Brume à Lyon

Halloween : histoires et légendes des monstres et fantômes de Lyon

Histoire de Lyon - En ces temps où l'on aime jouer à se faire peur, Lyon regorge d'histoires de monstres et de fantômes. Dame blanche, huissier au cœur de pierre qui se transforme en "gros caillou", créatures cachées dans le Rhône... à travers les époques, les légendes lyonnaises restent immortelles.

Les druides barbares : l’île Barbe du temps de Charlemagne

Avant de s’appeler Barbe, l’île de la Saône où les présents Lyonnais vont s’ébattre les dimanches d’été était celle des Barbares, insula barbara (en latin) selon les Romains. Ces derniers n’osent s’y aventurer la nuit, on dit alors que les druides pourchassés se livrent à des sacrifices humains. Au Ve siècle, une abbaye fait son apparition. Elle se constitue l’une des plus belles bibliothèques d’Europe, attisant la passion des plus curieux. Une nouvelle légende fait alors son apparition. On dit que Charlemagne en personne aurait voulu terminer sa vie sur l’île Barbe et y être enterré.

Le crocodile du Rhône, mais que fait donc ce reptile à Lyon ? Plusieurs légendes existent sur son compte.

Ceux qui ont eu la chance de visiter l’Hôtel-Dieu avant sa fermeture pour travaux ont pu remarquer un crocodile pendu au plafond. Ce même crocodile a inspiré le logo de l’Association générale de l’internat des Hospices civils de Lyon. La plus connue des légendes, racontée par Étienne Dagier dans son Histoire chronologique de l’Hôpital général et grand Hôtel-Dieu de Lyon, explique qu’en 1745 un crocodile est aperçu dans le Rhône sous le pont de la Guillotière. L’animal aurait attaqué des embarcations, ce qui entraîne une interdiction de naviguer. Lyon part à la chasse au crocodile. On essaye de l’abattre, mais la créature est trop agile. Deux condamnés à mort proposent de s’en occuper à condition d’être graciés. Depuis une barque, ils auraient utilisé du sable pour aveugler le monstre, avant de le tuer avec des piques dans un combat homérique. Le crocodile rend son dernier souffle et son corps est transféré dans la chapelle Saint-Esprit puis à l’Hôtel-Dieu. Impossible de déterminer aujourd’hui la part de vérité de cette histoire. Une chose est sûre, la dépouille ne présente aucune entaille due à des piques.

La dame blanche de la Croix-Rousse : la légende qui terrifie les enfants

Un fantôme qui annonce un mauvais présage, des cris dans la nuit qui sèment l’effroi. Comme beaucoup de villes, Lyon a sa dame blanche, dont les “apparitions” datent du Second Empire.
Spectre pour certains, fée pour d’autres, elle flottait au-dessus du sol et tenait en ses mains un objet qui annonçait un drame. S’il s’agissait d’une coupe d’eau, Lyon allait subir une inondation ; une torche, c’était la peste ; le pain, la famine ; une épée, la guerre ! En 1840, certains disent l’avoir aperçue avec de l’eau, la ville est touchée ensuite par de graves inondations. Et gare aux enfants qui ne seraient pas sages : à Lyon, le Mâchecroute veille tel un père Fouettard, et la dame blanche n’est jamais loin pour emporter avec elle les fripons qui chercheraient à éviter le monstre marin.

Lugdunum berceau des loups-garous : Gilles Garnier, le monstre lyonnais

Les loups-garous sont une vieille tradition à Lyon. Dès le début du Moyen Âge, au Ve siècle, on parle de lugarou, ou Lug-garien (de Lug, qui aurait donné Lugdunum). À travers cette expression, l’Église cherche à décrédibiliser et animaliser les derniers adorateurs du dieu celtique dans l’ancienne Lugdunum. Les Lug-gariens – synonyme de païens à Lyon – deviendront progressivement loups-garous. Le mot devient même plus populaire que “lycaons” (qui vient du grec). Avec une pointe de chauvinisme, on peut affirmer que les loups-garous sont lyonnais. L’un d’eux a marqué l’histoire. Dans Hérésies, diableries et sorcelleries à Lyon et alentour, Bruno Benoit présente “Gilles Garnier”, loup-garou le plus connu, né à Lyon et brûlé vif à Dole en 1573 pour ses crimes. Ce “loup-garou” a “pris une jeune personne de l’âge d’environ de 10 à 12 ans, dans une vigne, et l’a tuée et occise tant avec ses mains semblant pattes qu’avec ses dents, l’a mangée et non content de ce, en a porté à sa femme”. “Sous la forme de loup”, il a tué une deuxième personne plus tard, mais n’a pu la dévorer, arrêté dans sa folie par trois personnes. Gilles Garnier frappe de nouveau quelques jours plus tard, tuant un enfant de 10 ans, qu’ensuite il démembre. En 1573, il fait une quatrième victime, cette fois-ci sous sa “forme d’homme”. Arrêté, il confessera avoir agi sur ordre du diable, qui lui a “donné le choix de devenir quand il voudrait ou loup, ou lion, ou léopard, mais il avait préféré loup”. Gilles Garnier est le dernier loup-garou ; face à la Réforme, l’Église s’est trouvé un nouvel ennemi qui “mangerait les enfants” : les protestants.

L’huissier au cœur de pierre, un gros caillou issu de la colère de Dieu

Selon la légende, Jean Tormente était un huissier au cœur de pierre, insensible aux prières des canuts qu’il jetait à la rue. Un jour, l’homme va trop loin et déclenche la colère divine. Dieu le condamne à pousser son propre cœur, sous la forme d’une pierre géante, dans toute la ville. Seul un homme pire que lui pourra prendre sa place. Jean Tormente traverse tout Lyon sans jamais trouver le salut et termine son voyage là où tout a commencé, à la Croix-Rousse. En réalité, le “gros caillou” fut découvert en 1862, lors du chantier de la ficelle de Lyon. Ce bloc serait issu des Alpes et aurait voyagé jusqu’à Lyon grâce aux glaciers. Symbole de la Croix-Rousse, il fut placé à cheval entre le 1er et le 4e arrondissement. Sacrilège, en 2007, il est déplacé de quelques mètres dans le
1er arrondissement, ce qui restera en travers de la gorge de plus d’un Croix-Roussien. Le Gros Caillou a un petit frère dans les souterrains de Lyon, les mystérieuses “arêtes de poisson”, où un “caillou” d’un mètre semble avoir été oublié au milieu d’un tunnel ; mais personne n’a jamais su d’où il venait.

La bête du Lyonnais : un loup ou une hyène ?

Tout le monde connaît la bête du Gévaudan, qui a marqué les esprits avec plusieurs attaques commises entre 1764 et 1767. Ce n’est pourtant pas la première “bête” française. Entre 1754 et 1756, une ou plusieurs bêtes ont terrorisé la vallée du Rhône, jusqu’à Vienne, faisant plus d’une trentaine de victimes. À chaque fois, ce sont de jeunes enfants ou des adolescents, retrouvés partiellement dévorés. Plusieurs battues regroupant jusqu’à 2 000 hommes sont organisées pour tuer la bête, en vain. La créature semble insaisissable, apparaissant à chaque fois là où on ne l’attend pas. Certains disent avoir vu une hyène, comme pour la bête du Gévaudan plus tard, d’autres des loups. Cette seconde hypothèse est sans doute plus probable : les hivers sont alors rudes et les animaux ont parfois du mal à trouver de la nourriture. Les jeunes enfants ou adolescents bergers qui composaient leurs victimes principales étaient des proies faciles, et surtout non armées. Fin 1756, la bête disparaît sans avoir été tuée ni même capturée. Les théories sur sa nature continuent, la rumeur dit alors qu’il s’agirait peut-être d’un loup-garou…

L’exorciste des Terreaux : phénomènes paranormaux à l’abbaye Saint-Pierre

Autour de 1527, l’ancien couvent Saint-Pierre aux Terreaux fut le théâtre d’une des plus grandes affaires de mœurs de la Renaissance, mais aussi d’une série d’apparitions de fantômes et d’exorcismes. Le mois dernier, nous avons abordé brièvement l’histoire des sœurs de l’abbaye de Saint-Pierre qui vendaient leurs charmes, au XVIe siècle. Acculées par l’archevêque de Lyon, elles n’ont pas d’autre choix que de fuir, vendant quelques objets pour financer leur vie d’après. Le châtiment divin tombe : la mère supérieure Alix de Tissieux meurt dans d’affreuses souffrances, criant avant de mourir le nom d’Antoinette de Groslée, une jeune sœur restée au couvent. Quelques nuits plus tard, Antoinette sent un baiser sur sa bouche ainsi qu’une présence dans sa chambre. Elle appelle Alix, qui aurait été sa maîtresse autrefois. L’esprit répond favorablement, refusant d’aller au Purgatoire tant son âme est encore tourmentée. Il se manifestera à plusieurs reprises, prenant même possession du corps d’Antoinette. La jeune nonne flotte au-dessus de son lit. Dans les couloirs du couvent, un chien aux yeux gorgés de flammes fixe tous ceux qui osent croiser son regard. L’archevêque décide d’appeler un exorciste. Lors de la cérémonie, celui-ci somme le diable de “sortir immédiatement d’ici”, jette de l’eau bénite, frappe du pied, envoie d’autres prêtres dans toute l’abbaye pour mettre fin aux possessions. Les démons auraient alors tenté de posséder d’autres sœurs, mais la nouvelle mère supérieure fait barrage de son propre corps. La suite de l’histoire connaît deux versions : l’exorcisme fonctionne, l’âme d’Alix est apaisée et cesse de tourmenter Antoinette, non sans lui avoir rendu une dernière visite ; autre version, c’est la destruction du couvent par le baron des Adrets en 1562 qui met fin aux phénomènes paranormaux.

Le Mâchecroute, monstre du Rhône

Pourquoi le Rhône, force de la nature, pouvait-il reprendre en quelques instants tout ce qu’il avait donné auparavant durant de longs mois ? Au Moyen Âge, le fleuve est loin d’être domestiqué, les Lyonnais veulent personnifier ce démon des crues qui arrivent sans prévenir, ne laissant derrière elles que désolation. C’est alors que le Mâchecroute fait son apparition. Ce dragon, lié au fleuve, dormirait sous le pont de la Guillotière. Tiraillé par la faim ou mis en colère par les bateaux, il peut se réveiller et tout détruire à Lyon et alentour. Il se repaît des animaux qui pâturent le long du fleuve, chasse les ponts qui empiètent sur son habitat. Rabelais donne une description du monstre dans son Quart Livre en 1548 : “Les yeux plus gros que le vendre, la tête plus grosse que tout le reste du corps, avec d’amples et larges et effrayantes mâchoires bien dentelées, tant au-dessus, comme en dessous.” Lors du carnaval, des effigies du Mâchecroute sont brandies comme pour exorciser la peur de ce monstre. Mais le Mâchecroute n’est pas seul. On raconte alors que d’autres dragons peuplent le Rhône, certains à Lyon, d’autres plus au sud. À Tarascon, c’est le Tarasque qui terrorise les habitants, à Arles, il se nomme Drac ; partout où les crues détruisent des vies, des créatures sont accusées. Avec la révolution industrielle, elles vont disparaître. Les fleuves sont domestiqués et les dragons s’endorment au fond des lits. Pour combien de temps ?

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