Comme souvent, l’Opéra de Lyon nous offre deux productions le même mois : une à domicile, l’autre hors les murs. Deux salles, deux ambiances…
Deux productions simultanées, c’est ce que propose l’Opéra de Lyon ce mois-ci et force est de constater qu’on n’est pas loin du grand écart tant les deux œuvres se distinguent l’une de l’autre par leurs thèmes, leur époque de composition, leur genre… Tant mieux pour le pluralisme ! Autant varier les plaisirs.
On reste dans le “classique” du côté de la maison mère puisque l’Opéra de Lyon accueille Le Turc en Italie de Gioachino Rossini. Opéra bouffe composé en 1814, peu après son Italienne à Alger, l’œuvre appartient à une catégorie en vogue à l’époque, celle de la “turquerie”. Un genre qui doit beaucoup au goût pour l’orientalisme et met en scène des protagonistes enturbannés histoire d’épater la galerie.
Troisième du genre pour Rossini, Le Turc en Italie reprend la recette de son prédécesseur au point qu’on lui reprochera un tantinet la redite. Pourtant, et quand bien même la légèreté inhérente au genre est de rigueur, l’œuvre se révèle plus subtile dans la narration et plus exigeante musicalement. L’idée reste cependant de divertir à bas prix en racontant les aventures frivoles de Fiorilla qui, lassée de son mari pantouflard, enchaîne les conquêtes et entame une liaison avec le pacha Selim, en quête lui aussi d’aventures charnelles. S’ensuivent situations gênantes et quiproquos en tout genre pour une comédie finalement intelligente et bien ficelée.
Spécialiste de ce type d’œuvre, c’est Laurent Pelly qui en assurera la mise en scène tandis que la direction d’orchestre sera confiée à Giacomo Sagripanti et Clément Lonca.
Écolo’péra
Dans le cadre du deuxième opéra à l’affiche, on délocalise du côté du théâtre du Point-du-Jour.
Et l’on part sur tout autre chose : Le Sang du glacier, une création contemporaine de Claire-Mélanie Sinnhuber inspirée par l’écologie. Car au point de départ de l’œuvre, il y a une enquête menée par Lucie Vérot Solaure et Angélique Clairand, respectivement autrice et metteuse en scène, parties interviewer un glaciologue, Frédéric Parrenin, et un biogéochimiste de l’environnement, Mathieu Gautier, à propos des algues Sanguina nivaloides qui, au printemps, comme des traces de sang, teintent de rouge la blancheur des glaciers. Ce phénomène est l’un des effets du réchauffement climatique et a inspiré aux deux femmes un scénario catastrophe où les algues sortent du glacier, contaminent les eaux potables et immobilisent les fleuves.
Le personnage principal, Sofia, dont le cadavre du père est mystérieusement retrouvé dans le glacier, est touchée par le phénomène naturel qui l’affecte jusque dans son travail puisque les algues paralysent le fleuve qu’elle est chargée de surveiller.
Un livret dystopique, donc, qui s’inscrit dans l’air du temps et rejoint le thème de l’éco-anxiété.
Côté musique, Claire-Mélanie Sinnhuber opte pour l’économie de moyen à l’aide d’un effectif des plus réduits : deux voix (soprano et baryton) accompagnées d’un ensemble orchestral de poche. Trois instruments seulement, une harpe, un accordéon, un violoncelle, cela paraît peu pour un opéra mais la compositrice explique qu’elle a traité l’accordéon comme un petit orchestre à vent et la harpe comme un petit orchestre à cordes pincées.
On comprend d’autant mieux ces parti pris minimalistes quand on apprend que l’opéra est voué à l’itinérance et qu’à l’aide d’un camion-opéra et son demi-chapiteau, le projet permettra d’aller à la rencontre du public dans toute la région Auvergne-Rhône-Alpes.
Le Turc en Italie – Du 11 au 29 décembre à l’opéra de Lyon
Le Sang du glacier – Du 9 au 14 décembre au théâtre du Point-du-Jour