Vue aérienne du port Edouard Herriot à Lyon.

L'arrivée de CMA CGM dans le port de Lyon, "un point très positif" pour le fret sur le Rhône

Sur le Rhône, les péniches qui acheminent des marchandises depuis le port de Marseille sont peu nombreuses, mais l'arrivée du géant mondial du transport maritime CMA CGM à Lyon, annoncée vendredi, pourrait dynamiser cette "autoroute" fluviale.

En posant ses valises sur le port Édouard-Herriot, où il prévoit d'investir environ 40 millions d'euros, l'armateur français veut relier directement Lyon au port de Fos-sur-Mer et à son réseau maritime, espérant doubler les volumes de fret arrivant par conteneurs sur le fleuve d'ici 2032.

Son arrivée dans la capitale des Gaules est un "point très positif", puisqu'elle va "attirer des marchandises", estime Romain Maillot, délégué général au développement de l'axe MeRS (Méditerranée-Rhône-Saône). Cet acteur présent aux quatre coins du monde ne fait "pas simplement de la manutention" : "l'armateur peut s'occuper du transport des marchandises depuis leur point de départ jusqu'au point d'arrivée", et donc supprimer de nombreux intermédiaires, explique-t-il.

Un "grand port Marseille-Lyon" qui est loin d'être fait

Cet investissement s'inscrit dans la logique du "grand port Marseille-Lyon", promis il y a deux ans par Emmanuel Macron, afin de mieux connecter par voie fluviale la cité phocéenne à son arrière-pays, et irriguer ainsi davantage les marchés européens. Ce projet n'en est pour l'heure qu'à ses balbutiements.

Sur l'axe MeRS, 80% des marchandises sont aujourd'hui acheminées par la route, 15% par le rail et 5% par le Rhône. Sur ses 330 km navigables entre Marseille et Lyon, les péniches transportent en majorité du vrac (sable, sel, céréales...) et seulement 70.000 conteneurs en moyenne chaque année.

Pourtant, les volumes transportés sur l'eau pourraient être quadruplés sans investissement supplémentaire, car "l'autoroute est déjà prête", assure Romain Maillot. Avec 17 zones portuaires, un chenal, des écluses et de nombreux entrepôts, l'axe Lyon-Marseille est bien équipé.

Deux à trois jours pour faire Marseille-Lyon

Mettre davantage le Rhône à profit permettrait premièrement de décongestionner les axes routiers, une barge pouvant transporter jusqu'à l'équivalent de 110 camions, mais aussi de limiter la pollution, le transport fluvial émettant trois à cinq fois moins de CO2 que la route par tonne de marchandises, selon l'Agence de la transition écologique (Ademe). L'argument écologique n'est toutefois pas suffisant pour pousser les entreprises implantées autour de la "dorsale" Rhône-Saône à revoir leur modèle, ou même à les y attirer, regrette Romain Maillot.

Pour effectuer le trajet Marseille-Lyon, il faut compter deux à trois jours sur le fleuve en raison des nombreux barrages situés au niveau des centrales hydroélectriques, contre trois à quatre heures en camion, et ce aujourd'hui pour un prix quasi équivalent.

"On n'arrivera jamais à rendre le transport fluvial beaucoup plus rapide. Par contre, s'il est beaucoup moins cher, il y aura peut-être un intérêt pour ceux qui sont moins pressés", affirme Romain Maillot. Le prix de la manutention (charger et décharger les péniches en transit dans les ports), pourrait constituer selon lui un levier d'action.

Complémentaire

Sur le foncier qu'elle possède le long du fleuve, la Compagnie nationale du Rhône (CNR) incite déjà ses industriels à se tourner vers la voie d'eau pour le transport de marchandises. C'est aussi devenu un critère à remplir pour prétendre à une installation, selon Thomas San Marco, président de l'association Medlink Ports, chargée de promouvoir le fret fluvial sur l'axe, et directeur exécutif au sein de la CNR.

Et si les entreprises alimentent une économie circulaire, tel "un opérateur du bâtiment implanté à Lyon qui a sa carrière dans le Vaucluse et fait fonctionner ses deux sites grâce au fluvial", c'est encore mieux, illustre-t-il. "Quoi qu'il en soit, le fleuve aura toujours besoin du ferroviaire et de la route car il n'arrive pas au bout de la chaîne", dit-il.

Depuis Marseille, les marchandises remontent au plus haut sur le fleuve jusqu'à Chalon-sur-Saône (Bourgogne-Franche-Comté) et ont encore de la distance à parcourir jusqu'à destination.

Entre la barge, le rail et la route, "ce n'est pas une concurrence, c'est une complémentarité", maintient Thomas San Marco. "Il faut construire un système qui soit harmonieux", et le plus vert possible.

Tout l'enjeu de développement de l'axe Méditerranée-Rhône-Saône est d'emprunter un "chemin médian" entre le soutien à l'industrie et l'environnement, conclut de son côté Romain Maillot. Et celui-ci "n'est pas simple à trouver".

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