Deux noyades à proximité de camps de migrants à Paris ont relancé les tensions entre la mairie et le ministère de l'Intérieur. Anne Hidalgo a appelé l'État à agir, Gérard Collomb lui a répondu en la renvoyant à ses responsabilités.
Dans un courrier adressé le 27 mars au ministère de l'Intérieur et révélé par Libération, la maire de Paris, Anne Hidalgo a alerté Gérard Collomb sur "la situation [...] aujourd’hui intenable et inacceptable sur le plan humanitaire […] L’étroitesse de certains passages entre les tentes et les canaux, parfois réduite à moins de 50 centimètres, génère des risques très significatifs de noyade." Mardi dernier, le corps d'un Afghan d'une vingtaine d'années a été retrouvé dans le canal Saint-Martin. Le dimanche précédent, un autre corps en état de décomposition avancé et dont l'identité n'a pu être établie était également retrouvé, cette fois dans le canal Saint-Denis.
Point commun entre les deux noyades : les deux corps ont été repêchés à proximité de camps où s'entassent des centaines de migrants dans des conditions jugées "indignes" par le Défenseur des droits, Jacques Toubon. La mairie de Paris estime qu'elle ne peut continuer à se substituer aux compétences de l'État face à une situation qui ne cesse de se dégrader. Anne Hidalgo demande la mise à l'abri de ces migrants et en a ainsi appelé plusieurs fois à Gérard Collomb par médias interposés.
Mise à l'abri contre évacuation
La réponse du ministre de l'Intérieur ne s'est pas faite attendre. Dans un courrier adressé à la mairie le 9 mai et consulté par Libération, Gérard Collomb renvoie Anne Hidalgo à ses propres responsabilités : "Contrairement à ce que vous laissez entendre, la mobilisation de l’État a été sans faille s’agissant de la prise en charge des migrants en Ile-de-France. […] L’occupation dans la durée du domaine public de la ville de Paris ne relève pas de la compétence de l’État. La commune reste garante de la salubrité et de la propreté de son espace. Il vous appartient donc de faire usage de vos compétences en matière de conservation du domaine public municipal et d’entamer les procédures judiciaires qui donneront aux services de l’État toutes les garanties procédurales pour qu’une évacuation soit menée à bien".
Mais là où la place Beauvau parle d'évacuations pures et simples, la mairie de Paris réclame des solutions de mise à l'abri. Dans son courrier du 9 mai l'ancien maire de Lyon s'en prend d'ailleurs à la politique d'hébergement "indifférencié des personnes arrivant à Paris", qu'il juge inadaptée, rappelant sa décision, prise à l'été 2017, de conditionner ces hébergements à la situation administrative de chaque migrant.