Les baraques des Gilets jaunes disparaissent peu à peu des ronds-points de la région. Dans l’agglomération lyonnaise, celui de Feyzin est parti en fumée mercredi. Jeudi, dans le nord de l’Isère, une zone où le mouvement était très actif, le dernier rond-point occupé, celui de Bourgoin-Jallieu, a été évacué. Dans le calme.
La mort dans l’âme, les Gilets jaunes lèvent le camp. Il est 15 heures et le délai laissé par les policiers vient d’expirer. Le giratoire des Bussières, qui dessert le Carrefour de Bourgoin-Jallieu, était occupé depuis l’acte I du mouvement. Sur l’une des sorties, un retraité est tout seul. Il laisse son brasero se consumer jusqu’au dernier moment. Trente minutes plus tard, il ne reste que des braises fumantes, sa banderole a disparu. De l’autre côté du rond-point, sur un terrain agricole, les Gilets jaunes démontent une cabane dont ils venaient juste de commencer la construction. Dernier inventaire avant fermeture : les palettes de bois sont conservées. Au cas où. “Depuis trois ou quatre jours, on se sentait menacés d’expulsion. Nous avions demandé au maire un délai pour tenir le rond-point jusqu’à dimanche, mais la police et la préfecture ne veulent plus de cabanes”, regrette Brigitte. Avec ses camarades, elle pensait avoir trouvé la solution : un agriculteur leur a donné la possibilité de s’installer sur son terrain. Mais la volonté préfectorale de ne plus manifester au bord des axes routiers a brisé leur plan B. Ils évacuent dans le calme, sous la surveillance de policiers pas mécontents à l’idée de voir le calme revenir. Les réunions de Gilets jaunes se tiendront dans un local mis à disposition par la mairie. “C’est bien, mais nous on a besoin d’être vus par les gens, qu’ils klaxonnent”, regrette l’un d’eux. “Ils veulent nous étouffer. On est en dictature”, s’exclame une retraitée.
Un Noël sans brasero
De l’aveu même des forces de l’ordre, ces derniers Gilets jaunes ne comptent pas parmi les plus véhéments. À une dizaine de kilomètres, le giratoire du Totem noir à Saint-Quentin-Fallavier a été évacué la semaine précédente en raison de la tension qui y régnait. Les éléments les plus remontés s’étaient ensuite éparpillés sur les autres ronds-points occupés des environs. “Ici, on a été gentil, mais ça ne sert à rien”, se désole Brigitte. Comme beaucoup de Gilets jaunes, elle avait envie de réveillonner sur son rond-point. Au fil des semaines, c’était devenu l’un des objectifs de celles et ceux qui passaient leur journée au milieu des voitures et des camions, à l’affût d’un coup de klaxon.
Démantèlement régional
Depuis le début de la semaine, tous les ronds-points de la grande banlieue se vident de leurs Gilets jaunes. Le mouvement perd de sa puissance, mais ce sont surtout les forces de l’ordre qui ont décidé de mettre fin à cette occupation illégale du domaine public après un mois de fleurissement de Zad devant les zones logistiques et commerciales de la région. À Feyzin, les Gilets jaunes sont partis d’eux-mêmes. Ravagé par le vent, leur campement sauvage a alimenté un grand feu de joie mercredi. Ils s’étaient promis de revenir, mais ce jeudi il n’y a personne sur le giratoire qui mène à la raffinerie Total. Un équipage de police fait le planton. Au cas où. À l’entrée de Teo, où des Gilets jaunes menaient des opérations péage gratuit, personne non plus ce jeudi. Comme à Givors, où les giratoires ont surtout été bloqués le week-end. Sur les ronds-points occupés, restent les traces de ce mouvement inédit qui a changé le cours du quinquennat d’Emmanuel Macron. Les feux de pneus ont noirci la chaussée. À Feyzin, des tags rappellent la présence continue de Gilets jaunes pendant plus d’un mois. “On laisse passer les fêtes et on reviendra”, promet Brigitte, qui se présente comme une “Gauloise réfractaire”.