Gilles Vesco, ancien président du Grand Lyon aux mobilités et "père du Vélo'v", est l'invité de 6 minutes chrono / Lyon Capitale.
Il y a vingt ans, en mai 2005, Lyon inaugurait le premier vélo en libre-service au monde déployé à grande échelle. C'est le système qui a fait basculer Lyon en véritable ville cyclable, en relançant la pratique du vélo, la multiplication des voies cyclables ayant accompagné le mouvement. Vélo'v a obtenu le Trophée du vélo 2005 dans le cadre du congrès des villes cyclables et, an plus tard, a été distingué du Gold Award du Vélo mondial.
Un deal astucieux entre une innovation industrielle de JCDecaux, leader mondial de la publicité extérieure, et le projet politique du Grand Lyon visant à favoriser l'usage du vélo en ville : à savoir un contrat liant l’exploitation du service de vélos en libre‐service contre la mise à disposition de mobilier urbain, comme les abris‐bus et la publicité dans l’espace public.
Le deal (tout sauf gratuit) entre un industriel et une collectivité
Fin janvier, une flotte de 2 500 Vélo'v électriques (version 2.0, après l'échec de la première génération) était déployée dans l'agglomération lyonnaise. Avec l'aide de ce nouveau modèle, Bruno Bernard, le président de la Métropole de Lyon, espère atteindre la barre des 100 000 abonnés Velo'v d'ici le mois de mars.
"On a brisé la règle d’or du libre-service : un seul modèle de vélo sur le réseau ! "
Gilles Vesco, "père du Vélo'v"
De l'avis de Gilles Vesco, ancien vice-président de la Métropole de Lyon en charge des mobilités et considéré comme "le père du Vélo'v", seuls le 100% électrique sera la clé d'un véritable transfert modal. "C'est sur un vélo électrique qu'on sort de sa bagnole. L’enjeu de ce contrat, c’était d’avoir un "choc électrique" et une deuxième première mondiale avec 100 % de vélos à assistance électrique, indispensable pour faire basculer la pratique et l’acquisition. Il fallait renoncer, ici, à tout ou partie de la redevance nette de 21 millions d’euros sur 15 ans pour se payer 100% d’e-Vélo'v 100% électriques, de la même manière que Gérard Collomb avait su renoncer aux millions d’euros de redevance sur 13 ans pour se payer Vélo'v. On a brisé la règle d’or du libre-service : un seul modèle de vélo sur le réseau ! On a rompu la promesse initiale - déjà difficile à tenir - d’avoir au moins un vélo à chaque station. Cela ne sera pas possible avec le e-Vélo'v."
22 millions d'euros pour JCDecaux
Gilles Vesco fait un calcul simple, en partant de 35 000 trajets par jour en Vélo'v (moyenne annuelle) et de 50% d'abonnés Vélo'v rouge (mécanique) et 50% d'abonnés Vélo'v vert (électrique).
Les Vélo'v rouge représentent, théoriquement, 50% des 35 000 trajets, soit 17 500 trajets. Statistiquement, et de manière lissée sur l’année, les usagers n’ont ainsi qu’1 chance sur 2 de trouver un Vélo'v rouge sur une station (les autres étant verts). Conclusion, dans 1 cas sur 2, les usagers vont, potentiellement, prendre un Vélo'v vert à la place. Soit 17 500 /2 = 8750 prises par jour.
Or, avec l'actuel contrat signé entre JCDecaux et la Métropole de Lyon, à chaque prise, l'usager paie 1 euro. Soit un chiffre d'affaires potentiel, pour JCDecaux, de 3,19 millions d'euros par an (8 750 prises à 1 euro sur 365 jours). Le contrat ayant été conclu pour 2017-2032, il reste donc, à partir de 2025, sept ans pleins au contrat. Soit un chiffre d'affaires potentiel global de 22,3 millions d'euros d’ici la fin du contrat. L'équivalent, ou presque, de la redevance (21 millions d'euros) que JCDecaux verse à la Métropole de Lyon sur la durée du contrat. "JC Decaux se paie donc sur la bête, à savoir l'usager" conclut Gilles Vesco.
Et de s'interroger : "combien, et comment, ont été payés les anciens Vélo'v électriques ? Ce coût est-il pris en compte dans l’équilibre financier du Vélo'v vert (qui ne serait qu’un "upgrading" financé par l’usager), ou bien ont-ils été "jetés à la poubelle", soit une perte sèche pour la Métropole de Lyon) ? Dans ce cas, le Vélo'v électrique aurait été payé deux fois : une fois par la Métropole de Lyon et une fois par l’usager ?"
Et un chiffre d'affaires "annexe" supplémentaire de près de 9 millions d'euros
En sus, explique Gilles Vesco, il y a le chiffre d'affaires "annexe" issu de l’augmentation de la 1ère demi-heure payante (à l’issue de la première demi-heure gratuite). "Ce tarif a doublé. Il est maintenant, pour tout le monde, de 1 euro la demi-heure." Il estime que près de 20% des trajets dépassent le temps de gratuité. A raison de 35 000 trajets par jour, soit 12,8 millions de trajets par an, cela aboutit à un chiffre d'affaires de 2,56 millions d'euros annuels rien que pour la deuxième demi-heure ("statistiquement, les chiffres chutent très vite au delà, c'est pour cela que les autres demi-heures sont très modiques."). Soit 8,96 millions d"'euros sur les sept ans restants du contrat passé entre JCDecaux et la Métropole de Lyon. "Si l'on ajoute ces 8,96 millions d'euros de chiffre d'affaires "annexe" aux 22 millions d'euros potentiels déjà calculés, on est à près de 31 millions d'euros sur les 7 ans à venir ! Si l’on tient compte de l’objectif (proche) des 100 000 abonnés (de Bruno Bernard, le président de la Métropole de Lyon, NdlR), on peut rapprocher ces 31 millions d'euros au chiffre d'affaires (théorique) généré par les 50% d'abonnements "verts" sur 7 ans, soit 34,65 millions d'euros." (50 000 abonnés - la moitié des 100 000 abonnés espérés - à 99 euros sur 7 ans).
Et d'analyser que faute d’absence de panneaux numériques (qui devaient "adosser" les vélos électriques), il y a un report du coût sur l’usager. "Ce qui montre l’importance d’adosser pour éviter un cout usager trop important."
Le mythe du Vélo'v gratuit
Depuis le lancement de Vélo'v à Lyon, Gérard Collomb a toujours contribué au mythe d'un service financé par la publicité, au point que cela a pu parfois paraître comme gratuit (Fabien Bagnon, actuel vice-président écologiste de la Métropole de Lyon en charge de mobilités, tient le même refrain). Pourtant, Vélo'v ne l'est pas, bien au contraire. Il s'agit d'un service "premium", dont la force est d'être en capacité de proposer un rééquilibrage des stations pour faciliter le trajet "one way" (qui souligne la possibilité de ne pas remettre le vélo là où on l'a pris) et l'obligation d'avoir une immense majorité de vélos en bon, voire très bon état (ce qui coûte cher). Pour l'obtenir, le Grand Lyon a donc accepté de renoncer à percevoir une partie de la redevance qu'elle aurait dû toucher grâce à la publicité. Il est question de plusieurs dizaines de millions d'euros.
La retranscription intégrale de l'entretien avec Gilles Vesco
Bonjour à tous et bienvenue dans ce nouveau rendez-vous de 6 minutes chrono. Nous accueillons aujourd'hui Gilles Vesco bonjour.
Bonjour.
Gilles Vesco, vous êtes l'ancien vice-président (UDF) du Grand Lyon en charge des mobilités et vous êtes l considéré comme "le père de Velo'v", dont on fête cette année les 20 ans. Donc c'est né effectivement en 2005 à Lyon qui a été la première ville mondiale à avoir développé un système de vélos en libre service à très grande échelle, il y avait 4000 vélos. Aujourd'hui, une nouvelle flotte de Vélo'v vient d'arriver, des Vélo'v électriques deuxième génération. Alors vous vous êtes très contents parce que c'est pour vous le sens de l'histoire et en même temps vous dites attention on oublie la règle d'or qui est une seule offre vélo.Absolument. Alors pourquoi ?
On oublie, en fait, comme disait l'autre, ceci n'est pas un vélo. Velo'v ce n'est pas un vélo, c'est un service. C'est un vélo serviciel. Et là, on va avoir de la dégradation servicielle parce qu'on va passer de 5000 à 2500 vélos.
2500 vélos mécaniques 2500 vélos électriques.
Voilà. Mais quand vous êtes abonné vélo rouge mécanique, vous avez plus que 2500 vélos alors il faut payer plus. Si vous êtes abonné vélo vert électrique, vous avez plus que 2500 vélos. Ou alors vous ne comprenez pas pourquoi vous avez payé un abonnement de 320% de plus, puisqu'on passe de 31 euros le rouge hier à 99 euros par an le vert. C'est justifié parce que c'est la Rolls. Mais vous ne comprenez pas pourquoi vous avez payé plus cher pour finalement être obligé de prendre un vélo rouge. Donc en fait comment a explosé Vélo'v à l'époque ? C'est par cette masse critique de 4000 vélos, ça a été le risque pris par Gérard Collomb - paix à son âme - mais il faut lui reconnaître ce risque qu'il a pris. C'est monté à 5000 mais c'est cette masse critique sur un territoire avec un maillage serré des stations. On avait demandé 400 stations au lieu de 200 puisqu'on a doublé le nombre de stations pour mieux mailler le territoire. Et c'est cette conjonction des deux, plus carte bleue à toutes les stations, plus 10 points d'amélioration sur le vélo de Vienne, en Autriche qu'on était allé voir. On a les quatre piliers de la réussite des Vélo'v. Là, il suffit qu'il y en ait un de ces quatre qui flanche pour que Vélo'v trébuche. La masse critique, on l'a plus parce qu'on passe de 5 000 à 2 500. Aujourd'hui vous êtes abonné vélo rouge.
Oui mais on l'avait bien avant on avait bien des anciens vélos électriques.
Alors ça c'est pas vu pourquoi ? Parce que les vélos électriques, le "rossignol" qui nous faisait office de vélo électrique on vous dit pourquoi ? Avec la batterie dans la poche. Bruno Bernard est arrivé il a dit c'est pas l'esprit de Vélo'v. Évidemment, il a raison. Vélo'v c'est fait pour trouver un vélo directement utilisable dans la rue et pas de porter la batterie dans la poche. Et puis il a dit : il y a plus de panneaux numériques. Comme Kimelfeld (ancien président de la Métropole, NdlR) n'avait pas encore voté le nouveau plan de publicité demandé par JCDecaux pour adosser les vélos électriques sur le numérique. C'est toujours adossé. C'est pour ça qu' in fine ça coûte pas trop cher pour l'usager. Eh bien le vélo électrique on en a eu que 2500 il était light :il ne montait ni à Fourvière, ni à La Duchère ni à la Croix-Rousse. Et ça n'a pas marché non seulement pour cette raison mais pour une autre raison justement : que les gens ne comprenaient pas pourquoi ils devaient payer plus cher un vélo électrique pour avoir deux fois moins de chances d'en trouver un sur les stations.
Et c'est ce qui se passe aujourd'hui ? On a effectivement vu des stations sans Vélo'v rouge...
Et c'est ce qui se repasse aujourd'hui. Alors que ça c'était pas vu avant pourquoi ? Parce que j'avais un peu demandé - quand j'ai vu comment ça partait les négo Grand Lyon/Decaux en 2017 - j'avais demandé la roulabilité normale d'un vélo mécanique pour le vélo électrique quand il n'était pas en mode électrique. Donc Decaux avait travaillé sur la roulabilité du vélo électrique. Du coup, on avait toujours ces 5000 vélos. c'est pas vu. Et d'ailleurs la meilleure preuve c'est qu'ils ont été utilisés à 50-50. Donc on n'a pas trop vu ça. On a juste dit ça marche pas parce qu'il n'était pas efficace, performant, etc. Là, on a un vrai vélo. On passe d'un rossignol à une Rolls. Raison de plus c: 'est que dès que les gens vont la voir goûté, ils vont plus vouloir autre chose. C'est absolument un vélo magnifique. Je pense que Decaux est au sommet de son art sur le vélo, après 20 ans de travail.
Donc ça veut dire qu'aujourd'hui pour vous la règle d'or c'est d'avoir une seule offre à avoir que du vélo électrique ?Il faut un seul modèle sur le réseau. Un seul modèle qui permet un transfert modal de la voiture à la ville.
Absolument. Vélo'v 1, c'était ke vélo. A l'époque, il le fallait. Ça a été un levier formidable, un effet de démultiplication de la pratique du vélo. Mais Velo'v 2 ça devait être le vélo électrique. Je l'ai fait en 2017 ce qui a mené vers ma démission parce que quand on dégage Monsieur Velo'v du dossier Velo1'v, ça devient compliqué. Mais bon j'avais beaucoup d'autres dossiers aussi mais c'était le moment aussi de me reprofessionaliser. Eh bien on voulait de l'argent vous imaginez. C'était les pieds niquelés. La négo de Monsieur Claisse (vice-président de la métropole de Lyon en charge des marchés publics, NdlR). Enfin c'est les golden boys, des élus qui jouent les golden boys qui portent le bras à un groupe multinational de 12 000 employés, fut-il né à Lyon et qui dit je veux de l'argent. On a monté le dossier à l'envers. On a dit d'abord combien on voulait la même redevance qu'avant. Mais en plus on veut plus d'abribus et le vélo électrique. Et donc Decaux, il a dit 'mais attendez, moi je vous fais un vélo électrique light j'en mets que la moitié'. Et puis d'abord le contrat il va passer 13 ans à 15 ans. C'est la même redevance annuelle. Quand vous prenez 21 millions divisé par 15, ou 18 millions de redevances divisé par 13, c'est 1,4 million par an. Et voilà, il a dit je vais l'adosser et moi j'attends que vous me votiez les panneaux numériques parce qu'il faut que je le finance ce vélo électrique. En 2020, le plan de publicité n'est pas voté, mais Decaux, lui, il a fait les vélos. Ils sont là, il y a 2500 vélos et il a fallu les payer. C'est-à-dire double fiasco. Non seulement ça n'a pas marché mais en plus il a fallu lespayer en dehors du contrat.
L'émission touche à sa fin. ce que vous dites, Gilles Vesco, c'est une offre unique Vélo'v électrique. Pour le moment Bruno Bernard, le président de la Métropole de Lyon, dit on reste sur une offre électrique et une offre mécanique. I
lls seront obligés d'y venir.
Avec la fin de mandat des trolls khmers ont à pas fini de découvrir leur bullshit sous le tapis !
1 - contrairement à la légende colportée par les décideurs lyonnais de l'époque Collomb, ce système de vélos en libre service au niveau d'une ville n'a pas été inventé par eux mais par La Rochelle en 1976 par un maire... écologiste Michel Crépeau ! (un vrai écolo, pas un "B. Bernard issu du PS et verdi pour le job" ! )
2 - dès le départ à Lyon, les vrais écolos ont dénoncé le "pacte" avec un publicitaire !
3 - ce qui vous fait perdre votre temps et votre énergie avec le sujet de cet article, est encore et toujours un problème de fric. Jusqu'à l'extermination de l'humanité certains vont continuer à soutenir cet outil idiot. C'est lamentable. 🙂
Vive la 6 Ripouxbklique sans fric et krypto !