Dans "6 minutes chrono", Christophe Guilloteau, président du département du Rhône, revient sur le "budget de rigueur" de sa collectivité, les coupes budgétaires, notamment dans l'agriculture bio...
Les départements font face à un dramatique effet ciseau, entre la chute des recettes et celle des droits de mutation à titre onéreux, et la hausse des dépenses imposées par l'État. Dans le département du Rhône, près de 40 millions d’euros sont nécessaires pour boucler le budget 2025.
"On est train de concevoir un budget en allant chercher ligne par ligne tout ce qu'on peut économiser, explique Christophe Guilloteau, président du département du Rhône. C'est la première fois qu'on achète des voitures d'occasion, qu'on achète des meubles d'occasion pour remettre là où il y en a besoin - on a trente-et-un collèges. C'est aussi la première fois qu'on sort des contrats d'essence habituels avec les grands groupes et qu'on va jusque dans les grandes surfaces pour acheter d'essence. C'est 25 000 euros cette année rien que sur l'essence... Vous voyez qu'on va chercher des lignes d'économie partout partout partout."
"Les inondations ont coûté au département du Rhône entre 4 et 5 millions d'euros"
Le président du département du Rhône rappelle les "trois blocs obligatoires" qui entrent dans son périmètre d'intervention : les collèges, la voirie départementale et le social " qui est en train d'exploser".
Le 20 novembre dernier, le réseau des élus insoumis et citoyens du Rhône avaitr déploré, dans un communiqué signé de ses coprésidents, Monia Benaissa, adjointe au maire de Vénissieux et Gabriel Amard, député du Rhône, que le conseil départemental du Nouveau Rhône menace de couper le RSA en 2025.
"C'est absolument faux ! réplique Christophe Guilloteau sur le plateau de 6 minutes chrono. C'est une liberté d'esprit de la part de certains. J'ai vu qu'il y avait même des parlementaires de la Métropole qui me donnaient des leçons. Alors l'adjointe de Vénissieux, je ne la connais pas et je ne vois pas ce qu'elle vient faire dans un débat qui relève d'une collectivité qui n'est pas la sienne. Quant au gendre de M. Mélenchon, quand je lui ai écrit, déjà il pourrait me répondre et puis qu'il s'occupe déjà de ce qui se passe dans la métropole (collectivité pour laquelle il n'est pas élu, NdlR) à et pas ce qui se passe dans mon département pour lequel il n'est pas élu. Les collectivités s'administrent librement il faut lui expliquer, ça s'appelle la Constitution."
"Tout ce qui est agriculture qui n'est pas économiquement importante pour nos territoires, on va être obligé de baisser un peu les subventions."
Alors les coupes budgétaires ? D'abord, "tout ce qui relève de la culture, du social qui n'est absolument pas nécessaire". L'agriculture aussi. Dans un contexte tendu. "L'agriculture, c'est à peu près 10 millions, pour le département explique Christophe Guilloteau. Il y a des choses qu'on ne pourra plus faire de la même façon. On a prévenu la Chambre de l'agriculture, ils le savent, on leur a dit il y a des choses qu'on va être obligé de différer, de faire autrement avec une vision économique. Et puis tout ce qui relève, par exemple, de l'agriculture bio, tout ce qui est l'agriculture qui n'est pas l'agriculture lourde, économiquement importante pour nos territoires et pour les hommes et les femmes qui en vivent, on va être obligé de baisser un peu les subventions."
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Restranscription intégrale de l'entretien avec Christophe Guilloteau
Bonjour à tous et bienvenue dans ce nouveau rendez-vous de 6 minutes chrono. Nous accueillons aujourd'hui Christophe Guilloteau, président du département du Rhône. Les départements font face à un dramatique effet ciseau, entre la chute des recettes et celle des droits de mutation à titre onéreux et la hausse des dépenses imposées par l'État. Vous au département du Rhône c'est à peu près 40 millions d'euros, si mes chiffres sont bons, qui seraient nécessaires pour boucler le budget 2025. Ma question est simple où est-ce que vous allez les trouver ?
D'abord, on n'est pas les seuls, puisqu'il y a les communautés de communes, les métropoles qui sont dans cette difficulté financière. Où est-ce que je vais trouver les 40 millions ? Donc on est, avec les vice-présidents, en train de réaliser un budget, de concevoir un budget et on le fait en allant chercher ligne par ligne tout ce qu'on peut économiser. On a trois blocs qui sont obligatoires : les collèges, les routes et le le social - le social qui est en train d'exploser. Et tout ce qui est en optionnel, l'agriculture, la culture, le fonctionnement de la maison, on va réduire. Et puis, à côté de ça, on fait aussi attention à tout ce qui est nouvelles embauches. On ne reprend que des gens qui sont absolument nécessaires parce que dans la partie finance il y a aussi la masse salariale. Quand je suis devenu président on était à 92 millions de masse salariale avec 50 agents de moins. Et aujourd'hui ? Je suis à 102 millions. C'est-à-dire qu'on a appris ce qu'on appelle les augmentations du point d'indice : quand l'État décide d'augmenter les fonctionnaires, ok il paye les fonctionnaires d'État, mais les deux autres catégories de fonctionnaires qui sont ceux de la santé et ceux des collectivités c'est nous qui payons.
Vous parliez de fonctionnement de la maison, donc du Département, c'est-à-dire que vous pouvez… Le train de vie de la maison… On peut dire que c'est à la marge ?
Non, non, non, ce n'est pas à la marge. C'est la première fois qu'on achète des voitures d'occasion, c'est la première fois qu'on achète des meubles d'occasion pour remettre là où il y en a besoin. On a 31 collèges. C'est la première fois qu'on sort des contrats d'essence habituels dans les grands groupes et qu'on va chercher des contrats d'essence, où on va même jusque dans les grandes surfaces pour acheter d'essence. C'est 25 000 euros cette année rien que sur l'essence... Vous voyez qu'on va chercher des lignes d'économie partout partout partout.
Est-ce qu'on peut parler de budget de rigueur ou pas pour le département du Rhône ?
Ah bah, plus que de rigueur ! Parce qu'autrement, je ne sais pas faire plus que de rigueur. On va aller aussi chercher dans toutes les lignes par lesquelles on est en co-financement, soit avec l'État ,soit avec d'autres collectivités comme la Métropole. Et puis il y a tout ce qui relève de la culture, tout ce qui relève du social qui n'est absolument pas nécessaire. Ce qui est obligatoire, on le fera cette mauvaise idée qu'on a lu quelque part qu'on allait supprimer le RSA, ce qui est absolument faux. Je supprimerais peut-être la part de la CAF...
Oui, un site internet lyonnais qui avait effectivement dit que le département du Rhône allait supprimer son versement du RSA au 1er juillet 2025 donc ça c'est absolument faux ?
C'est une liberté d'esprit de la part de certains. J'ai vu qu'il y avait même des parlementaires de la Métropole qui me donnaient des leçons : qu'ils commencent déjà par me répondre quand je leur écris et puis leur expliquer que les collectivités se gèrent librement, ça s'appelle la Constitution et, qu'en plus, se sont des parlementaires de la Métropole : qu'ils posent la question à la Métropole et non pas au département !
Mais c'est vrai que pour revenir sur ce RSA, c'était notamment Monia Benaissa, adjointe (LFI) au maire de Vénissieux et Gabriel Amard, député (LFI) du Rhône qui avaient déploré que le département du Rhône allait supprimer le RSA.
Alors l'adjointe de Vénissieux, je ne la connais pas et je ne vois pas ce qu'elle vient faire dans un débat qui relève d'une collectivité qui n'est pas la sienne. Quant au gendre de M. Mélenchon, quand je lui ai écrit, déjà il pourrait me répondre et puis qu'il s'occupe déjà de ce qui se passe dans la métropole et pas ce qui se passe dans mon département pour lequel il n'est pas élu. Je suis désolé les collectivités s'administrent librement il faut lui expliquer.
Donc forcément on revient sur le budget il va y avoir des coupes budgétaires...
...Bien sûr, obligatoires
Quels sont les domaines qui vont un peu subir ?
Ben l'optionnel.
Oui mais c'est quoi l'optionnel ? Vous parliez de social. C'est compliqué de dire que c'est un peu optionnel...
Non, mais dans le social, il y a ce qui est nécessaire, ce qu'il faut faire, ce qui est obligatoire, comme le RSA. Et puis, il y a des choses pour lesquelles on est partenaire optionnel, dans lesquelles on accompagne certaines associations pour lesquelles on a un fonctionnement mutualisé, parfois avec l'État et là, tout ce qui ne relève pas d'une obligation, on va faire des économies, on va supprimer là où on va peut-être simplement réduire. Il faut que je trouve les 40 millions. Les 40 millions je ne peux pas les enlever sur les collèges, je ne peux pas les enlever sur les routes, même si les derniers dégâts des pluies et des inondations, il y a 3 semaines un mois, ont coûté au département la bagatelle d'entre 4 et 5 millions, on n'a pas fini le chiffrage, donc il va falloir qu'on fasse des économies partout.
L'agriculture ça va être compliqué da la situation actuelle...
L'agriculture, c'est à peu près 10 millions. Il y a des choses qu'on ne pourra plus faire de la même façon. On a prévenu la Chambre de l'agriculture, ils le savent, on leur a dit il y a des choses qu'on va être obligé de différer, de faire autrement avec une vision économique. Et puis tout ce qui relève, par exemple, de l'agriculture bio, tout ce qui est l'agriculture qui n'est pas l'agriculture lourde, économiquement importante pour nos territoires et pour les hommes et les femmes qui en vivent, on va être obligé de baisser un peu les subventions.
Un petit dernier mot quand même parce que Christophe Guilloteau. Le département du Rhône est financeur à 20% des pompiers...
... C'est à peu près l'équivalent de 25 millions.
Alors vous dites que le système est "à bout de souffle". Une fois qu'on a dit ça, on fait quoi ?
Le système est à bout de souffle, c'est-à-dire dans le département du Rhône qui est un SDIS particulier, qui s'appelle la SDMIS, qui est financé sur les 190 millions, à hauteur de 7 millions à la main des communes, 25 à la main du département, et le restant à la main de la Métropole. Donc la Métropole, à partir du moment où elle a le financement, elle en le patron.
Donc c'est la Métropole de Lyon qui est responsable de la situation financière des pompiers du SDMIS?
Non, je n'ai pas dit que la Métropole était responsable, mais c'est à eux d'engager les négociations et c'est à eux de dire ce qu'ils peuvent faire, ce qu'ils veulent faire. Aujourd'hui, il n'y a aucune réponse. Il y a un président de Métropole, il y a un président de SDMIS, c'est peut-être à eux d'enclencher les négociations et de voir ce qu'ils veulent faire. Moi je pense que cette affaire-là, ça fait trop longtemps qu'elle est dans le champ de la négociation et qu'on devrait peut-être se mettre autour de la table et commencer à discuter je dirais parler d'argent... Voilà, c'est tout ce que j'ai à dire. Il faut que cette grève, il faut que ces hommes et ces femmes - qui demandent beaucoup de choses peut-être trop de choses. Il y a peut-être des choses pour lesquelles on n'a rien à voir. Quand ils expliquent que le transport sur Lyon ne fonctionne pas je suis d'accord avec eux. On ne peut pas continuer à fonctionner comme ça en termes de transport sur Lyon. On perd entre 3 et 4 minutes sur une intervention d'argent. 3 et 4 minutes on sauve où on perd... Ce qui se passe aux urgences c'est trop long. En tout cas, les négociations, elles sont en cours il y en aura à mon avis pour encore quelques mois.