Problème : l'insecticide en question est fatal aux cultures bio.
Ils ont regardé les hélicoptères passer au-dessus de leurs cultures sans broncher, impuissants. Claude Barbet et Bernard Joly, deux agriculteurs bio de l'Ain et de l'Isère, ont subi de plein fouet les conséquences des traitements chimiques imposés par la préfecture.
La semaine dernière, une chrysomèle a été découverte dans un champ situé à Pusignan, aux abords de l'aéroport Saint-Exupéry. Le petit coléoptère ailé de 7 mm est l'un des principaux ravageurs de maïs de la planète. Apparu en Europe en 1992, l'insecte a colonisé l'Ile de France en 2002, a atteint l'Alsace un an plus tard, la Bourgogne et donc Rhône-Alpes cette année. Son mode de déplacement préféré : les transports aériens et routiers.
Afin de freiner la progression fulgurante de ce gros mangeur de céréales, les autorités ont sorti les gros moyens en larguant des litres d'insecticide sur 5 000 hectares de champs de maïs. D'après le DMRGF, une très sérieuse association qui dénonce les dangers des pesticides, la matière active en question, la deltaméthrine, est "très toxique pour les organismes aquatiques, l'environnement, et est cancérigène pour l'homme". Pour le service régional de protection des végétaux (direction régionale de l'agriculture et de la forêt), il n'y avait pas de plan B : "la lutte biologique est impossible, car personne ne connaît le parasite naturel de la chrysomèle du maïs".
"Les imbécilités de certains agriculteurs"
Trente hectares de maïs biologique ont donc été déclassés et ont perdu leur label. Un manque à gagner conséquent pour les deux agriculteurs concernés. A Thil (Ain), Claude Barbet devra vendre son maïs au prix du "conventionnel", soit une perte de 150 euros/ha (350 euros/tonne pour le maïs conventionnel et 200 euros/tonne pour le bio). Malgré les épandages aériens, c'est l'avenir de son exploitation qui reste très incertain. Pour bénéficier du logo "agriculture biologique", Claude Barbet doit faire des rotations de plantations tous les ans : l'année prochaine, il cultivera donc une autre céréale que le maïs. "Mais si la chrysomèle réapparaît l'année prochaine, je serai obligé d'abandonner la culture bio".
Paradoxe, si tout le monde appliquait les règles du bio, il n'y aurait pas de problèmes. Et la Fédération nationale de l'agriculture biologique de tempester : "c'est une honte ! Le bio paie pour les imbécilités de certains agriculteurs qui ne respectent pas le métier en ne pratiquant plus de rotations."
La semaine dernière, pour Claude Barbet et Bernard Joly, c'était un peu le Vietnam.
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