Le phénomène s'est multiplié. En deux ans, le nombre de vols à main armée dans le département du Rhône est passé de 135 à 182, en 2008, soit une augmentation de 35 %.
Les cours de la bourse connaissent une baisse sensible, pas la courbe des braquages. Romain* a ouvert un pressing discount, à l'entrée de la Guillotière, il y a cinq ans. Son premier braquage, c'était fin février. Un vendredi à midi. " Il était tout seul mais accompagné de son pistolet ". Le gérant a d'abord crû à une blague. Un sentiment vite dissipé quand le voleur l'a attrapé par le bras et projeté dans l'arrière boutique. " Il m'a demandé où était le coffre-fort ".
Le voleur se croyait-il dans un film ? Pour se protéger des hold-up, les établissements bancaires ont limité la monnaie disponible. Aujourd'hui, les petits commerces ont récupéré " le client ". Mais, chez eux le montant en caisse affichent rarement plus de cinq cents euros. Les bureaux de tabac et les pharmacies, qui générent plus de cash, sont les premiers visés. Patrick, buraliste à Mermoz, a essuyé cinq braquages en treize ans : " heureusement que l'assurance existe ".
" J'aurais dû lui exploser la tête contre le marbre "
Quand Romain revoit les images du braquage, filmé par les caméras de surveillance de sa boutique, il avoue spontanément qu'il aurait " dû exploser la tête du voleur contre le marbre " de son comptoir. Voir le tiroir de sa caisse vidée par un inconnu cagoulé et ganté provoque un sentiment d'impuissance. D'après Roamin, c'en est même " humiliant ". Toutefois, il reconnaît qu'il a " sû faire preuve de sang froid ". Dans ces situations, les différences de comportements et de caractères se révèlent. Une des repasseuses du pressing a pris ses jambes à son cou instinctivement.
Les victimes s'en remettent quelques fois difficilement. La peur au ventre, au travail, une salariée d'une station BP de Saint-Foy, braquée récemment, n'arrive toujours pas à en parler, sa voix se fait chevrotante. Elle accuse la police de ne pas " faire correctement son travail ".
La sensibilisation, arme défensive adéquate
Le phénomène est difficile à traiter. " Sporadique ", " éphémère ". Moins d'une minute. Les forces de l'ordre se retrouvent dépourvue face aux braqueurs à la sauvette. Le chef de la surêté départementale, Marc Schwendener, reconnaît la légitimité du choc pour les victimes, " c'est brutal, rapide ". Il insiste sur la qualité de l'écoute, " pour ne pas en rajouter au stress ".
La police regrette " le peu d'éléments à exploiter en terme de témoignages ". La sensibilisation semble être l'arme défensive adéquate. Marc Swendener préconise " de ne pas prendre de risque ", " de visiualiser lors du vol les éléments caractéristiques, paires de chaussures, gourmettes, couleurs des yeux si possible ".
Guy Pellet, président de l'association de commerçants du cours Gambetta (7e), explique : " quand on sent une ambiance désagréable, j'appelle le commissaire ". Et d'ajouter que les magasins du coin " s'autosurveillent ", " l'entraide compte beaucoup ".
Un objet pour faire diversion
A Meyzieu, par mesure de prévention, la police a distribué " neuf conseils " qui sont épinglés sur les murs des arrières boutiques: " ne pas centraliser l'encaissement en un seul point de l'établissement ", où encore, " prévoir un objet, comme une sacoche vide, pour faire diversion " lors du trajet vers la banque à la fin de journée.
" Les établissements se protégent, c'est une évolution constante ". Le responsable de la sûreté départementale du Rhône, Marc Schwendener, détaille les mesures de sécurité possibles : caisses escamotables, où le gros de l'argent disparaît dans un tiroir sécurisé, système de sas à l'entrée, où il faut montrer pattes blanches, alarme manuelle pour prévenir le commissariat. Quoiqu'il en soit, rien ne prémunit contre la violence du choc, si ce n'est la capacité à s'adapter à une fatalité désagréable.
Stéphanie Mena
Légende Vidéo : L'auteur d'un vol à main armé encourt une peine de 20 ans de réclusion et une amende de 150 000 mille euros.
* Le prénom a été modifié