Bus de tourisme quais du Rhone
©Lucas LARCHER

Fête des lumières 2017 : les Lyonnais en ont-ils marre ?

La Fête des lumières est un événement touristique majeur. Mais là où certains habitants y voient profits et rayonnement culturel, pour d’autres ces 4 jours n’ont de festif que le nom. Face à l’afflux massif de visiteurs, des messages anti-touristes fleurissent sur les murs de la ville et sur les réseaux sociaux. Pour en avoir le cœur net, nous sommes allés à la rencontre des Lyonnais.

La foule lors de la fête des lumières 2017

©Lucas LARCHER
Les rues sont pleines autour des Terreaux

Amsterdam, Barcelone, Venise, trois villes où le tourisme joue un rôle majeur dans l’économie locale. La capitale hollandaise en reçoit par exemple 18 millions par an. Mais au grand dam des autorités municipales, plusieurs collectifs d’habitants se mobilisent depuis 2015 pour protester contre une activité touristique devenue la raison d’être de leur ville. Entre fêtes constantes, dégradations publiques, et destruction environnementale, les habitants se sentent dépossédés de leur ville.

Lyon est-elle touchée par ce phénomène pendant la Fête des lumières ? Quatrième évènement mondial (après le Kumbh Mela hindou, le carnaval de Rio, et l’Oktoberfest), il fait preuve d’une très grande attractivité. Deux millions de visiteurs étaient au rendez-vous en 2016, alors que la ville compte un peu plus de 500 000 habitants. La plupart des hôtels affichent complets, les offres de logements explosent sur l’application AirBnb et les bus de tourisme affluent en ville. Que penser alors de l’apparition sur les murs de Lyon du slogan "Tourists go home, Refugees Welcome", repris des mobilisations à l’étranger ? Les lyonnais en ont-ils assez des touristes ?

Les lyonnais en overdose ?

Tag anti touriste sur le pont menant à Bellecour

Pour certains habitants, la Fête des lumières est synonyme de calvaire. Presqu’ile bouclée, lignes de transports en commun perturbées, bains de foules inévitables, quais envahis par les bus de tourisme, ils expriment leur ras-le-bol. Sur les réseaux sociaux les commentaires blasés sont nombreux, et l’intérêt aux installations en baisse. Sur le site de Rebellyon, media lyonnais collaboratif d’extrême-gauche, on dénonce un évènement "Disneyland" ayant perdu tout son sens de "fête populaire", et n’étant plus fait pour les lyonnais mais pour les touristes. Mais l’avis est loin d’être partagé par les habitants que nous avons rencontrés.

Deux agents de sécurité sont postés devant une bouche métro. Comme beaucoup de leurs collègues, ils sont chargés ce soir de veiller à la sûreté des usagers. "Je dirais qu’on est à 60% guide et à 40% agent de sécurité. On entend régulièrement des plaintes mais ce sont surtout des gens qui rentrent du travail le soir, et pour qui les perturbations des transports en commun sont pénibles". L’affluence de touristes ne les dérange pas, c’est leur travail, assurent-ils. Mais à l’évocation de la soirée à venir, les sourires se font plus crispés. "Vendredi soir c’est le pire. Il va y avoir foule. On est là jusqu’à 00h45, et il va sûrement pleuvoir".

Le tourisme, promesses de revenus

Impossible de se promener sur la presqu’ile sans croiser les triporteurs faisant office de vélo-taxi. Cyclopolitain est une entreprise présente à Paris, Lyon et Nice. Elle met à disposition sa flotte de vélos à des pilotes autoentrepreneurs. "Pour la Fête des lumières notre planning est plein", explique Clément Pette, responsable de l’agence lyonnaise, "tous nos pilotes veulent travailler". Et c’est fort compréhensible. En 4 jours, ils n’auront que peu de répit. "Les réservations augmentent beaucoup pendant la Fête des lumières. Il en va de même pour les demandes spontanés, faites directement au pilote". Spécialement pour la Fête des lumières, Cyclopolitain permet à ses pilotes de travailler le dimanche, exception étendue aux deux prochaines semaines, en prévision des emplettes de Noël.

Bus de tourisme

©Lucas LARCHER
Les bus de tourisme stationnés le long du Rhône

Depuis plusieurs années, un commerçant que nous avons interrogé vend gaufres et crêpes sous sa devanture à l’occasion de l’évènement. L’affluence de touristes est pour lui synonyme d’une augmentation de sa clientèle. Malheureusement, le dispositif de sécurité menace son activité. "Mais on sait pas combien de temps on va pouvoir continuer. Ils ont forcé d’autres vendeurs du quartier à fermer le soir. J’ai peur que ça soit bientôt mon tour". En cause, ses appareils de cuisson. Cette année, leur utilisation est soumise à un très fort contrôle et leur usage quasiment interdit à l’intérieur du périmètre de sécurité. Dans une boutique de vin du quartier, un autre commerçant soupire, après avoir indiqué leur chemin à deux jeunes touristes : "On guide autant qu’on vend".

Sur la couverture trempée d’un vendeur de rue, s’étalent ses "œuvres artistiques". Habilement, il tord d’épais fils de fer colorés ou chromés entre ses doigts et fait naître ses pièces. Animaux ou végétaux, ses créations remuent sous le vent. Lui n’est pas lyonnais mais parisien. A chaque Fête des lumières, il est pourtant là, rue de la République, à exposer ses œuvres aux passants. Pour lui, avec l’affluence touristique, c’est l’assurance de vendre et de vivre. "Ce que je fais, c’est de la survie, c’est de la débrouille. Mais je deviens trop vieux pour continuer, je vais devoir trouver autre chose", confie-t-il avec un sourire las.

Fierté lyonnaise

Même si la rhétorique est la même, il ne faut donc pas voir dans les protestations lyonnaises un mouvement aussi important qu’à l’étranger. Amsterdam, Barcelone et Venise sont confrontées à un tourisme de masse perpétuel, bien loin des seuls quatre jours de la Fête des lumières. La grande majorité des lyonnais se réjouit toujours de l’évènement, partie intégrante de l’identité de Lyon et fierté de ses habitants. L’édition 2017 voit notamment le retour au format traditionnel de 4 jours, le dimanche soir étant connu pour être le « jour des Lyonnais », celui où les habitants peuvent profiter des illuminations en famille.

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