Place Mazagran, tôt dimanche 5 mars.

Lyon 7e : place Mazagran, la détresse des habitants sur fond d'inaction politique

Face aux nuisances qui sévissent, les riverains de la place Mazagran se trouvent dans l'impasse. Ils déplorent une insécurité constante, et le manque d'actions de la municipalité.

Trafic matin et soir, nuisances sonores, incivilités et agressions en tout genre sont devenus le quotidien de nombreux riverains de la place Mazagran, dans le 7e arrondissement de Lyon. Ce matin, sous un soleil glacial, Baptiste, un habitant dont l'appartement donne entièrement sur la place, est venu témoigner du calvaire qu'il endure depuis plusieurs années. Le rendez-vous est donné tôt, pour "éviter toute confrontation avec les dealers". À part pour cette entrevue matinale, le riverain, de sortie plusieurs fois par jour pour promener son chien, ne met plus les pieds sur la place. "Je me suis déjà fait agresser trois fois, je préfère éviter". Locataire d'un logement social depuis 2016, il regrette l'ambiance qui régnait sur les lieux à son arrivée. "On aimerait rendre à la place sa mixité et sa pluralité".

"Ca doit faire un an que le trafic s'est intensifié"

Comme Baptiste, d'autres habitants de la place et des rues adjacentes se disent à bout, stressés, inquiets pour leur sécurité. En 2022, ils sont plus d'une dizaine à se réunir et montent le collectif Vivre Mazagran, fruit de discussions menées depuis des mois. "J'habite rue Capitaine Robert Cluzan depuis 10 ans bientôt et j'ai eu le temps de voir le lieu évoluer, confie une membre de Vivre Mazagran, qui tient à garder l'anonymat. Au début, l'ambiance de cette place était très familiale. À partir de 2016, elle a commencé à être très bruyante à cause de fêtards et de touristes. Mais c'est après les confinements qu'on a vu venir des dealers, avec des enceintes connectées. Ils se sont mis à faire du trafic au vu et su de tout le monde. Ils ont des guetteurs qui sont implantés dans toutes les rues. lls arrivent généralement en groupe vers midi et se défoncent. Ils hurlent et sont même agressifs entre eux. Ca doit faire un an que le trafic s'est intensifié. J'appelle la police régulièrement, mais ça n'arrête rien, et ils sont très nombreux". Le groupe Vivre Mazagran déplore aujourd'hui l'inaction de la municipalité, et plaide pour un tout autre aménagement de la place.

"Si rien n'est fait, notre été sera cauchemardesque"

Jeudi 2 mars, la mairie du 7e arrondissement a annoncé de nouveaux réaménagements, dont la suppression des murets et de la végétation basse, ainsi que la suppression de l'allée séparant l'aire de jeux du petit jardin partagé. En réaction, parents et membres d'un autre collectif, baptisé Habitons Mazagran, ont organisé un flash mob de contestation samedi 4 mars. "Ils sont venus hier avec leurs enfants pour manifester leur volonté de conserver les jeux oranges, mais en réalité, ils ne viennent plus y jouer. Ce sont des gens du quartier, mais ils ne vivent pas sur la place, ils ne voient pas ce qu'on endure. Depuis un an, c'est devenu un enfer", indique une autre membre de Vivre Mazagran, installée sur la place depuis 30 ans, et fraîchement retraitée. "Je suis allée les voir hier durant leur manifestation, mais en réalité, on ne les voit jamais".

Baptiste, lui, salue vaguement les initiatives de la mairie du 7e mais estime que ça ne sera pas suffisant. "Ces aménagements promis ne se feront pas avant octobre. Si aucune action n'est mise en place dans les prochains mois, notre été sera cauchemardesque". Ce que confirme une autre témoin : "Dès qu'il fait beau, il est impossible de dormir les fenêtres ouvertes".

Pour une "place fermée, avec des grilles hautes"

Quelles autres solutions envisager ? "Une troisième caméra de surveillance, mieux placée, estime l'habitante de l'immeuble de la rue Robert Cluzan. En l'état le champ d'action de la police est très limité". À ce jour, deux caméras de surveillance sont installées, mais "pas bien placées", indique Baptiste. Sur la question des nuisances sonores, un arrêté municipal "anti-enceinte" a été mis en place en octobre dernier.

"Il faudrait pouvoir fermer la place et installer des grilles hautes, avec des caméras de surveillance bien placées, pour être au moins tranquilles la nuit, expose la riveraine à la retraite. Maintenant je ne traverse même plus la place. Quand je sors de chez moi, je me dépêche de changer de rue".

Son voisin, la trentaine, a emménagé rue Montesquieu il y a un an et demi. "À chaque fois que je passe sur la place, on me demande ce que je veux comme drogue. Quant à ma compagne, elle se sent encore plus en insécurité que moi. En l'état, ce que propose la municipalité est clairement insuffisant". Une autre témoin, 36 ans, indique travailler en horaires décalés. Elle dit craindre des agressions lorsqu'elle rentre seule le soir. "Il m'est arrivé de me faire suivre". Une solution envisagée à court terme ? Partir. "Cet été, on l'espère. On fait tout pour".

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