Image d'illustration générée par l'intelligence artificielle Dall-e, développée par la même société que Chat GPT
Image d’illustration générée par l’intelligence artificielle Dall-e, développée par la même société que Chat GPT

Chat GPT : À Lyon, réflexion sur la cohabitation avec l’intelligence artificielle

Chat GPT, une menace pour l’enseignement ? Pour les emplois ? Retour sur les réflexions menées à propos des intelligences artificielles par les acteurs universitaires et académiques de Lyon.

Chat GPT, ce nom défraie la chronique depuis quelques jours et fait trembler les plus grands moteurs de recherche. Intelligence artificielle hyper-puissante : menace pour les emplois, nouvel outil de triche dans le milieu scolaire ? À l’heure des révolutions et du progrès technologique, combattre l’outil semble, pour certains, être une position rétrograde, voire réactionnaire.

Chat GPT, c’est une intelligence artificielle spécialisée dans la conversation (chat en anglais). Cette IA est apparue fin novembre 2022, aujourd’hui encore, la version disponible au grand public est au stade de prototype. Cette technologie est développée par la société américaine Open IA. Lyon Capitale s’est prêté au jeu pour vous, nous avons demandé à l’IA d’écrire une carte de vœux.

Édito de Lyon Capitale : Le jour où ChatGPT a rédigé cette chronique

En termes informatiques, cette IA est un agent conversationnel. Il apprend en permanence, se corrige, interagit… Le programme a reçu deux méthodes d’apprentissage. La première : “l’apprentissage supervisé”, un formateur lui enseigne la manière dont il doit interagir avec un utilisateur. Deuxièmement : l’IA reçoit un “apprentissage par renforcement”, elle “dialogue” avec elle-même. Chat GPT pioche tout son savoir dans une base de données. Là, une de ses limites apparaît, la base en question ne comprend que des éléments antérieurs à 2021. L’IA sera donc incapable de traiter un fait d’actualité par exemple.

Nous n’avons pas encore de cas avéré d’utilisation de Chat GPT dans le secondaire, alors on n'en parle pas aux élèves, dévoile Corine Benucci, inspectrice d’académie du rectorat de Lyon.

Un outil de triche dans le milieu scolaire ?

Coup de tonnerre à Lyon, le 10 janvier, le Progrès dévoile que plus de 50% des élèves d’une classe avaient utilisé Chat GPT pour un devoir. L’enseignant en handicapologie, démuni, avait tout de même donné la note de 11,75 sur 20 aux étudiants en question. Alain Gay est coordinateur du groupe de réflexion sur le plagiat à l'Université de Lyon. Il explique : “on ne peut pas considérer que l’utilisation de Chat GPT soit du plagiat, cela pourrait plutôt s’apparenter à du ghostwriting.

 "On ne peut pas considérer que l’utilisation de Chat GPT soit du plagiat", Alain Gay

Même constat dans l’Éducation Nationale, Corine Benucci, doyenne, inspectrice d’académie du rectorat de Lyon précise “c’est un peu comme lorsque les parents aident trop leurs enfants à faire leur travail.” Si l’élève a abusé de l’utilisation de l’intelligence artificielle, il sera noté comme s’il avait triché grâce à Internet ou si son devoir avait été fait par quelqu’un d’autre, explique-t-elle.

Il est certain que c’est un outil surpuissant pour tricher. Chat GPT produit des textes originaux et tout à fait satisfaisants si on l’utilise correctement”, explique Alain Gay. Le spécialiste de la triche ajoute que l’IA en question est une facilité de plus, une tentation pour les apprenants.

Il est certain que c’est un outil surpuissant pour tricher."

Faire face à l'intelligence artificielle en milieu scolaire

Dans les milieux académiques, on s’interroge. Comment lutter efficacement contre son usage ? Comment le détecter ? Mais une autre question se pose… Faut-il nécessairement diaboliser cette intelligence artificielle ? Pour mettre en place des outils capables de repérer l’utilisation de Chat GPT il faudra encore quelques années. “Ce n’est pas pour tout de suite”, confirme Alain Gay en ajoutant, “des logiciels sont en cours de développement depuis quelque temps, mais ce n’est pas si simple.

"Les outils de détection, ce n'est pas pour tout de suite."

En posant la question à Chat GPT lui-même, il donne plusieurs solutions à comment lutter contre son utilisation dans un contexte d’évaluation :

  • Encourager les élèves à développer leur capacité à résoudre des problèmes de manière indépendante plutôt que de recourir à la triche.” Sans doute… Un peu candide comme réponse.
  • Sensibiliser les élèves aux conséquences de la triche et à l'importance de l'éthique académique.” Réponse convenue, qui ne résout pas vraiment le problème.
  • Favoriser des méthodes d'évaluation alternatives telles que les projets de groupe ou les présentations orales.” Retour au présentiel, aux devoirs sur table et aux oraux ! Chat GPT serait-il rétrograde ?

Cette dernière réponse met d’accord les universitaires interrogés par Lyon Capitale. Alain Gay ajoute : “il faut renforcer l’apprentissage de la citation et les devoirs en présentiel. L’oral est un excellent outil pédagogique. De mon côté, je demande à mes étudiants d’utiliser des expériences personnelles pour illustrer leurs propos. Ça, Chat GPT en est incapable.

Une réflexion sur l’éthique des nouvelles technologies

Comment vivre avec les nouvelles technologies ? Comment s’en servir correctement ? Comment créer un outil éthique ? Voilà les questions que se pose Mathieu Guillermin au quotidien. Cet universitaire est docteur en philosophie des sciences mais aussi en physique. L’apparition de Chat GPT l’a beaucoup intrigué.

“La vraie question que pose l’apparition de cette IA ce n’est pas tellement : “peut-on tricher avec elle ?” C'est plutôt de se demander quelle est la place de l’enseignant et ce que l’étudiant cherche à faire à l’université”, déclare le docteur en philosophie. Il ajoute “notre but ce n’est pas de devenir des robots, ça, GPT le fait bien mieux que nous. L’université cherche à faire ressortir quelque chose des apprenants, qu’ils s’élèvent.

"Quelles sont les places des enseignants et des étudiants à l'université", se demande Mathieu Guillermin, docteur en philosophie, et maître de conférences à l'UCLy

Il est difficile de demander aux développeurs de concevoir des outils éthiques. “C’est comme demander à quelqu’un de choisir, entre deux personnes, qui écraser, lorsqu’on conduit. Chacun a potentiellement sa réponse”, détaille Mathieu Guillermin. Le docteur en philosophie participe au projet européen : “Un nouvel humanisme à l’heure des neurosciences et de l’intelligence artificielle.” Un projet qui a pour but de lancer des débats publics sur ces questions et déterminer un plan détaillé des problématiques posées.

Entre enthousiasme et prudence

L’arrivée de cette intelligence artificielle fait peur. En revanche, beaucoup sont très enthousiastes à la vue de cet outil. Les universitaires et représentants académiques s’accordent sur un point : Chat GPT est une vraie révolution technologique. Comme avec l’apparition d’Internet et plus tard des encyclopédies en ligne comme Wikipédia, le tout n’est pas de naviguer contre le vent mais plutôt d’apprendre à vivre avec.

Lire aussi : "ChatGPT, le robot conversationnel porte d'entrée sur le savoir"

Pour l’instant, au niveau universitaire on est prudent. On cherche à trouver comment se servir au mieux de cet outil. À l’académie de Lyon on temporise “nous n’avons pas encore de cas avéré d’utilisation de Chat GPT, alors on ne leur en parle pas.” L’intelligence artificielle n’en est qu’à ses balbutiements, au stade de prototype. Déjà, elle interroge dans les locaux de nos moteurs de recherche favoris. Peut-être, un jour, les remplacera-t-elle…

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