Cédric Villani
© Valérie Touchant-Landais / IHES

Un Lyonnais décroche le "Nobel" de mathématiques

La médaille Fields, la plus haute distinction mondiale en mathématiques a été remise ce jeudi à Cédric Villani, 36 ans, professeur à l’école normale supérieure de Lyon. Quelques heures après la remise de ce prix, l’homme est encore sur un nuage. Interview.

Lyon Capitale : Vous avez reçu il y a quelques heures à peine la médaille Fields des mains de la présidente indienne Pratibha Patil. Comment avez-vous reçu cette distinction ?

Cédric Villani : Je vis tout cela comme un rêve. La cérémonie était un moment extrêmement intense. Lorsqu’on est en recherche, on ose à peine rêver d’une telle distinction. Je me sens un peu désigné comme représentant de mes collaborateurs, c’est un honneur. Cette récompense est à la fois un accomplissement parce qu’elle salue le travail que j’ai déjà accompli, mais elle est au moins autant un encouragement à continuer, à persévérer. J’ai 36 ans, on donne cette récompense à de jeunes chercheurs pour les pousser à faire toujours mieux.

Vous êtes le onzième français à recevoir la médaille Fields depuis 1936. Signe que la recherche mathématique française se porte bien...

Plus que cela encore. Les mathématiques en France sont au top, juste derrière les USA. Cette année, le congrès international des mathématiciens à décerné sept prix. Trois récipiendaires sont français. Une proportion incroyable ! Pourtant le budget consacré aux mathématiques dans l’hexagone est moitié moins important qu’aux Etats-Unis. Idem pour les salaires.

Pourquoi alors faire le choix de rester en France et de ne pas émigrer ?

Par fierté nationale d’abord. Je suis un pur produit du système de formation français. Et puis aussi car l’ambiance de travail est bonne et les institutions sont bien construites. Je pense notamment aux classes préparatoires et aux universités.

Vous enseignez à l’Ecole Normale Supérieure de Lyon. Quelle importance a cette fonction dans votre carrière ?

Je suis effectivement professeur à l’ENS de Lyon depuis dix ans et directeur de l’Institut Henri Poincaré à Paris. Malheureusement, à partir de septembre je n’enseignerai plus à l’ENS. Je resterai néanmoins attaché à la ville de Lyon puisque j’y occuperai un poste à l’université. Lyon est une ville toute particulière dans mon cursus. Même si Paris est la capitale incontestée des mathématiques, je ne pense pas que je serais arrivé là où je suis si je n’étais pas passé par Lyon. J’y ai trouvé une réelle liberté pour m’épanouir et offrir un réel développement à mes idées.

Quels travaux ont été salués par cette distinction ?

Mes recherches sur l'équation de Vlasov et la théorie cinétique de l’équation de Boltzmann. Ce sont des formules qui permettent de travailler sur des modèles de gaz et sur le plasma. Mes travaux sont directement inspirés de l’univers de la physique. Par exemple, l’équation de Vlasov trouve directement une application dans le domaine de la fusion nucléaire. Je fais partie de la communauté des personnes qui travaillent sur les gaz. Moi je suis à l’extrémité théorique.

Allez-vous travailler sur ce thème jusqu’à en avoir fait tout le tour ?

Mais il faut faire attention de ne pas s’encroûter. J’ai déjà changé de sujet d’étude plusieurs fois et je rechangerai. J’ai déjà quelques pistes. On ne fait jamais totalement le tour d’un sujet. On ne comprendra de toute façon toujours qu’une toute petite partie de ce qui nous entoure. Par exemple, aujourd’hui on ne sait toujours pas vraiment pourquoi à 100° l’eau bout !

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