Renaud Payre © Antoine Merlet
Article payant

Logement : comment construire sans densifier dans la Métropole de Lyon ? Les réponses de Renaud Payre

Renaud Payre, vice-président de la Métropole de Lyon en charge du logement, précise les objectifs de cette dernière, jugés incohérents par de nombreux professionnels de l’immobilier : construire sans densifier.

Lyon Capitale : La Métropole planifie la construction de 8 500 nouveaux logements par an durant le mandat sans artificialiser les sols. Cet engagement est-il tenable ?

Renaud Payre : Cette équation est impossible et elle ne correspond pas à nos engagements de campagne. Nous allons densifier, mais dans des secteurs stratégiques comme les gares ou le long des lignes de transports en commun. Nous avons lancé beaucoup de zones d’aménagement concerté en plus de celles déjà engagées : le vallon des hôpitaux à Saint-Genis, Grandclément à Villeurbanne, l’Arsenal à Saint-Fons, la Saulaie à Oullins et des opérations à Lyon intramuros dans le 7e ou le 8e. Nous voulons construire, arrêtez d’en douter, mais nous ne voulons pas densifier toute la métropole.

Votre politique ne va-t-elle pas favoriser un étalement urbain et son corollaire de déplacements en voiture ?

Bruno Bernard a relancé le pôle métropolitain et notre relation avec Saint-Étienne. Nous voulons une métropole plus polycentrique, mais nous ne pouvons pas le faire sans le RER à la lyonnaise. Nous attendons que la Région montre sa volonté de participer à ce projet. L’étalement urbain a commencé bien avant notre arrivée au pouvoir. Il y a par exemple beaucoup de constructions à Tarare avec des gens qui travaillent dans la métropole et ont besoin de transports en commun. J’ai aussi du mal avec les maires qui refusent de densifier leur commune et ne signent pas les permis de construire. Une partie des maires voudrait construire, mais s’y oppose, car ils n’ont pas les moyens de financer les équipements pour accueillir les nouveaux habitants. Ces problèmes sont légitimes et il faut trouver des incitations. Elles peuvent être fiscales avec des exonérations. Sur des opérations d’envergure, nous pouvons aussi faire payer aux promoteurs des équipements publics. Je tente de convaincre ces derniers pour faire sauter ce verrou. Après il y a aussi des maires dogmatiques qui refusent de signer les permis de construire, car ils ne veulent pas de logements sociaux.

“Le coût du foncier est trop élevé. Gérard Collomb n’a pas anticipé que le prix des terrains allait freiner le développement de la métropole”


Lors des travaux de la commission Rebsamen, qui planche sur la relance de la construction de logements, vous avez proposé de prendre la main sur la signature des permis de construire. N’est-ce pas un abus de pouvoir ?

J’ai fait cette proposition pour les communes carencées et récalcitrantes. Des promoteurs viennent me voir en disant dans telle commune, un maire nous prévient : ‘Vous n’aurez jamais de permis de construire.’ Je savais que ma proposition avait peu de chances d’aboutir, mais je voulais alerter l’État sur le fait que dans la métropole nous avons des communes récalcitrantes. Pour les projets qui bloquent, nous allons demander l’intervention de l’État, qui ne joue pas vraiment son rôle. Aujourd’hui, une très petite minorité de maires fait un usage politique de la densification et cela ne correspond pas aux étiquettes politiques de la gauche et des Verts.

Comment qualifieriez-vous la situation actuelle du logement dans la métropole ?

Je ne vais pas mentir, la situation est très dégradée et cela a commencé dès 2017. Tout est réuni pour que l’on reste bloqué tant que l’on ne s’autorégule pas. Le coût du foncier est trop élevé. Gérard Collomb n’a pas anticipé que le prix des terrains allait freiner le développement de la métropole. Il y voyait le signe de son attractivité. Il a considéré que Lyon était une ville-monde comme Londres ou Paris. Il y a eu un moment d’emballement. Ce qui nous différenciera de Paris, c’est qu’il y a un plafond du prix. À cause du coût du foncier, vous avez des biens qui sortent à 7 000 euros le mètre carré et nous voyons qu’ils ont de plus en plus de mal à se vendre. C’est le signe évident d’un ralentissement alors que les taux d’intérêt sont très bas. Si nous n’agissons pas sur le prix du logement libre, nous allons créer une inadéquation entre l’offre et la demande. Ce n’est pas la raréfaction qui fait monter les prix, mais la gourmandise des promoteurs. La Métropole veut aider les professionnels de l’immobilier à construire, mais il faut s’accorder sur un prix de sortie pour débloquer la machine. Par ailleurs, nous ne voulons pas d’une métropole de classes moyennes supérieures. Des entreprises nous expliquent qu’elles ont du mal à loger leurs salariés.

En mettant l’accent sur la construction de logements sociaux, ne craignez-vous pas de faire monter les prix du logement libre, l’un finançant l’autre, ce qui serait contraire à vos engagements pour des biens plus abordables ?

Sur les 8 500 logements que nous allons construire, il n’y aura pas 6 000 logements sociaux. Nous allons augmenter la part de logements sociaux dans l’existant en travaillant contre le logement indigne ou par la préemption, ce qui représentera autour de 1 500 logements par an. Vous n’avez pas tort quand vous dites que pour équilibrer leurs opérations les promoteurs vont augmenter les prix des biens du secteur libre. C’est pour cette raison que nous travaillons avec eux pour trouver un bon prix de sortie. Nous aurons aussi 1 000 logements en BRS par an qui vont étendre la possibilité d’accéder à la propriété.

Il vous reste 32 % de l'article à lire.
Article réservé à nos abonnés.

Connectez vous si vous êtes abonné
OU
Abonnez-vous

réseaux sociaux
X Facebook youtube Linkedin Instagram Tiktok
d'heure en heure
d'heure en heure
Faire défiler vers le haut