Pendant tout le mois de mai, ils tiendront le haut du pavé, avec des débats, des actions politiques et des expérimentations sociales, où l'humour ne sera pas absent (bien au contraire). Le théâtre et les arts graphiques seront aussi de la partie pour replacer la politique au centre de l'espace public.`
Lyon Capitale. En mai 2008, la "Croix-Rousse s'échauffe à la révolution mondiale"... c'est une blague ou du sérieux ?
Marc Uhry : C'est du sérieux ! On va mélanger le sérieux avec le ludique; le culturel et le politique ; le festif et l'expérimentation sociale. L'accroche est ludique car on n'attire pas les mouches avec du vinaigre. Ceci dit, la période nous semble mériter une réimplication politique autre que seulement mettre un bulletin dans une urne de temps en temps.
Vous voulez prendre le pouvoir ?
Non ! sinon on se serait présenté aux élections ! L'enjeu est plutôt de reconquérir l'espace public. D'une part, comme les féministes ou les noirs américains dans les années 70, il faut arriver à mettre des thèmes à l'ordre du jour. D'autre part, il faut que cet espace public devienne une agora permanente. Concrètement, la rue ne doit pas être qu'un lieu de promotion pour le petit commerce mais un lieu d'expérimentation sociale, politique et culturelle. Nous voulons aussi élargir les pratiques de la société civile pour toucher davantage de monde. RESF, la Cimade ou la CGT chômeurs et précaires travaillent, par exemple, sur différents projets avec des plasticiens.
Quelle est l'analyse politique qui sous-tend votre projet ?
On connaît actuellement une surchauffe du pragmatisme qui a dépolitisé les grands enjeux de société. Aujourd'hui tout est géré de manière déshumanisée, selon des logiques budgétaires. On nous fait croire qu'on est dans le règne du bon sens et que, du coup, il n'y a plus de débat politique possible. La réforme de la justice soumet les droits à des contraintes budgétaires et l'éducation est avant tout une variable d'ajustement du budget de l'Etat. On a imposé une technocratie sur laquelle les citoyens n'ont plus rien à dire. Nous voulons reprendre notre indépendance par la reconquête de l'espace public !
Votre Mai 2008, c'est encore une initiative autocentrée sur la Croix-Rousse ?
Si ça se passe à la Croix-Rousse, c'est parce qu'il y a beaucoup de militants politiques et culturels. Des Canuts à la non venue de Sarkozy, c'est ici que ça se passe et peu importe que les gens soient de la Croix-Rousse ! En 1831, il n'y a que 20% de lyonnais parmi les Canuts qui se sont révoltés. Par ailleurs, peu importe que l'on soit ou non des bobos. Ce n'est pas la bonne clé de lecture. Car les identités de départ ne sont pas intéressantes, ce sont les objectifs qui importent. En plus, il s'agit d'un "échauffement". Nous ne demandons qu'à nous étendre après le 31 mai !
Au final, ce sont des actions surtout symboliques que vous allez lancer...
On verra ! Quand les Don Quichotte ont planté leurs tentes en décembre 2006. Tout le monde se demandait qui étaient ces hurluberlus. L'abbé Pierre s'est battu des années pour obtenir le droit opposable au logement, il ne l'a jamais eu. Les Don Quichotte, avec à leur tête deux frères fous furieux, l'ont obtenu en trois mois. On ne se sait pas ce qui paye. Donc il faut tout essayer.
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