À trois jours du premier tour de l'élection présidentielle 2022, les sondages sur les intentions de vote des électeurs se succèdent. Pour choisir quel bulletin de vote glisser dans l'urne, les électeurs lyonnais vont-ils tenir compte des enquêtes d'opinion pour voter "utile" ? On leur a posé la question.
C'est un jeu de dupes, auquel les candidats à l'élection présidentielle participent tous. Ceux qui sont à la traîne affirment que les sondages ne reflètent pas la réalité, que des surprises sont probables dans les urnes. À l'inverse, ceux qui font la course en tête appellent les électeurs à voter "utile" en leur faveur au détriment d'un candidat moins bien classé dans les enquêtes d'opinion.
Et les électeurs, à quel point sont-ils sensibles aux résultats des sondages à quelques jours du premier tour de l'élection présidentielle 2022 qui se tient ce dimanche 10 avril ? On a demandé à des habitants du Grand Lyon si leur intention de vote avait évolué sous l'influence des scores des candidats dans les dernières enquêtes d'opinion. Jeudi 7 avril, le sondage Ifop-Fiducial (actionnaire de Lyon Capitale), donnait le président sortant Emmanuel Macron en tête avec 26,5% des intentions de vote, devant Marine Le Pen (Rassemblement national) à 24%, Jean-Luc Mélenchon (La France Insoumise) à 17,5%, puis Valérie Pécresse (Les Républicains) à 9% et Eric Zemmour (Reconquête) à 8,5%.
Sur la place de la Comédie devant l'Hôtel de ville jeudi 7 avril en milieu de matinée, des travailleurs et des retraités s'échappent de la bouche de métro pour rejoindre le centre de Lyon. Nathalie, la soixantaine et habitante du bas des pentes de la Croix-Rousse, annonce qu'elle votera "utile" au premier tour dimanche. "Je vais voter dimanche. Je sais toujours pour qui je vais voter au premier tour, mais là je m'interroge. Malheureusement, je pense que les sondages peuvent m'influencer moi aussi. D'habitude pour le premier tour, je fais un vote selon mes convictions politiques et là il est possible que je fasse un vote utile pour éviter l'extrême-droite", confie t-elle.
"Sans les chercher, les sondages vous tombent devant les yeux"
Alors qu'il traverse la place d'un pas pressé, Ludovic, un cinquantenaire, prend le temps de s'arrêter pour donner son avis. "Je voterai dimanche, mais je ne pense pas que les sondages m'influencent, sauf peut-être inconsciemment. Je regarde d'un œil les sondages". Eric, qui l'accompagne, admet que même en voulant les éviter, les sondages sont partout. "Sans les chercher, ils vous tombent devant les yeux". Cependant, il ne pense pas qu'il y ait trop de sondages. "Cela fait partie du jeu politique et médiatique. Cela donne une tendance de ce qui va se passer".
Lire aussi : Les Gones et la présidentielle : à Vaulx-en-Velin, une jeunesse résignée et loin, très loin, du vote (reportage)
Les poussées de Jean-Luc Mélenchon ou de Marine Le Pen dans les sondages ces derniers jours vont-elles pousser des électeurs de gauche à voter "utile" pour le leader de la France insoumise ? Et du côté de l'extrême-droite des électeurs tentés par un Eric Zemmour, en baisse dans les dernières enquêtes d'opinion, vont-ils se rabattre sur Marine Le Pen mieux placée pour accéder au second tour ?
"Oui mon vote sera influencé"
Habitante de la commune de Jonage dans l'est lyonnais et éducatrice spécialisée, Justine se définit comme une électrice de gauche. En vue du premier tour du scrutin présidentiel, elle estime que les sondages l'influencent fortement. "Oui mon vote sera influencé. Je veux un vote qui rassemble mes idées et valeurs mais qui puisse aussi avoir un "poids". Clairement, je pense que l'absence de rassemblement des partis de gauche me fait voter pour celui de gauche qui rassemble le plus... donc les sondages pèsent forcément sur mon choix", explique t-elle.
C'est tout l'inverse pour Pierre. Ce directeur administratif et financier installé dans le 6e arrondissement de Lyon dit être sûr de son vote depuis l'entrée en lice de "son" candidat dans la campagne. "Mon vote ne sera pas influencé par les sondages, car je soutiens mon candidat à la présidentielle depuis le jour de l'annonce de sa candidature. Les sondages qu'ils soient bons ou mauvais ne m'influencent pas, bien qu'ils aient un impact psychologique certain". Si les sondages ne le feront pas bouger de ligne, Pierre observe de près les trajectoires de chaque candidat. "Ils [les sondages] permettent de se positionner vis-à-vis des autres candidats, et surtout par rapport aux législatives après les élections présidentielles".
Enfin, il y a ces Lyonnais qui ne croient pas aux sondages. Ils ne sont pas forcément des électeurs de Jean Lassalle (Résistons!) ou de Anne Hidalgo (Parti Socialiste), deux candidats qui oscillent autour de 2% des intentions de vote et martèlent dans les médias que tout est encore possible. Non, ils sont juste méfiants envers la méthodologie des sondages et leurs fréquentes erreurs d'appréciation (même si les scores des candidats au premier tour sont le plus souvent dans la marge d'erreur des enquêtes).
Il y a aussi des électeurs qui ne croient pas du tout aux sondages
"Je me méfie énormément des sondages. Je pense que ce sont des outils d'argumentation pour les politiques et qu'ils ne sont pas du tout fiables et pertinents pour l'intérêt général. D'ailleurs, ils sont bien souvent financés par les politiques afin de se constituer une place forte dans un contexte électoral, ce qui fait la liaison entre les budgets de campagne inégaux des candidats. Je trouve dommage que certains journalistes ne prennent pas davantage de recul sur ces sondages quand ils sont évoqués", estime ainsi Boris, un trentenaire habitant le 8e arrondissement de Lyon.
Croisée sur le parvis de l'Hôtel de ville, Martine, partage cette méfiance. "Il y a trop de sondages et ils disent tous n'importe quoi. Je pense qu'on perd en crédibilité avec tant de sondages. Je ne crois pas aux scores annoncés". Rendez-vous dimanche pour savoir si les scores des candidats colleron aux dernières estimations des sondeurs.
Le seul vote utile c'est celui du candidat qui fera le maximum pour régler le plus gros problème certain de nous tomber dessus, la surchauffe du climat. Personne, ni aucun institut ne pourra jamais mesurer en qui on a le plus confiance pour appliquer son programme.
A chaque électeur d'évaluer cette confiance. Le seul vote utile est celui de sa conviction la plus profonde.