Trois ans après sa disparition, une poignée de musiciens du cru rend un bel hommage discographique au plus beau et plus célébré représentant de la pop lyonnaise : Hubert Mounier, fondateur de L’Affaire Louis Trio. Pour la sortie de ce disque, un concert collectif et festif est organisé au Transbordeur le 5 novembre.
Ce que c’est que la gloire posthume. En son temps, on n’avait peut-être pas mesuré, à Lyon, l’importance d’Hubert Mounier, combien cette référence pop avait engendré de vocations ; la manière dont son esprit libre et frondeur avait infusé l’esprit de ses suiveurs, signalant par l’acte plus que par la parole qu’il est permis de se livrer à toutes les fantaisies, pour peu que l’on soit animé d’une profonde sincérité. Oh, bien sûr, Benjamin Biolay n’a jamais tari d’éloges sur celui qu’il considérait comme son mentor ; allant même jusqu’à le produire une fois que son aura d’élève eut dépassé celle du maître. C’est lui d’ailleurs qui lui rendit ce bel hommage, en juillet 2018, sur la scène de Fourvière, où renaquirent pour un soir les chansons immortellement pop de Mounier. Mais, qu’en était-il de cette scène locale qui n’a pas toujours eu l’heur de connaître des feux de la rampe aussi incandescents, de fouler dans un sens ou dans l’autre les marches des hit-parades ? De ces amis plus ou moins déclarés qui n’avaient pourtant que les yeux de Chimène pour leur capitaine chantant désormais au fond des mers ? Eux aussi avaient sûrement des choses à dire.
Joe Bel, Buridane, Auren & Co
Ce soir de juillet 2018, Biolay a allumé une mèche. Là, les membres des Chic Types et Stan Mathis, figures du rock lyonnais, se mettent à évoquer un hommage de la scène locale. “Il y avait une demande des salles, explique Stan Mathis qui, avec la société Stardust, allait porter le projet. J’ai alors proposé qu’on travaille sur un album avec les gens de la scène lyonnaise que je connaissais.” Et Mathis de contacter des artistes aussi divers que Le Voyage de Noz, Joe Bel, Denis Rivet, Buridane, Auren, des figures plus nationalement écloses tels Carmen Maria Vega ou l’ami Kent, mais aussi le bluesman They Call Me Rico, qui se chargerait également d’enregistrer et de coordonner tout ce beau monde depuis son studio de l’avenue Lacassagne. Le cahier des charges tient alors en deux mots : “liberté artistique”. À chacun de choisir un titre de Mounier et de l’orchestrer selon son goût. En tout, pas moins de quatorze titres figurent sur le disque, baptisé Place Hubert Mounier, dont la pochette rappellera certaines des marottes pop d’Hubert, singeant le Sgt. Pepper des Beatles.
L’amour est dans l’air
Musicalement, entre embardées personnalisées et duos, c’est le bel éclectisme de l’auteur-compositeur qui est salué : du sautillant et cuivré Tout mais pas ça de Carmen Maria Vega à la douceur folk instillée par Buridane et Frédéric Bobin sur L’amour est dans l’air ; de la mélancolie fiévreuse de Stan Mathis et Joe Bel sur Loin à la douce amertume de Kent sur Voyager léger, en passant par l’approche jazzy de Khaban sur le très beau Fatalitas ou la pompe échevelée toute de frontalité rock du Voyage de Noz sur Le Capitaine. Tout cela ne pouvait voir le jour sans un concert digne de ce nom – et gratuit – qui, réunissant ce beau monde (à l’exception de Joe Bel, en tournée canadienne, et de Kent), soulignera la sortie du disque. Il est programmé ce mardi 5 novembre au Transbordeur. Initialement prévu au Club Transbo, vu l’afflux de réservations, il investira la grande salle et une autre date est d’ores et déjà prévue à la Comédie-Odéon en avril.
Sans doute la meilleure manière de rendre grâce à un musicien qui, aux dires de Stan Mathis, que personne ne démentira, “a laissé une trace importante et évidente sur le plan artistique, mais aussi et surtout sur le plan humain”. C’est peut-être cela qu’il faut retenir des chansons d’Hubert Mounier, un chic type sur une planète qui ne l’est pas tant que ça.