Critique. Le Ballet de l’Opéra de Lyon a ouvert samedi soir la 20ème Biennale de la danse avec Mycelium, une très belle création du chorégraphe grec Christos Papadopoulos. A voir absolument !
Depuis plusieurs années, Christos Papadopoulos puise son inspiration dans l’observation de la nature, ses systèmes d’organisation et de communication, interrogeant le rapport entre le collectif et l’individualité mais aussi nos structures sociales. En 2018, sa pièce Ion évoquait la vie des oiseaux migrateurs, rappelant que leurs murmurations, leur façon de se déplacer ne sont pas un fait esthétique mais vital, ici encore, il questionne l’incapacité de l’homme à s’organiser de la même manière. Pour cela, il nous entraîne sous terre, convoquant le Mycelium, la partie reproductive du champignon qui crée des fils énormes transformés en réseaux capables de communiquer entre eux. Christos Papadopoulos imagine une entité qui prend vie peu à peu, où les danseurs dansent en harmonie tout en laissant échapper les différences de chacun à travers des micro-mouvements – une épaule qui vrille, une inclinaison de tête, une main relâchée – propices à de splendides jaillissements de trajectoires et d’écritures. La musique électro de Coti K est danse en elle-même. Elle est rythmes, rugissements d’une terre qui se craquèle et s’ouvre ; elle est tous ces fils conducteurs souterrains, pulsations du groupe qui s’étire et s’éloigne avant de revenir, plus près ou en son centre, créant ainsi un autre monde.
Une expérience intense et immersive pour le spectateur !
La pièce est hypnotique et fascinante. Refusant de travailler avec un vocabulaire empreint de références, le chorégraphe fait du spectacle un lieu d’expériences où sa recherche du mouvement s’élabore à travers le regard. Celui des danseurs structure l’écriture alors qu’ils ne se regardent jamais, l’énergie du corps étant guidée avant tout par lui. L’enjeu de la danse vient d’ailleurs, par une contamination vibratoire et percussive, une écoute de l’autre exacerbée. Entraîné dans une écriture multidimensionnelle et en évolution constante, notre regard est sollicité sans cesse, il nous extrait d’une position attentiste pour devenir acteur de ce qui se passe sur scène, en même temps que les danseurs. Il transporte notre propre corps à l’intérieur des métamorphoses de la danse et du groupe. C’est cette force, rare, qui donne à ce spectacle toute sa luminosité, nous offrant une expérience immersive magnifiée par l’intensité des interprètes !
Mycelium - Christos Papadopoulos et le Ballet de l’Opéra de Lyon – Opéra de Lyon - Jusqu’au 14 septembre.