Sébastien Budin, 26 ans, a été condamné, le 5 mars dernier, par le tribunal correctionnel de Lyon. Depuis, le jeune facteur de Mions a fait appel. La somme à verser aux éditeurs de films est sans précédent en France. La sanction maximum a été appliquée. Une décision attendue par les majors mais jugée injuste par les utilisateurs de système de téléchargement. Interview d'un repenti.
Lyon Capitale : Comment envisagez-vous cette procédure en appel ?
Sébastien Budin : J'avais pas le moral les premiers temps. J'en ai parlé aux collègues, ça les fait bien rigoler. Le téléchargement est très répandu. Depuis, j'ai ouvert un site pour recueillir des soutiens. Par exemple, j'ai reçu le soutien d'un français qui a écopé d'une amende de 30 000 euros l'automne dernier. Il mettait des divx à disposition sur son site. Ce que j'ai fait est bien moins grave. Sur le mien, je ne proposais aucun divx mais des mots clés pour faciliter le téléchargement. En effet, sur 'emule', la plupart du temps, le nom du film ne suffit pas, on tombe sur un porno. Bref, je rassemblais des mots clés qu'on trouve sur Google. J'ai écopé de la peine maximum requise alors j'espère que le jugement en appel sera plus juste. Il faut entre six et dix-huit mois pour être rejugé. J'espère que la peine de sursis sera enlevée parce que ça me crée un casier judiciaire. Je ne pourrai plus être fonctionnaire. Maintenant, je passe mon temps à lire des lois et à contacter des gens susceptibles de m'aider.
Vous avez gagné de l'argent avec votre serveur qui hébergeait ces mots-clés. Vous vous sentez victime ou Robin des bois ?
Plutôt victime. Mon serveur a fonctionné pendant un an. Je recevais de 20 à 30 000 visites par jour. ça me coûtait 250 euros de 'location'. Pour les financer, je posais des liens pubs vers d'autres sites, genre 'tout pour mincir' ou des bêtises comme ça. Je n'ai pas caché mon identité lorsque j'ai déposé mon nom de domaine, du coup, on m'a contacté pour fabriquer des sites porno et créer des liens vers ces mêmes sites. C'est vrai que j'ai gagné près de 25 000 euros avec un pourcentage sur les ventes d'objets de rencontres. Tout ça en un an, sans être déclaré au tribunal de commerce. C'est allé très vite. L'Internet propose tous ces moyens. J'ai commencé l'Internet fin 2004. c'était un engrenage. Je n'ai pas bénéficié de prévention. C'est direct la sanction. La nouvelle loi, HADOPI, a ce côté intéressant qui permet aux contrevenants d'être privé d'Internet avant d'avoir des ennuis judiciaires.
Que pensez-vous de la loi HADOPI ?
La loi a dix ans de retard. Elle s'attaque au téléchargement de fichier en peer-to-peer. C'est-à-dire d'adresse IP à adresse IP. Les gens vont maintenant allé télécharger de façon anonyme avec de nouveau système. En Suède, le système piratebay a développé un logiciel où les adresses IP seront 'dynamiques' modifiées constamment, donc les gens sont intraçables. La prévention prendra du temps. J'aimerais alerter la jeunesse qui a grandi avec cette impression que tout est gratuit de la dangerosité possible d'Internet. On passe tellement de temps à 'tchatter'. Mais, plus que tout, les producteurs doivent revoir leur prix à la baisse. Ils ont mis dix ans à proposer de la musique téléchargeable légalement. Quand est-ce que ce sera possible pour les films ? Il y a quelques années, un projet de loi proposait de mettre en place une surtaxe globale sur le forfait Internet qui permettrait de financer les téléchargements. Je ne pense pas que les producteurs aient quoique ce soit à y perdre.
Propos recueillis par Stéphanie Ména
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