Tu nombre me sabe a tango Cie L'Explose
© Alejandra Maldonado

Maison de la danse : la saison 17-18 ouvre (grand) les frontières !

Conçue comme un pied-de-nez au sein d’une France menacée de fermeture aux autres cultures, la nouvelle programmation de la Maison de la danse a été lancée ce mardi par sa directrice, Dominique Hervieu. Rendez-vous est pris pour un tour du monde de la danse !

Tu nombre me sabe a tango – Cie L’Explose © Alejandra Maldonado

© Alejandra Maldonado
L’Explose / Tu nombre me sabe a tango.

La présentation de la saison 2017-2018 de la Maison de la danse a démarré par une très bonne nouvelle : la confirmation de l’ouverture de l’Atelier de la danse dans les murs de l’ancien musée Guimet en 2020 à l’occasion de la Biennale de la danse. Lieu d’éducation artistique et de recherche, il devrait également disposer d’une salle permettant d’accueillir 500 spectateurs, avec un plateau équivalent à celui de la Maison de la danse. Attendu depuis longtemps, il permettra d’amplifier et conforter le travail de collaboration mené avec d’autres structures lyonnaises et des événements comme le festival Karavel, les Utopistes…

Malgré une baisse d’aide financière continue de la métropole (-6 % cette année) et avec toujours l’égal soutien de la Ville, de l’État et de la Région, cette nouvelle saison invite beaucoup de compagnies internationales et réduit la voilure côté présence française. Une volonté assumée par Dominique Hervieu, qui a écrit sa partition avec l’idée d’un Festival d’imaginaires sans frontières, structuré autour de repères historiques et de nouvelles créations.

Les grandes compagnies

Sleeping Beauty (La Belle au Bois dormant) – Yacobson Ballet © Yacobson Ballet

© Yacobson Ballet
Sleeping Beauty (La Belle au Bois dormant).

Œuvres classiques, modernes, afro-américaines, comédies musicales balisent une programmation qui n’oublie pas non plus de prendre des risques. Il y en aura donc pour tous les goûts et toutes les couleurs. Côté classique, la Maison de la danse a voulu le top du top en invitant le Yacobson Ballet avec La Belle au Bois dormant, chef-d’œuvre du chorégraphe Marius Petipa. Cinquante danseurs seront sur scène dans un feu d’artifice de tutus, de couleurs et d’intensité dramatique. Le grand show musical Cabaret, créé à Broadway en 1966 et repris ici par Michel Kacenelenbogen, sera présenté avant Noël sur treize soirées. On citera encore la danse sophistiquée et lyrique du ballet Alonzo King, que les Lyonnais plébiscitent depuis des années, et la compagnie junior Alvin Ailey II qui reprend les pièces emblématiques du grand chorégraphe. Sans oublier la reprise de Rain, chef-d’œuvre d’Anne Teresa de Keersmaeker sur la musique minimaliste de Steve Reich.

Les compagnies percutantes

Urban, par le Circolombia © David Levene

© David Levene
Urban / Circolombia.

Pour la première fois à la Maison de la danse, on découvrira les Suédois du Cirkus Cirkör, composé d’acrobates et de prodiges de la bascule coréenne. La pièce, qui défie l’apesanteur, rompt les frontières avec des éclats de corps propulsés autour d’une ode aux migrants. Trois compagnies colombiennes sont à voir : le Colectivo Danza Region qui donne la voix aux minorités noires de Colombie, avec des danses imprégnées de spiritualité et pétries d’influences africaines, la compagnie L’Explose, que l’on retrouve avec bonheur dans un tango en corps à corps qui détourne les codes du tango et du couple, et le Circolombia, constitué de jeunes issus de la rue et formés dans une école ouverte aux jeunes des favelas. Entre hip-hop et reggaeton, ils racontent, portés par une furieuse envie de vivre, leur quotidien mêlé à la violence de leurs quartiers.

Les coups de cœur de Lyon Capitale

Oona Doherty © Simon Harrison

© Simon Harrison
Oona Doherty.

À ne pas rater, la compagnie belge Peeping Tom, qui présente le deuxième volet d’une trilogie surla famille.Après Vader(le père), on découvriraMoeder (la mère), qui explore nos liens avec nos mères. On aime cet univers artistique qui, au travers d’une théâtralité quotidienne, fait émerger ce qu’il y a de plus enfoui en nous. Même si la thématique n’a rien d’original, le festival Sens dessus dessous fait honneur aux femmes, qu’elles soient artistes émergentes ou grandes chorégraphes. Et il y a fort à parier que la programmation constituera en elle-même une vraie rencontre chorégraphique. Maguy Marin présentera sa nouvelle création, inspirée de Propaganda écrit par Edward Bernays, le neveu américain de Sigmund Freud, qui décrit les principes de la manipulation de masse. On s’attend donc à tout avec la chorégraphe lyonnaise… Jan Gallois expérimente avec Quintette, de manière physique et métaphorique, ce qui unit et désunit les corps. L’Irlandaise Oona Doherty est annoncée avec un spectacle coup de poing, une performance autour de stéréotypes masculins véhiculés par des jeunes exclus de Belfast. Et la merveilleuse Nacera Belaza nous embarquera avec Procession dans un voyage fait de pénombre et de lumière au cœur du musée des Confluences. Robyn Orlin, monstre sacré de la danse sud-africaine, revient à Lyon avec un solo qui donne la parole à un homosexuel. On imagine une pièce drôle, percutante et politique.

Un Archipel pas comme les autres

Eduardo Guerrero © Marjon Broeks

© Marjon Broeks
Eduardo Guerrero.

Habituellement, les “archipels” concoctés par la Maison de la danse se font autour d’un(e) chorégraphe emblématique. Dominique Hervieu a eu la belle idée de le consacrer cette fois au flamenco, avec une série de spectacles portés par de très grands chorégraphes, dont le travail est synonyme d’émotions fortes et de modernité. La cerise sur le gâteau est qu’ils seront présentés dans le cadre des Nuits de Fourvière, qui, hélas, ont abandonné la danse. À ne pas rater, l’espoir du renouveau du flamenco, Eduardo Guerrero, avec sa gestuelle très contemporaine qui ne renie rien de ses racines.À voir et revoir, le superbe duo Sidi Larbi Cherkaoui - María Pagés, et à découvrir absolument, le circassien Aurélien Bory, qui s’essaye pour la première fois au flamenco à travers le portrait intime d’une flamenca.

Une programmation dans une logique de construction artistique et de territoires

Il est impossible de décrire toute la programmation et plus encore toutes les actions que mène la Maison de la danse pour faire comprendre et aimer la danse au public. Cette programmation, avec tous ses liens tissés à Lyon mais aussi à l’international, révèle l’ancrage réussi par Dominique Hervieu dans la construction de la danse sur nos territoires et dans nos imaginaires. Indiscutablement, son projet consiste à ne pas dormir sur ses lauriers mais bien à suivre l’évolution de l’accès à la danse, que ce soit avec le numérique (une nouvelle version du site Numeridanse, plus interactive, se prépare), la pédagogie, les croisements d’artistes et de lieux, des choix de chorégraphes qui appartiennent tous à une vision citoyenne et politique de la danse.

Cette saison 2017-2018 est présentée au public toute la semaine à la Maison de la danse :
– ce mercredi 3 mai à 15h et 19h30
– jeudi 4 mai à 20h30
– et vendredi 5 mai à 20h30
Entrée libre.
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