Vue de Lyon, cette loi n'a pas le même relief. Et pour cause : les trains régionaux fonctionnent déjà avec un service garanti. Quant aux TCL, une telle loi n'arrangerait pas le dialogue social déjà passablement dégradé.
"Si l'on nous impose le service minimum, on sera obligé, comme en Italie où il existe, de faire des grèves illégales". Cette sentence a valeur de promesse dans la bouche d'Yves Gélibert, le délégué syndical CGT des TCL.
Reprenant le credo de son syndicat, il l'applique à la situation des transports en commun lyonnais et à la récente menace de grève qui pesait sur le jour de la fête de la musique (le 21 juin) : "On a pu aboutir à un accord la veille de la grève parce que le préavis déposé sept jours plus tôt a poussé la direction à la table des négociations. Si cette loi existait déjà, la direction aurait compté le nombre de grévistes. Il y a fort à parier qu'elle aurait passé les deux jours précédant la grève non pas à négocier pour éviter le conflit mais à l'organiser".
Même si le dialogue social est loin d'être au beau fixe, la conflictualité aux TCL a bien reflué, passant de soixante-cinq jours de 2002 à 2004 à dix huit jours (pour l'instant) de 2005 à 2007. Un projet de loi comme celui présenté par Xavier Bertrand pourrait donc avoir des effets contre-productifs. Le syndicat CGT, majoritaire aux TCL, entend en effet garder ce puissant levier de négociation, que lui confère la grève, au risque d'engager des conflits sociaux illégaux.
Pour autant, la CGT des TCL approuve le projet de Xavier Bertrand sur un point : la nécessité de se mettre d'accord sur une procédure de prévention des conflits comme il en existe à la RATP et à la SNCF. Mais la CGT veut plutôt s'inspirer du modèle de la SNCF. Manque de chance, Jacques Rapoport, directeur de Kéolis Lyon (entreprise gestionnaire des TCL) est un ancien de la RATP...
Le service garanti à la SNCF existe déjà en Rhône-Alpes
Le projet de loi présenté par Xavier Bertrand prévoit d'obliger les "collectivités à définir des priorités de dessertes en période de grève et à arrêter les fréquences et les plages horaires". Suivant l'exemple de l'Ile-de-France, la Région Rhône-Alpes a déjà mis en place un service garanti qui permet de mettre sur les rails des trains quelque soit la nature des perturbations.
Le procédé est assez simple. A la SNCF de proposer à la Région un niveau de service lors de conflits sociaux ou de travaux. A la Région de valider ou non cette proposition, au maximum deux jours avant le jour-J. La SNCF doit assurer 30, 50 ou 70% du trafic en fonction des prévisions. A la sortie, elle paye des pénalités financières selon les perturbations entraînées.
Clin d'œil de l'actualité : le jour où Xavier Bertrand présentait son projet de loi, le jeudi 21 juin, la Région expérimentait pour la première fois ce service garanti, à l'occasion d'une grève des contrôleurs. Même s'il est un peu tôt pour tirer tous les enseignements de ces deux jours de conflit, une chose est sûre : plus de 70% des TER ont circulé comme la SNCF s'y était engagée. Fort de cette initiative, les représentants de la Région ont froidement accueilli le projet de Xavier Bertrand. "Les régions ne doivent pas imposer le service minimum, comme le laisse entendre le texte. C'est la qualité du dialogue social qui produit un faible ou un fort niveau de service", explique Bernard Soulage, premier vice-président (PS) de la Région. Avant de conclure : "dire que les perturbations ne sont le fait que des grèves est une manière très politicienne de présenter la réalité. Les travaux et les incidents techniques produisent bien plus de problèmes pour les usagers".
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