Législatives : les “marcheurs” craignent une arnaque au renouvellement

La victoire à la présidentielle à peine digérée, En Marche se tourne désormais vers les législatives. Les investitures s’annoncent sous tension entre des militants qui veulent croire à la promesse de renouvellement et des barons locaux qui négocient à Paris. Qui des militants ou du duo Collomb-Mercier aura l’oreille d’Emmanuel Macron ? La liste des candidats risque de faire beaucoup de déçus.

Au QG lyonnais d’Emmanuel Macron, sitôt l’ébauche d’euphorie suscitée par l’apparition de leur champion sur l’écran de télévision à 20h dissipée, c’est vers les législatives que toutes les conversations se sont orientées. Elles illustrent les tiraillements du jeune mouvement En Marche! Les militants apolitiques croient en la promesse de renouvellement de la classe politique et se refusent à voir leur mouvement comme un centre de recyclage des socialistes. Les élus PS ou des majorités de Gérard Collomb s’imaginent en pole position. Rue Grôlée, devant le QG de campagne d’En Marche, ces deux mondes ne se mélangent pas. D’ordinaire au centre de l’attention des militants, les élus, en grande majorité socialistes, se regroupent entre eux ou cherchent la compagnie des journalistes présents sur place. Les militants s’attroupent en petits groupes, souvent issus de leur cercle d’amis ou de leur comité d’arrondissement En Marche! Ces deux composantes du mouvement à Lyon attendent avec fébrilité l’annonce des investitures aux législatives, qui devrait tomber d’ici à jeudi midi.

Du renouvellement… hors de Lyon

Les candidats initialement investis par le PS (Hubert Julien-Laferrière, Anne Brugnera et Jean-Louis Touraine) ont basculé chez En Marche et espèrent être récompensés de leur pari. Gérard Collomb plaide en leur faveur : “À Lyon, nous sommes dans un cas particulier. Lorsqu’il y a un an, je disais qu’Emmanuel Macron représentait un renouveau pour le pays, heureusement que quelques-uns dans les rangs du PS m’appuyaient. Sans leur appui, je n’aurais jamais pu faire en sorte qu’En Marche se lance, gagne l’adhésion du pays et que l’on aboutisse à l’élection d’Emmanuel Macron. Je regarde toutes les circonscriptions de France, il y aura à la fois de l’expérience et du renouvellement.” Le son de cloche est sensiblement le même du côté de Bruno Bonnell, référent départemental d’En Marche. Pour lui aussi, la promesse de renouvellement sera respectée, mais à l’échelon national. D’autres responsables locaux du mouvement évoquent une promesse tenable au niveau départemental. Les “marcheurs” issus de la société civile auront leurs chances. Mais pas sur les terres de Gérard Collomb.

Les “marcheurs” veillent

Ce scénario, les militants qui ont déposé leur candidature en ligne sur le site d’En Marche! ne veulent pas s’y résigner. “Nous faisons confiance à la commission d’investiture pour ne pas recycler les socialistes. Si nous ne sommes pas entendus, nous le ferons savoir”, prévenait un “marcheur” de la première heure, dimanche soir, rue Grôlée. Pour ces jeunes militants qui se posent en garants du ni gauche ni droite, l’investiture des candidats de Gérard Collomb aux législatives s’apparenterait au premier renoncement du quinquennat. Ils naviguent dans le brouillard d’un mouvement apolitique qui se transforme brutalement en parti politique et leur glisse entre les doigts.

Mercier et Collomb à la manœuvre

Les candidatures “société civile” ne sont pour le moment évoquées, dans le microcosme centriste lyonnais, que dans les circonscriptions présentant les chances de victoire les moindres. À l’exception du cas Bruno Bonnell, dont la candidature est plus certaine que le territoire d’atterrissage : Villeurbanne reste toujours l’option la plus plausible. L’intéressé laisse planer le suspense. Pour les circonscriptions gagnables dans le Rhône, ce sont des vieux routiers de la politique lyonnaise qui manœuvrent à Paris. Les négociateurs règnent sur la scène locale depuis trente ans et ne cochent pas vraiment toutes les cases du renouvellement promis par Emmanuel Macron. Pour l’aile PS d’En Marche, c’est Gérard Collomb qui négocie. Pour le Modem, seul parti à avoir conclu une alliance avec le mouvement d’Emmanuel Macron, c’est Michel Mercier, sénateur-maire de Thizy-les-Bourgs et ancien président du conseil général du Rhône. “Ils n’incarnent pas le renouvellement mais ce sont les meilleurs négociateurs de France”, s’amuse un élu Modem. Michel Mercier est actuellement à Paris. Tout comme Gérard Collomb. “Je négocie les investitures aux législatives”, a-t-il seulement admis ce lundi 8 mai. Le Modem défend par exemple la cause de Thomas Rudigoz dans la 1re circonscription. Un nom sur lequel Gérard Collomb est d’accord.

Collomb contesté ?

Dans la 3e circonscription, les centristes et Gérard Collomb sont en désaccord. Le Modem privilégie une candidature de Fouziya Bouzerda quand le maire de Lyon soutient Jean-Louis Touraine. Dans la 2e, Hubert Julien-Laferrière, le maire PS du 9e arrondissement, semble toujours en ballottage favorable. Après avoir longtemps été la variable d’ajustement de Gérard Collomb, il pense enfin récolter les fruits de sa loyauté. Pour les apparatchiks du Modem et du PS qui nichent désormais à En Marche, seule la 4e circonscription est encore indécise. Anne Brugnera, l’adjointe à l’éducation du maire de Lyon, serait toujours soutenue par lui. “Ce serait un très mauvais choix. Elle est trop marquée PS. Il faut un candidat de la société civile pour l’emporter. La circonscription est gagnable sans l’étiquette socialiste”, peste une centriste. Une concession à la société civile est envisagée. De quoi aussi calmer la fronde qui monte chez les militants d’En Marche qui redoutent d’être dépossédés de leur mouvement.

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