ondulant et titubant dans la nuit originairement venu de Lorraine mais aujourd’hui à cheval sur Metz et la capitale (on plaint les Rémois). Et c’est une sorte de Lorraine du dessous que Grand Blanc a su rendre universelle avec sa new wave qui serait comme un équivalent rock des films de Bruno Dumont.

Arrache-cœur messin

Sur la pochette de leur EP signature, Grand Blanc, on trouvait concentrés tous les clichés – qui d’ailleurs n’en sont pas – afférents à la région messine (les hauts-fourneaux, le Temple Neuf, le Graoully, ce dragon de légende...) en la superbe gravure d’un artiste-tatoueur lyonnais.

Et dans leurs chansons le récit de déambulations alcoolisées et de voyages sans avenir sur les terrains vagues. D’une grande dureté et d’une grande poésie, lointaine dans le son, arrache-cœur dans la forme. Le Grand Blanc, c’est le squale de l’ennui, le Degré zéro, du titre de la chanson qui les fait connaître, celui qui assaille les Petites frappes, le Samedi la nuit, autre titre phare.

 

Surprise Party

De phare, il est question sur la pochette de leur premier disque long format, Mémoires vives. Un phare qui est un peu la conséquence de tout ce qui précède. En gros plan, très artistique, celui d’une Nissan Micra (rappelant au passage l’Alfa Romeo fracassée de Bertrand Lavier dans l’exposition “L’art et la machine” du musée des Confluences), l’un de ces milliers de phares qui vont se fracasser en sortie de route, que le destin perd au retour de la Surprise Party (Surprise ! la faucheuse) dans une de ces campagnes ou ces non-zones où la voiture est aussi indispensable pour vivre que pour mourir. Une de ces fêtes où l’on combat le squale de l’ennui, enfanté par le requin de la jeunesse qui se croit éternelle, et par le fantôme de la désindustrialisation. À quelques pas d’un haut-fourneau ou de n’importe quoi d’autre en possibilité de totémiser l’absence d’avenir – on le disait, cela a commencé à Metz, ça l’aurait pu partout.

De cela, Grand Blanc fait une musique désespérante et parfois morbide, froide, petite-fille des Nancéiens de KaS Product. Mais qui, comme l’instant qui précède la catastrophe ou l’effondrement, a quelque chose d’une infinie pulsion de vie (sinon pourquoi chanter L’Amour fou ?), un instinct de prédateur de désillusion. La beauté de cette musique, c’est qu’elle lutte comme une fleur pousse sur le béton pour peu qu’il se fissure.

Grand Blanc, de ce Grand Est que personne n’entend, en ouvre, des fissures, en tapant fort pour se faire entendre. Les requins vivent dans l’onde, celui-ci surnage dans l’onde de choc.

Grand Blanc – Vendredi 8 avril à 20h, au Marché Gare.
1re partie : Alexis & the Brainbow, dont nous vous avons déjà parlé ici même en novembre.

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