Dans les agglomérations de Lille, Lyon et Marseille, le gouvernement va transformer des zones contrôlées par la gendarmerie en zones « police ». Et inversement, comme à Briançon (Hautes-Alpes), où la décision de fermer le commissariat de police a été très mal accueillie : 300 personnes ont marché dans les rues, samedi 19 décembre, pour exprimer leur mécontentement.
De manière générale, les élus locaux craignaient depuis un moment ces changements ; comme à Hersin-Coupigny, dans le Pas-de-Calais, où les habitants manifestent presque chaque année pour soutenir leurs gendarmes face à la menace récurrente.
Mais cette fois la mutation s'amorce pour de bon, facilitée par le passage de la gendarmerie sous l'autorité du ministère de l'Intérieur : Brice Hortefeux a envoyé fin novembre des lettres aux préfets concernés.
La ville de Rillieux-la-Pape, dans l'agglomération lyonnaise, fait partie des quatre communes du Rhône dans lesquelles les gendarmes vont très certainement devoir laisser la place aux policiers. Avec 30 000 habitants, c'est la plus importante des localités concernées. Un commissariat de proximité y remplacera la brigade de gendarmerie. Le maire (PS), Renaud Gauquelin, se désespère :
« Je ne comprends pas le choix de Rillieux. Nous avons eu, question sécurité, de très bons résultats grâce aux gendarmes ces trois dernières années. »
Délinquant des villes ou délinquant des champs ?
Mais la logique, pour l'Etat, c'est d'adapter les forces de sécurité aux bassins de délinquance, comme l'explique Aurélie Bellemin, chargée de la communication du préfet Jacques Gérault :
« On a constaté que le type de délinquance, d'actes de délinquances, de délinquants même correspond à celui que l'on rencontre à Lyon. »
Profil du délinquant de Rillieux, selon la préfecture : un genre urbain, qui ne s'arrête pas aux portes de la métropole. Faux, rétorque le maire de Rillieux, pour qui l'essentiel des délinquants viennent de la campagne :
« De la plaine de l'Ain et du Val de Saône, précisément. 95% d'entre eux vivent dans ces zones, toujours gérées par la gendarmerie. Il est plus logique de continuer à se coordonner entre gendarmeries. »
Les deux parties se basent, évidemment, sur les constatations des gendarmes ; des militaires tenus par un devoir de réserve, qui se refusent donc à tout commentaire. Une chose est sûre ; à Rillieux, la délinquance a diminué de 40% en trois ans. Renaud Gauquelin ira donc brandir ce bilan place Bauveau pour convaincre Brice Hortefeux de renoncer à son projet.
Le Sénat s'était d'ailleurs intéressé aux initiatives originales de la commune en matière de sécurité. Renaud Gauquelin est venu en 2007 y présenter ses actions, accompagné du capitaine de la gendarmerie. « Des discussions au pied même des immeubles, là où les jeunes traînent… » Des résultats que l'on ne nie pas à la préfecture :
« On ne conteste pas les très bons résultats de la gendarmerie à Rillieux. Mais cela ne veut pas dire que les policiers vont faire moins bien. »
Encore beaucoup d'incertitudes
Reste que le nombre de policiers qui seront déployés à Rillieux demeure aujourd'hui une inconnue d'importance pour le maire :
« Si la décision n'est pas remise en question, il va nous falloir au moins une centaine de policiers pour remplacer nos 42 gendarmes. Les gendarmes vivent sur place, sont disponibles 24 heures sur 24. Ce qui n'est pas le cas de la police nationale. »
Absurde, pour Aurélie Bellemin :
« On ne peut pas dire qu'un gendarme vaut X policiers. Nous ferons en sorte que la délinquance ne s'aggrave pas. Il reste beaucoup de choses à prévoir, il faut notamment s'occuper de la situation des gendarmes de Rillieux, et de celle de leur famille. Nous avançons petit à petit. »
Pas trop lentement quand même : le ministre de l'Intérieur a fixé l'échéance à 2010.
Photo : visite de Nicolas Sarkozy dans la gendarmerie d'Orléans le 14 janvier 2009 (Philippe Wojazer/Reuters)
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