#MeToo : plusieurs centaines de manifestants à Lyon

Plusieurs centaines de personnes ont participé cet après-midi au rassemblement organisé place Bellecour à Lyon, #MeToo dans la vraie vie. Hommes et femmes, manifestants ou membres d'associations, tous sont venus pour échanger et protester contre le harcèlement et les agressions sexuels. Témoignages.

© Marie Maleysson
"Pas de prescription pour les crimes sexuels"

"J'ai été agressée sexuellement par mon oncle quand j'étais petite. On m'a dit de me taire et de ne pas faire de scandale". Emma est venue avec deux amies pour apporter témoignage et soutien à la manifestation #MeToo dans la vraie vie. "Dans ma famille, c'était l’omerta. Quand j'ai décidé d'aller porter plainte, je pensais qu'on allait enfin m'écouter. Mais il y avait prescription, à une semaine près" se souvient-elle. C'est pour dénoncer la loi de la prescription qu'elle a fait le voyage depuis Le Puy-en-Velay. Feutre à la main, elle écrit sur une pancarte. "Pas de prescription pour les crimes sexuels". Pour cette commerçante de 43 ans, la réaction de l'entourage familial et amical peut être pire que l'agression en elle-même, avec laquelle elle a "appris à vivre".

Un mouvement qui veut s'inscrire dans la durée

Benjamin et Alexandre, respectivement enseignant et salarié, écoutent l'intervention qui se tient à la tribune. "On veut essayer de se mettre à la place des femmes qui subissent le harcèlement sexuel dans la rue ou au travail. Comprendre ce qu'elles vivent pour l'expliquer ensuite aux autres hommes." Participer à des défilés dans la rue si le mouvement continue de prendre de l'ampleur? "Oui bien sûr, on espère bien que ça va arriver" s'exclament les deux jeunes hommes. Comme eux, des hommes de tout âge se sont joints à la manifestation.

Quelques mètres plus loin, Félicia, Aude et Clémence, étudiantes lyonnaises, sont venus "faire du nombre et se renseigner sur les associations". Dans leur viseur, "les insultes, les mains aux fesses dans la rue et dans la famille". Pour elles, il faut multiplier les campagnes de prévention telles que celle menée dans les transports du réseau TCL, faire des interventions dans les écoles et revoir la question du consentement dans les films. "Il y a un gros problème de représentation de la femme dans la culture" soutient Félicia.

Nadine et Bernadette, elles, sont venues apporter leur soutien aux nouvelles générations. "J'ai été confrontée au harcèlement sexuel plus jeune et même en vieillissant, le regard des hommes est dur à porter. Il faut qu'il y ait une prise de conscience : une femme n'est pas soumise au bon vouloir d'un homme pour réussir" tonne Bernadette. "On doit rappeler que ce n'est pas nécessaire de coucher pour y arriver!" s'exclame Nadine, à ses côtés. Originaires de Lyon, elles souhaitent que "la parole continue à se libérer" et que "le mouvement #MeToo ne s'essouffle pas".

"Il faut une vision plus égalitaire de la société"

"Lorsqu'une femme qui a été victime d'une agression sexuelle vient nous voir et qu'elle ne veut pas porter plainte, ce qu'on peut tout à fait comprendre, on veut lui donner d'autres solutions. Le dialogue et la formation à l'autodéfense par exemple. Une fois, on a même affiché publiquement un militant politique qui avait agressé une femme." Charlie fait partie du Collectif d'autodéfense et d'action féministe (Caaf), né à Lyon il y a un an. Avec d'autres membres de l'association, elles sont venues apporter leur pierre à l'édifice #MeToo dans la vraie vie. Prudentes, elles ne donnent l'adresse de leur permanence mensuelle que par mail. "Pour éviter qu'on viennent nous agresser" confie Charlie.

Manifestation #MeToo dans la vraie vie

© Marie Maleysson
Manifestation #MeToo dans la vraie vie

Sur le même stand, à côté des flyers du Caaf, une pile de magazines "Femmes ici et ailleurs", distribué par la toute jeune maison des Editions du 8 mars. "Notre but, c'est de changer le regard sur les femmes en arrêtant de les montrer uniquement comme des victimes. Ce magazine, c'est une vraie crème anti-ride distribué par toute une armée de fourmis" sourit Marie Charvet, salariée de l'association Femmes ici et ailleurs, qui a créé la maison d'édition lyonnaise. À l'intérieur du magazine, de l'information générale sur les femmes agissantes. Pour le diffuser, les Editions du 8 mars ont engagé une quarantaine d’ambassadrices dans toute la France, dont une vingtaine à Lyon. Un moyen d'apporter un complément de revenus aux membres d'associations féministes, dont la situation est "catastrophique à cause de la baisse des subventions", selon Marie Charvet.

Léa, salariée au planning familial de Villeurbanne, note que le frein principal au dépôt de plainte, "c'est le comportement des médecins, des policiers et des gendarmes qui ne sont pas formés pour ça". Pour elle, la misogynie dans les milieux professionnels masculins est un vrai problème. Ce qu'elle préconise : la mise en place de référents formés à accueillir les personnes victimes de harcèlement et d'agressions sexuels. Et une "vision plus égalitaire de la société".

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