Le 10 juillet dernier, l'escrimeuse Joséphine Fourniguet a été sacrée championne de France des moins de 20 ans en fleuret individuel. Le lendemain, c'est au sein de l'équipe de la Société d'Escrime qu'elle a remporté le titre. Étudiante en ingénierie à Lyon, la jeune fille cumule les médailles et les heures de travail.
C'est à Montbéliard, dans le Doubs (25), que Joséphine s'est installée pour les vacances d'été. À 20 ans, l'escrimeuse profite de ses congés à la fois sportifs et académiques pour se reposer chez ses parents. "Au début, ça fait du bien de prendre une pause, mais parfois, ça me manque un peu: je ne touche pas mon fleuret jusqu'à fin août !" Cette année, la saison a été quelque peu décalée par les restrictions sanitaires, et son programme d'entraînement physique devrait suffire à combler le manque lié à l'absence de pratique.
Depuis trois ans, Joséphine Fourniguet vit à Lyon dans le cadre de ses études. Elle alterne entre l'Insa, sur le campus de La Doua, et la Société d'Escrime de Lyon, non loin de la Part-Dieu. Grâce à un parcours aménagé proposé par son école, la sportive termine sa troisième année de classe préparatoire intégrée avec trois demi-journées libres par semaine - un cursus qui dure habituellement deux ans. Un va-et-vient impérieux entre armes d'estoc et travaux dirigés, puisque l'escrime n'est pas un sport professionnalisant. "On ne peut pas en vivre ! Je dois avoir un travail à côté de toute façon." La jeune fille se lance à présent dans un cursus de trois ans en génie mécanique.
Une fleurettiste qui enchaîne les compétitions sans jamais regarder derrière elle
"Début avril, j'ai fait les championnats du monde au Caire. Les résultats ne sont pas forcément là, mais c'était une superbe expérience. En individuel, je suis arrivée 26e, et en équipe 7e", explique-t-elle. Sans jamais baisser les bras, l'escrimeuse a poursuivi la saison, et a décroché le titre de championne de France en individuel et en équipe. Ce n'est pas la première fois, puisqu'elle a déjà remporté ce trophée en 2015, dans la catégorie minime.
Sereine et organisée dans ses propos, Joséphine Fourniguet alloue cette victoire à la rigueur de son entraînement. "J'ai préparé comme tous les ans, même si c'était un peu spécial puisque c'était le seul objectif qu'on avait, et qu'on ne savait pas s'il allait être maintenu. Toute mon expérience m'a permis d'aborder sereinement la compétition". Une fois son cap défini, la sportive semble se donner les moyens d'y parvenir, peu importe la quantité de travail à fournir.
"J’ai eu des saisons un peu plus compliquées, mais pour le moment j’ai toujours réussi à relever la tête"
La crise sanitaire a pourtant bouleversé, comme pour beaucoup d'athlètes, l'ensemble de son programme. "Pendant le premier confinement, on faisait des entraînements en visioconférence, ce qui permettait quand même de garder le contact et de bouger un peu". Après un mois de novembre 2020 sans entraînement au club, Joséphine Fourniguet a pu retrouver un rythme ordinaire : son statut de championne de haut niveau, sur les listes ministérielles, l'autorisant à pratiquer.
"J’ai eu des saisons un peu plus compliquées, où les résultats sont moins là alors que le travail reste le même. C’est plus difficile, mais pour le moment j’ai toujours réussi à relever la tête !" Pas de doutes sur la suite de son parcours professionnel, la championne n'est pas prête d'arrêter l'escrime. L'année prochaine, elle change de catégorie, et la barre est d'autant plus haute: chez les seniors, les sportives ont entre 20 et 40 ans, et sont donc beaucoup plus nombreuses et rompues à la pratique. Ce sont elles qui s'affrontent pour les médailles des Jeux olympiques, auxquels Joséphine Fourniguet a espoir de participer un jour. "C'est très rare d'y aller à 20 ans, puisque les filles qui sont cette année à Tokyo seront dans la même catégorie que moi avec beaucoup plus d'expérience. À voir comment cela va se passer les premières années, c’est ça qui est beau dans le sport !"
La fièvre du sport
C'est par hasard que Joséphine Fourniguet a découvert l'escrime, en assistant aux cours de son grand frère, qui lui-même pratique. "Le soir avec ma mère, on venait le chercher. À force de regarder, j'ai voulu essayer. J'ai fait un essai, je me suis inscrite, et depuis je n'ai pas arrêté !" Cela fait maintenant quatorze ans que la sportive suit un entraînement assidu, tout naturellement. De fil en aiguille, les compétitions s'enchaînent, et ce qui était un loisir s'est transformé en une part importante de son emploi du temps.
Cette régularité, elle la doit à ses parents, qui l'ont accompagnée tous les jours à Belfort, puis à travers toute la France pour qu'elle se mesure aux escrimeurs de son âge. "Ma mère me suivait beaucoup dans les compétitions, faisait tous les trajets sans hésiter. On est déjà allées à Budapest en voiture, 10 heures de route !" L'escrime est également un sport qui représente un coût financier important, puisque les rencontres ne sont pas subventionnées par le club, à l'exception des championnats mondiaux. " Sans un soutien aussi important, je n’aurais pas pu aller aussi haut, et accomplir tous les résultats que j’ai réussi à avoir !" C'est d'ailleurs chez sa famille qu'elle retourne le week-end, entre deux évènements sportifs.
"On sait que même si les niveaux sont différents le fait de supporter les autres ça donne des ailes, et la victoire est encore plus belle !"
Ce support sans faille, Joséphine Fourniguet le retrouve également dans le cadre sportif. C'est avec les autres escrimeuses de son équipe qu'elle a remporté la médaille d'or aux championnats de France, le 11 juillet dernier. "C’est vraiment différent en équipe ou seule : en individuel on le fait vraiment pour soi. Quand je gagne, c’est le fruit de mes efforts! Tandis qu'en équipe il y a deux semaines, on était très soudées". Elles sont quatre à avoir décroché ce titre, et l'une de ses coéquipières suit le même programme académique et sportif que la jeune fille. "On sait que même si les niveaux sont différents le fait de supporter les autres ça donne des ailes, et la victoire est encore plus belle !"
Jongler entre les cours, le travail, et l'escrime
Le cursus sportif de haut niveau, proposé par l'Insa, permet aux étudiants de manquer occasionnellement les cours, et de les rattraper par la suite. Ce ne sera toutefois plus le cas l'année prochaine, puisque Joséphine entame un diplôme en alternance. Entre les semaines de cours et les journées de travail, elle ne compte pas pour autant réduire sa dizaine d'heures d'entraînements hebdomadaires. Dès le lycée, elle a pris goût à des horaires très chargés. "Généralement, je n’ai pas trop le temps de faire autre chose. Je suis une assez grosse dormeuse ! Dès que je peux dormir un petit peu, même une sieste de 20 min, je le fais". Au programme : cours, entraînement, et sommeil.
En perpétuelle course contre la montre, Joséphine tente tout de même de conserver des activités sociales comme une étudiante normale. Elle doit toutefois renoncer à certaines occupations, comme la vie associative, pourtant florissante dans les grandes écoles. "Il y a des associations à l’Insa qui me plairaient bien, mais je n’ai pas le temps ! Je ne veux pas me lancer dans quelque chose alors que je n’aurais pas le temps de m'y consacrer pleinement." Quand elle se trouve un moment pour ses amis, il ne s'agit pas de parler du sport. Avec les autres étudiants en parcours aménagé, ils évitent le plus possible cette conversation. "En dehors de l’école, on essaye de se voir et d’oublier nos sports respectifs pour faire le vide."
C'est à la Société d'Escrime de Lyon que la sportive reviendra en septembre, une idée qu'elle apprécie. "C'est une ville qui me plaît: il y a beaucoup d’espaces verts libres, pour se déplacer c’est pratique… Je me sens bien ici !" Avant cela, pas de pratique pour un été qui se veut reposant - en tout cas pas d'escrime. "On est un sport asymétrique donc ça fait du bien de faire autre chose : de la course à pied, du VTT, de la natation, et avec le programme du gainage et de la préparation physique."
@Jeanne Le Bihan, merci de rectifier dans l'avant dernier paragraphe, vous indiquez école de commerce alors que l'INSA est une école d'ingénieurs.
Signé : un ingénieur INSA