Jesper Just, Interfears

Expo au MacLyon : le corps à l’épreuve

Le macLYON inaugure une série d’expositions prévues tout au long de l’année autour du corps. Jouant sur sa réalité, sa perception et sa transformation, les trois premières sont passionnantes !

Incarnations, la première exposition, présentée au premier étage, est pour nous la plus intéressante. Constituée d’une sélection d’œuvres de la collection du musée datant des années 1960 à nos jours, elle nous démontre comment des artistes se sont emparés de la question du corps à travers une multitude de pratiques, expérimentant la fonction de l’art en elle-même.

Vue de l'expo Incarnations

Dans une scénographie fluide où les œuvres se répondent, on découvre notamment les sculptures de visages souffrants que Jean Rosset réalise à la tronçonneuse avec le bois d’arbres tombés à la suite de tempêtes, Nam June Paik, le père de l’art vidéo et ses incroyables compositions visuelles inspirées de gestes du quotidien (plisser des yeux, fumer ou manger…), Vito Acconci qui, à travers des performances filmées, triture son corps comme matière d’œuvre d’art tandis que Dennis Oppenheim le met à l’épreuve de la douleur en amortissant des chutes de pierres sur son ventre.

L’œuvre impressionnante du Lyonnais Henri Ughetto, composée d’objets organiques en plastique recouverts de gouttes de sang, nous propulse directement dans sa peur de la mort tandis que Philippe Droguet fascine avec Battes, une sculpture créée avec des chaussettes colorées à l’intérieur desquelles il a fait couler du plâtre, nous donnant à voir en même temps qu’un jeu de quilles, la vision d’une armée de membres amputés. Le triptyque du peintre Marc Desgrandchamps est superbe, illustrant la plage avec des personnages inachevés ou en train de se liquéfier, le souvenir et la mémoire s’effaçant entre réel et irréel…

Au deuxième étage, La peau est une fine enveloppe nous embarque dans un univers visuel et immersif créé par le duo d’artistes : Nathalie Djurberg et Hans Berg. Ici, on nous montre ce que l’on ne veut pas voir : la part sombre de l’humanité, ses vices, sa violence, la luxure, nos pulsions, notre cruauté à travers des installations et des vidéos que Djurberg réalise à partir de personnages animés en stop motion. Conçus avec de l’argile qu’elle modèle pour les rendre difformes, horribles, trash mais aussi drôles, ils sont portés par la musique dramatique de Berg qui en exacerbe notre perception, jusqu’à les rendre insupportables à regarder.

Projeté au troisième étage sur un écran gigantesque, le film INTERFEARS que Jesper Just a réalisé pour le mac met en scène la topographie émotionnelle de l’acteur Matt Dillon, capturée par une IRM tandis qu’il parle, réagissant à la troisième symphonie de Mahler. Jesper joue sur l’ambiguïté des émotions : sont-elles exprimées par l’acteur ou l’homme ? Coincé dans ce lieu exigu et oppressant, il finit lessivé, dans une fatigue qui semble malgré tout non feinte. Troublant, ce film nous propose un voyage spatial à l’intérieur du corps nous donnant aussi la sensation que les cellules qui le constituent ne sont que pures émotions !

Incarnations - La peau est une fine enveloppe – INTERFEARS – Jusqu’au 9 juillet au macLYON

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