Le dessinateur de presse comparaissait pour incitation à la haine raciale. Les juges l'ont finalement relaxé.
Cet été, dans des chroniques publiées dans Charlie Hebdo, il avait déclenché une vive polémique en abordant la supposée conversion de Jean Sarkozy au judaïsme. Dans une autre chronique, il s'attaquait vivement aux intégristes de toutes les religions. La Licra l'avait attaqué en justice et s'était portée partie civile lors du procès. Fin janvier, durant les deux jours d'audience, les débats avaient tourné autour de la personnalité de Siné mais sans jamais vraiment s'appesantir sur les propos tenus dans les chroniques en question. Ce mardi, Siné, qui avait quitté Lyon après une journée de présence à son procès fin janvier, était bien présent. Au terme du procès, le procureur avait demandé la relaxe du dessinateur.
En cette fin du mois de février, c'est donc un Siné plus gaillard et confiant qui s'est présenté devant les juges de la sixième chambre. A mesure que les juges prononçaient leur délibéré, le visage de Me Jakubowicz, l'avocat de la Licra, se crispait. Les juges ont rendu un jugement de 73 pages et annoncé la relaxe de Siné. La décision a été longuement motivé : " Maurice Sinet ne fait qu'user de sa liberté d'expression. Ses positions ne constituent pas une incitation à la haine raciale ". Juste avant de rendre le verdict, Fernand Schir, le président de la sixième chambre a rappelé le leitmotiv qui a conduit à la relaxe de Siné : " la liberté d'expression l'emporte sur le respect des croyances surtout dans le style de la satire, un genre qui se situe dans l'exagération et l'outrance ". Siné, qui n'avait pas été épargné par Charlie Hebdo et Philippe Val lors de l'audience, s'est finalement trouvé un bouclier inattendu : le statut de journal satirique de Charlie Hebdo, dont les juges ont qualifié le lectorat " d'éclairé et d'habitué à la provocation ".
Le jugement rendu à Lyon ne devrait pas pour autant clore l'affaire. La partie civile envisage de faire appel de la décision. " J'ai entendu aujourd'hui des choses qui m'ont fait bondir. Je m'inquiète de certains propos tenus par le juge et qui me paraissent excessifs. Cette affaire mérite d'aller jusqu'en cassation et c'est vraisemblablement ce que nous ferons ", nous a confié Me Jakubowicz, l'avocat de la Licra. Siné est, lui, reparti de Lyon le pas léger et soulagé. " Je suis ravi. Je suis vraiment étonné, pas par le résultat mais par l'analyse faite par la justice. On a le droit de se moquer des religions et je le savais. Je vais continuer à mener mon combat contre les intégristes ", a déclaré Siné. Le premier épisode de la bataille judiciaire est clos. Le deuxième s'ouvrira peut-être rapidement et devant une cour d'appel.
Paul Terra
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