Jusqu'à présent, Perben avait pourtant bien fait attention de ne jamais traiter d'égal à égal, de groupe à groupe, avec les millonistes, préférant les ignorer collectivement, pour mieux les débaucher un à un, sur la base de sa propre dynamique et de son propre projet. "L'année dernière, on avait proposé des états-généraux de l'opposition... Ils nous avaient claqué la porte au nez ! Ils reprennent l'initiative du dialogue, c'est positif" se réjouit Denis Broliquier, maire du 2e, qui annonce que le rendez-vous avec Perben aura lieu "début juillet". "Peut-être que Denis a senti ça, mais Perben n'a jamais claqué la porte au nez de personne" défend un proche de Perben, devenu soudainement très conciliant à l'égard des millonistes : "Perben souhaite les revoir de nouveau. Perben a un projet pour Lyon, il propose d'en discuter avec les millonistes. L'idée c'est de travailler en commun pour gagner cette ville."
Perben n'aborde pas cette phase de discussion dans la position idéale. Certains ont vu dans les législatives une occasion de contester son leadership. "On a tous remarqué le score de Perben, et la formidable victoire de Michel Havard, qui est un "député Sarkozy" et qui donc nous convient bien", lâche Broliquier, façon de souligner le score décevant de Perben. D'autres millonistes sont encore plus radicaux : "On est pas loin de penser qu'Havard est mieux placé que Perben pour gagner" dit l'un. "Havard n'osera pas tuer Perben, il attendra que Collomb le fasse pour lui" nuance un autre.
"Droite décomplexée et rupture"
Pour enfoncer le clou, les millonistes vont ressortir leur atout majeur : Charles Millon. Le patron reviendra fin août de son ambassade de la FAO à Rome et devrait mettre tout son poids dans les "négos". "C'est notre assurance-vie. Il va se défoncer pour sauver un maximum de ses troupes, parce qu'il sait que ce qui compte, c'est plus tard. Soyons clairs, Collomb a 80% de chance d'être réélu... Il faudra compter dans l'après Perben : 2014, ce n'est pas si loin" décrypte un élu milloniste.
D'autres croient encore à une victoire de la droite l'année prochaine. A commencer par Denis Broliquier : "Les 53% de Sarkozy à Lyon me persuade que c'est possible. A condition d'y mettre la même énergie et d'adopter la même stratégie. Elle tient en deux mots : droite décomplexée et rupture. Ça nous va très bien, puisque c'est ce que prône Millon depuis des années". Et d'expliquer : "Havard a eu une démarche Sarkozy, il a gagné. Hamelin a couru après les voix de gauche, il a perdu : il n'a pas ramené à lui la droite conservatrice et le FN."
Après avoir longtemps snobé les millonistes, pour ne pas s'aliéner les centristes, Dominique Perben a-t-il radicalement changé de stratégie ? En réalité, il n'a pas bien le choix. Après les législatives, les barons de l'UMP, Philip, Dubernard et Hamelin, sont sortis du jeux... Perben, qui voulait renouveler la droite lyonnaise, ne les pleurera pas, mais il faut bien les remplacer par de nouveaux alliés. Et surtout, ces élections ont confirmé qu'à Lyon, désormais, le centre penche à gauche. L'entente cordiale UDF-PS initiée par Raymond Barre en 1995 semble avoir trouvé un certain écho dans les urnes. Perben sait qu'il ne peut plus se fier à son "allié" au département, Michel Mercier (Modem). Il a donc tout à gagner sur une ligne "à droite toute". D'autant qu'un verrou psychologique est tombé avec la défaite d'Anne-Marie Comparini (UDF)... La page de la crise régionale en 1998 est bien tournée.
"Perben veut toujours être le leader de la liste de la droite et du centre à Lyon. Le rejoint qui veut" confie un proche de Perben. En arrivant à Lyon, Perben se voyait bien faire duo avec Comparini. Il se pourrait finalement qu'il le fasse avec Millon.