Selon la ligue pour la protection des oiseaux (LPO), le Rhône est un département où la biodiversité est la plus mauvaise et où le nombre d'oiseaux est deux fois moins élevé que dans le reste de la région Auvergne-Rhône-Alpes.
Alors que la population des oiseaux a décliné de 25% en Europe depuis 40 ans, d'après un rapport d'étude publié par le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) le 12 mai dernier, la situation dans le département du Rhône est alarmante. "La disparition des espèces volatiles va entraîner l'effondrement de la biodiversité", met en garde Cyrille Frey, chargé de mission expertise et coordinateur pour le département du Rhône de la ligue pour la protection des oiseaux (LPO). "Concrètement, dans le Rhône, il y a environ deux à trois fois moins de densité d'oiseaux que dans les milieux montagneux et campagnards de la région Auvergne-Rhône-Alpes", poursuit ce spécialiste de la faune volante.
"Dans le Rhône, le merle noir, connu pour être une espèce abondante, a perdu environ 40% de ses effectifs en une quinzaine d’années"
Cyrille Frey, chargé de mission expertise et coordinateur pour le département du Rhône de LPO
Une situation alarmante que la LPO tente d'enrayer en protégeant de manière durable les espèces menacées. "Beaucoup d’espèces ont totalement disparu, notamment les insectivores, comme le moineau friquet ou les pies-grièches grises et pies-grièches à tête rousse dans le Rhône", alerte Cyrille Frey. Même constat du côté de la chouette effraie, qui niche habituellement dans les églises du bassin lyonnais, et de la mésange noire, qui ont quasiment disparu. "On observe ces déclins sur toutes les espèces campagnardes qui étaient présentes dans le Rhône", poursuit le représentant de la LPO.
Lire aussi : En Auvergne-Rhône-Alpes, l'ONF s'inquiète de la disparition d'essences d'arbres
Urbanisme et agriculture intensive
D'après la Ligue de protection des oiseaux, c'est bien l'activité humaine qui conduit à la disparition des espèces volatiles. Le développement de l'agriculture intensive provoque petit à petit la disparition des oiseaux dans le Rhône, ce qui abouti plus largement à une dégradation de la biodiversité. Alors que dans les Monts lyonnais les prairies sont désormais labourées, fauchées et traitées à l'aide de pesticides, "il n'y a plus de possibilités pour les oiseaux d'y nicher et on constate de moins en moins d'élevage classique", s'inquiète Cyrille Frey.
Aux dégâts causés par l'agriculture intensive sur la biodiversité, s'ajouterait également l'expansion de l'urbanisme en ville. "Si le Rhône est le pire département, c'est bien parce qu'on est le plus urbanisé de la région", indique la LPO. Dans les milieux urbains, à l'image Lyon, les infrastructures contribuent ainsi à la hausse de la mortalité chez les oiseaux.
"Le jour où il n'y aura plus d'insectes pollinisateurs, il n'y aura plus de fruits, plus de production de viande et on ne pourra plus survivre"
Cyrille Frey, chargé de mission expertise et coordinateur pour le département du Rhône de LPO
Face à la menace du réchauffement climatique, la ligue pour la protection des oiseaux pointe du doigt les décideurs et les pouvoirs publics pour leur demander d'agir au plus vite. Quelques jours après les propos polémiques du président de la République qui appelait le 11 mai à une "pause" dans les règles environnementales européennes, comme en réponse le directeur général de la LPO avait demandé "une pause dans l’inaction du gouvernement" dans la lutte contre les pesticides. "On est face à une situation de plus en plus critique, qui se dégrade année après année. On doit réclamer plus d'espaces verts au niveau des villes et laisser de la place à la biodiversité", appuie Cyrille Frey.
La Ville et la Métropole de Lyon en pole
Conscientes de l'évolution alarmante du réchauffement climatique, la Ville et la Métropole de Lyon travaillent main dans la main pour préserver la biodiversité en ville. Plusieurs initiatives ont d'ores et déjà été lancées, à l'instar de la politique de plantation d'arbres portée par la Métropole de Lyon. Depuis 2020, les écologistes ont le projet ambitieux de planter 300 000 arbres d'ici 2026. Défini comme un plan nature "unique en France" par Pierre Athanaze, vice-président de la Métropole de Lyon délégué à l'environnement, le grand projet de plantation avance bien. En trois ans, 120 000 arbres ont été plantés dans le périmètre de la métropole de Lyon. Pour mémoire, ces nombreuses plantations permettent notamment de remplacer les arbres tués par les sécheresses de 2018, 2019, 2020, 2022, de renouveler le patrimoine actuel vieillissant et de l'étoffer.
"L’objectif [...] est d’apporter un vrai changement, en plantant pour embellir certes, mais aussi pour la biodiversité, pour apporter de la fraîcheur"
Pierre Athanaze, vice-président de la Métropole de Lyon
Lire aussi :
- La Métropole de Lyon tient-elle sa promesse de planter 300 000 arbres d’ici 2026 ?
- La Métropole de Lyon veut créer des corridors écologiques pour régénérer la biodiversité
En lien avec la Métropole, la Ville de Lyon poursuit également, à son échelle, les actions de végétalisation de manière à atténuer les effets du changement climatique. En 2023, les écologistes assurent avoir renaturé près de 19 000 m2 de sols et planté plus de 5 000 arbres. "Depuis trois ans on enlève du bitume et on plante des arbres de haute-tige et au ras du sol pour amener de la fraîcheur et adapter la ville", expliquait il y quelques semaines Grégory Doucet, maire de Lyon.
Lire aussi :
- À mi-mandat, les verts revendiquent la plantation de 5 000 arbres à Lyon
- "Nous avons mis fin à l’artificialisation des sols" à Lyon se félicite Grégory Doucet
- La Ville de Lyon inaugure un refuge de biodiversité aux cimetières de Guillotière
Vers une agriculture bio
En parallèle de la plantation d'arbres, les collectivités locales souhaitent également amplifier l'agriculture bio, de manière à réduire l'agriculture intensive et l'usage de pesticide. Grâce une stratégie agricole et alimentaire dotée d'une enveloppe de 10 millions d'euros, la Métropole de Lyon entend soutenir et valoriser la production de produits bio et locaux. Un choix indispensable aux yeux de la collectivité, qui alerte également sur le fait qu’entre "2007 et 2017, près de 900 hectares ont été urbanisés sur le territoire métropolitain". Une urbanisation à l'impact fort sur la biodiversité et notamment les volatiles dans le Rhône.
Lire aussi : Auvergne-Rhône-Alpes : 8,9% de la surface agricole exploitée en bio