Pascal Le Merrer, fondateur des Journées de l’économie de Lyon © Antoine Merlet
Pascal Le Merrer, fondateur des Journées de l’économie de Lyon © Antoine Merlet
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“Le capitalisme semble relativement fatigué” (Pascal Le Merrer, Jéco)

Entretien avec Pascal Le Merrer, professeur d’économie à l’ENS, qui a fondé, à Lyon, en 2008 les Journées de l’économie, dont la 12e édition s’ouvre le 5 novembre sur le thème “Environnement, numérique, société… la décennie de tous les dangers”. Dix ans durant lesquels les économistes vont devoir “trouver un consensus” pour éviter un retour des populismes.


Lyon Capitale : En quoi êtes-vous une grande gueule ? Pascal Le Merrer : J’ai plutôt tendance à m’exprimer tranquillement. Je ne pense pas qu’il y ait besoin de crier. En revanche, il faut avoir un message clair pour être compris. Les économistes souhaitent rarement s’imposer en criant plus fort que les autres. Souvent, on leur reproche plutôt d’être trop techniques, trop formatés, etc. Ce qu’on attendrait parfois, c’est un langage plus direct quand ils s’adressent aux gens. La science permet-elle d’avoir un langage plus simpliste ? C’est vraiment une question d’habitude. L’économiste est habitué à intervenir dans un cadre scientifique comme un congrès, où il y a un format à respecter. Il y a aussi des disciplines, entre guillemets, “qui sont plus proches des gens”, par l’idée de culture générale. Si on a un historien, un philosophe, un géographe, on a l’impression qu’ils nous parlent plus directement. Alors qu’avec l’économie on a tout de suite l’impression que ça va être technique. Pourtant, aujourd’hui, on a des économistes qui font vraiment de gros efforts. Vulgariser, est-ce l’enjeu pour tout scientifique aujourd’hui ? L’enjeu, c’est de rendre accessibles des analyses. En 2006, il y avait un ministre de l’Économie qui avait dit à Londres : “Les Français sont nuls en économie, c’est pour ça qu’on ne peut pas faire de réformes.” Et, à ce moment-là, le ministère de l’Économie avait créé une structure qui s’appelait Codice, une initiative coûteuse qui a été abandonnée. C’est après ça que j’ai eu envie de lancer les Jéco, pour que tout le monde puisse comprendre les sujets économiques. Pourquoi à Lyon ? Je voulais que ce soit ancré dans la ville, mais pas à Paris… Et j’ai trouvé à Lyon l’écosystème idéal, parce que c’est une grande ville facilement accessible, ce qui n’est pas le cas de Toulouse qui a pourtant une prestigieuse école d’économie [la Toulouse School of Economics, TSE, NdlR]. Ici, immédiatement, les collectivités locales ont été très réceptives. Ça a commencé en 2008. Gérard Collomb a dit à l’époque : “Le Merrer a déclenché une crise financière pour que l’on s’intéresse à l’économie.” L’idée, c’était aussi de créer une proximité avec les intervenants… J’avais en tête qu’il fallait des lieux où une forme de convivialité et de relation directe était possible. Je me suis donc tourné vers les salles de spectacles comme les théâtres ou l’opéra. Rétrospectivement, il fallait être un peu inconscient pour demander le théâtre des Célestins… J’ai eu beaucoup de chance que les collectivités locales acceptent de me suivre. Qu’est-ce qui fait que cela dure ? Je pense que l’économie génère une dualité de réaction chez les gens : elle irrite, mais en même temps elle éveille de la curiosité.

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