L'intérieur du gymnase Bellecombe @Collectif Jamais Sans Toit
L’intérieur du gymnase Bellecombe

Aide au retour proposée aux occupants du gymnase Bellecombe :  “si je retourne dans mon pays, je meurs”

Occupé depuis le 22 juin dernier, le gymnase Bellecombe (6e arrondissement de Lyon) abrite familles et femmes seules, faute d’hébergement d’urgence. À l’approche de la rentrée, et alors que l’établissement doit être libéré, les occupants se sont vus proposer une “aide au retour”

Au gymnase Bellecombe, des enfants, certains en bas âge, jouent au basket-ball, regardent des vidéos et essaient, sous une chaleur étouffante, de tuer le temps. Les mères de famille demandent le calme lorsque les cris enfantins résonnent dans cet imposant bâtiment. 

Aux quatre coins de ce lieu réhabilité pour les accueillir, des lits de camp, des couvertures et surtout “des odeurs, des souris, des cafards et des moustiques”, énumère Katy*, maman de trois enfants. Sa peau est gonflée par de multiples piqûres d’insectes. “C’est très difficile ici. Il y a trop de bruit, on est collés les uns sur les autres”, lâche cette femme originaire de la République démocratique du Congo. Résignée, elle chasse ses insomnies à coup de Tramadol, un antidouleur puissant. Ses nuits restent encore "trop courtes".

Depuis le 22 juin, faute d'hébergement d’urgence, le gymnase Bellecombe est occupé par des familles et des femmes seules. La plupart ne possèdent pas de titre de séjour. En ce moment, douze familles et trois femmes vivent sous ce toit. Vendredi 4 août, une convocation à l’Office Français de l'Immigration et de l'Intégration (OFII) leur a été distribuée. Avec à la clé : une “aide au retour”. 

“Une vraie opération” 

Cette procédure consiste, de la part de l'État, à proposer un billet d’avion et une somme d'argent (au moins 1 850 euros, délivrés au moment du passage de la frontière) afin d’inciter un ressortissant étranger qui veut quitter la France à rentrer dans son pays d’origine. Sont concernées les personnes en situation irrégulière, celles dont la demande d'asile a été rejetée et les dublinés (migrant faisant l'objet d'une procédure de transfert ou "réadmission" vers un autre pays européen, là où ses empreintes ont été enregistrées pour la première fois).

L’aide au retour est l’un des domaines d’intervention le plus fréquent", expose Maître Pedro Andujar, avocat au barreau de Lyon. "Cette aide doit dépendre de la situation réelle du pays de destination et doit être un choix sincère de l’étranger. Ce n’est pas la même chose de retourner en Arménie qu’au Soudan."

Ima* est originaire du Congo. Elle vit en France depuis 2011, date à laquelle elle a obtenu le statut “d’étranger malade” à la suite d’un cancer du sein. “On  m’a demandé si je voulais retourner dans mon pays. Je suis en France depuis 12 ans, je suis Française. J’ai travaillé, j’ai cotisé et on me propose de partir”, s'agace-t-elle

Juliette Murtin, la porte-parole de l’association Jamais Sans Toit, constate ces derniers jours des convocations “massives” à l’OFII. “Il y a une vraie opération”.

“En danger” 

Pour la plupart de ces femmes, repartir dans leur pays d’origine, c’est emprunter un tunnel vers la mort. Marie* s’est elle aussi vue convoquée par l'OFII. Pour cette occupante du gymnase, un retour dans son pays d’origine est inimaginable. “Je ne peux pas retourner dans mon pays. Si je rentre, je vais mourir".

"Quel est l’intérêt de nous demander de repartir  dans notre pays alors qu’on est en danger là-bas ?”

Marie, occupante du gymnase

Interrogée, la préfecture du Rhône assure que “les situations des personnes se trouvant actuellement au gymnase Bellecombe sont examinées par les services de l’État (l'Office Français de l’Immigration et de l’Intégration ; et la Direction Départementale de l'Emploi, du Travail et des Solidarités). Il s'agit d'étudier des solutions, selon les vulnérabilités individuelles : places d’hébergement aux demandeurs d’asile, places d'hébergement d'urgence ou encore aide au retour volontaire.

L’incertitude du relogement

À ce climat pesant s’ajoute la peur du relogement. La rentrée scolaire approche et le gymnase servira à nouveau aux écoliers. 

Selon Sandrine Runel, adjointe (PS) au maire, “il va falloir libérer le gymnase pour les scolaires et les clubs de sport. Pour l’instant, il n'y a aucune date butoir. Tout dépendra des solutions qu’on trouvera pour chaque situation”, explique l'élue.

A ce jour, il n’y a aucun autre engagement et une forte inquiétude pour la suite

Sandrine Runel
Adjointe au Maire de Lyon, déléguée aux solidarités et à l'inclusion sociale

L’après” est synonyme d’angoisse et de doute pour les mères de famille. Elles évoquent leurs craintes : le retour à la rue, l’arrivée des jours plus froids, les dealers et les mauvaises rencontres. Clara*, âgée d’à peine 5 ans, scrute les allées et venues. La petite fille demande “simplement un toit”

Lire aussi : Lyon : le gymnase Bellecombe occupé depuis un mois

* Les prénoms ont été modifiés

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