L'histoire d'un vagin prenant la parole à la place de sa propriétaire. Après des siècles de silence et de refoulement, le vagin se faisait bavard (et ce, bien avant qu'Eve Hensler ne lui permette de monologuer). Aujourd'hui que le puritanisme nous arrive en un spectaculaire retour de flammes néo-con' (selon l'abréviation consacrée), le sexe ne parle plus, non. Mais il mord. En assaisonnant le vieux mythe du " vagin denté " à la sauce redneck, Teeth stigmatise les Croisés américains de l'abstinence sexuelle, partagés entre royaume du Christ et poussées hormonales. Présent dans de nombreuses cultures, le mythe du vagina dentata symbolise la peur de la castration masculine en diabolisant la femme. Mais dans cette Amérique moyenne un peu moisie et puritaine où l'on pousse au pied des centrales nucléaires (ceci expliquant peut-être cela) le mythe est inversé. Ici, c'est la jeune fille au vagin denté, la gentille et illuminée Dawn qui craint de castrer ses amants ; ce qui explique sans doute son penchant initial pour le " no sex ". Les hommes qu'elle rencontre, eux, ont une confiance aveugle en leur puissance sexuelle : du soupirant bien propret supposément abstinent au gynécologue un peu trouble qui laisse quatre doigts dans un examen vaginal hilarant (pour le spectateur uniquement). Tous ne pensent qu'à une chose, culbuter la blondinette virginale. Même son demi-frère, un crypto-nazillon secrètement amoureux d'elle, est un queutard invétéré, adepte de la sodomie, toutefois (on n'est jamais trop prudent). Tous y perdront de précieux appendices, à mesure que Dawn découvrira le pouvoir de la sexualité. De l'innocence la plus immaculée jaillira alors l'esprit retors d'une mante religieuse enfin libérée de ses tourments. Pour autant, et c'est la limite du film, le sexe demeure jusqu'au bout un problème, une manifestation d'agressivité, un enjeu de domination et de dévoration, bref une arme. Ce qui, loin de contribuer à une sexualité parlante (à défaut d'un " sexe qui parle "), brouille un peu le discours du cinéaste. En promettant la " rencontre des Les Dents de la Mer et des Monologues du Vagin ", Mitchell Lichtenstein semble avoir oublié qu'à force de montrer les dents il devient difficile d'articuler ses désirs.
KM