Photo illustration d’un cimetière à Lyon. (@AFP/JEFF PACHOUD)

Le funéraire "à chacun selon ses moyens" : une tarification sociale dans les cimetières de Lyon

La Ville de Lyon va mettre en place une tarification sociale pour les concessions de ses cimetières. Elle renforce également son service public des pompes funèbres.

La semaine dernière, la Ville de Lyon a annoncé se doter, pour la première fois, d'une stratégie funéraire établie sur trois ans. Jusqu'ici sous l'autorité de l'adjoint en charge de la biodiversité, le funéraire s'est vu doter d'une délégation en septembre 2022, dirigée par Laurent Bosetti, adjoint en charge, entre autres, des services publics. Outre un peu plus de huit millions d'euros d'investissement programmé pour la création d'un nouvel ossuaire au cimetière de Loyasse, la rénovation des fours crématorium de la Guillotière et la reprise de concessions funéraires arrivées à échéance, la Ville de Lyon va mettre en place une tarification sociale dans ses cimetières et renforcer son service de pompes funèbres publics pour "faire en sorte que la mort ne soit pas un vecteur supplémentaire d’inégalité sociale". Laurent Bosetti, adjoint délégué à la politique funéraire répond aux questions de Lyon Capitale.

Lyon Capitale : Quel est l'objectif de cette stratégie funéraire ?

L'objectif est déjà d'inscrire la question du service public funéraire à l'agenda politique. Malheureusement tout le monde est concerné à la fin de sa vie et paradoxalement personne n'en parle, ni politiquement ni médiatiquement. Le funéraire est un impensé politique où l'on a des sujets sociaux, économiques, sociétaux et environnementaux et qui mérite d'être problématisé et politisé.


"Dans sa culpabilité, on ne veut pas faire un enterrement au rabais pour ses proches donc on signe le chèque et en général avec un montant très élevé"

Laurent Bosetti, adjoint délégué à la politique funéraire

Pourquoi mettre en place une tarification sociale pour les concessions funéraires ?

D'abord, c'est dire, à chacun selon ses moyens comme dans tous les autres services publics. On a aujourd'hui du quotient familial pour l'école, la crèche, des gratuités dans les musées, mais paradoxalement pour le funéraire qui emporte un gros budget des familles dans un moment douloureux, on n'a pas de tarification sociale. Ensuite, on veut porter cette question à l'échelle nationale pour qu'elle fasse boule de neige dans les collectivités. Le code général des collectivités territoriales ne prévoit pas de tarification sociale mais ne l'interdit pas. On fait quelque part un pari juridique et s'il s'avérait qu'elle n'est pas juridiquement juste, ça porterait le débat au niveau national.

Concrètement, comment sera mise en place cette tarification sociale ?

Ce n'est pas établi, ça peut être sur le principe du quotient familial avec plusieurs catégories suivant les ressources, c'est ce que j'aimerais. Après on peut avoir un principe plus simple selon que la personne soit ou non imposable. Les hypothèses budgétaires n'ont pas encore été faites mais on aura ainsi des tarifs moins chers que les concessions actuelles et on aura aussi sans doute des concessions qui vont augmenter pour certaines catégories tarifaire, pour être à l'équilibre.

Vous allez reconduire la délégation de service public accordée au Pôle funéraire public, dans quelle mesure cela permet de rendre plus accessible les prestations funéraires ?

La Cour des comptes l'a relevé dans un rapport de 2019, le funéraire voit des tarifs qui explosent depuis 40 ans. Le marché est sous la prise de deux grands groupes internationaux. Les familles sont endeuillées, psychologiquement affectées, elles se tournent vers des opérateurs funéraires sans avoir le temps de comparer les prix. D'autant que dans sa culpabilité, on ne veut pas faire un enterrement au rabais pour ses proches donc on signe le chèque et en général avec un montant très élevé.

L'objectif est de proposer des pompes funèbres accessibles avec des tarifs environ 5 % sous le marché mais aussi et surtout avec des conseillers funéraires et pas de commerciaux. On va essayer de répondre aux besoins sans ajouter des prestations dont les familles n'ont pas besoin.

Toujours dans cette politique funéraire sociale, vous vous engagez à aménager des carrés confessionnels supplémentaires. Il y a un manque de place dans ces parcelles ?

Le cimetière doit être universaliste, laïque et non-discriminant à l'entrée. On doit pouvoir accueillir les croyants et non-croyants sans exclusion et aujourd'hui faute d'anticipation, on a potentiellement des personnes dont on pourrait se retrouver à refuser l'entrée, je pense notamment aux concitoyens musulmans. Si on ne prévoit pas 200 à 300 places supplémentaires, on pourrait devenir excluant.

Le funéraire, enjeu grandissant dans un contexte de vieillissement de la population
Selon une étude de l'Institut national d'études démographiques (Ined) parue en 2016, le nombre de décès annuels en France devrait s'élever à 770 000 par an en 2060 contre 594 000 en 2016. Cette hausse est notamment liée, selon l'Ined, à la mort de la génération du baby-boom. C'est avec ce constat en tête que la Ville de Lyon investit trois millions d'euros dans la construction d'un nouvel ossuaire qui doit permettre de tenir une cinquantaine d'années. Par ailleurs quatre millions d'euros sont dédiés à la reprise des concessions funéraires arrivées à échéance, afin de libérer de la place pour de nouveaux cercueils. Dans "un contexte foncier contraint", la municipalité a "fortement augmenté" les tarifs des concessions perpétuelles et de 50 ans pour "avoir une incitation à des concessions plus courtes parce que les cimetières sont pleins", explique Laurent Bosetti.

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