Deuxième suicide à Lyon-Corbas : l'avocat dénonce

Huit mois après son ouverture, un deuxième prisonnier s'est suicidé ce week-end à la nouvelle maison d'arrêt de Lyon-Corbas. Son avocat Maître Thomassin, quarante ans de barreau à Lyon, n'hésite pas à dénoncer les conditions de détention à la nouvelle prison.

L'avocat est furieux. Son client d'origine arménienne, Artur G. détenu depuis mai à la nouvelle maison d'arrêt de Lyon-Corbas aurait dû être jugé cette année. Les surveillants l'ont retrouvé pendu avec ses draps dans sa cellule samedi matin peu avant 7 heures. Quelques heures plus tôt selon Jean-Michel Deboille, représentant syndical CGT à Lyon-Corbas, un autre détenu écroué dans le même bâtiment avait tenté de suicider avec des médicaments, mais lors de leur ronde, les surveillants l'en avait empêché.

Le manque d'humanité de la prison

Mon client avait de nombreux problèmes médico-psychologiques“, témoigne Maître Thomassin qui n'hésite pas reprocher à la maison d'arrêt son manque d'humanité. “Il nous faut vingt-cinq minutes pour rentrer à Corbas. On passe devant des vitres sans teint, on s'adresse à des gardiens dont ne voit pas les visages. Ils crient très fort dans des interphones, c'est épouvantable !“. L'avocat dit avoir de la chance car lui ne reste pas des heures dans cette ambiance, il vient juste visiter un client et repart. Les détenus eux, c'est leur quotidien. “Les anciennes prisons étaient bien mieux avec leurs rats et leur bruit“, n'hésite pas à dire l'avocat qui affiche quarante ans d'expérience, dont plus d'une dizaine en tant qu'avocat pénaliste au barreau de Lyon.

Les lenteurs de l'instruction

Son client, marié et père "d'enfants adorables“ selon le ténor, attendait d'être jugé depuis trois ans en prison. Plusieurs demandes de remises en liberté lui avaient été refusées. Le juge de Bourg-en-Bresse chargé de l'instruction, “anormalement longue“, a mis un an et demi pour boucler son dossier, jusqu'en juin dernier. Une affaire d'assassinat sur un sujet russe abattu dans l'Ain en novembre 2006. Et sur la scène du crime, les enquêteurs ont retrouvé le téléphone portable d'Artur G. Mais l'accusé a toujours nié s'être trouvé sur les lieux. Il aurait seulement prêté son téléphone aux deux principaux suspects en fuite depuis trois ans. Le juge de Bourg-en-Bresse n'en aurait pas moins été convaincu de la culpabilité d'Artur G., ce qui explique pourquoi il le maintenait en détention provisoire depuis trois ans. Samedi, le détenu ne connaissait toujours pas la date de son procès.

Sa femme était venue me voir il y a quelques semaines“, se rappelle Me Thomassin. “Mon client m'avait dit qu'il avait arrêté son traitement“, mais il était toujours suivi pour des problèmes de santé mentale et incarcéré au service médico-psychologiques de la prison de Lyon-Corbas. “J'étais allé le rencontrer et je m'apprêtais à déposer une énième demande de remise en liberté dans l'attente du procès“, raconte son avocat qui pressentait que “quelque chose n'allait pas“.

Les suicides en augmentation

Et alors que le nombre de suicides en prison a augmenté en 2009, passant de 109 en 2008 à 115 l'an dernier en France, la ministre de la Justice Michèle Alliot-Marie a confié à Pierre Botton, l'ex-gendre de Michel Noir, une mission visant à améliorer les conditions de détention des primo-délinquants. L'homme d'affaire lyonnais avait fait 20 mois de prison dans les années 1990 pour "abus de biens sociaux". Son avocat était justement Maître Thomassin.

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