Martinière
© Florent Aceto

La Ville veut-elle vraiment sauver la halle de la Martinière ?

Martinière ()

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Gérard Collomb va recourir à un gestionnaire privé pour relancer un équipement qui se meurt. Devant l'ampleur des investissements demandés, les deux commerçants encore présents craignent l'arrivée d'une enseigne de type Cerise et potiron ou Casino. La Ville assure vouloir faire la part belle au bio et au commerce équitable, sans prendre d'engagements fermes. Pourquoi ?

Et si la halle Martinière souffrait du syndrome Arte ? Tout le monde l'aime mais rares la fréquentent. De l'effervescence qui régnait jadis, il ne reste que deux commerçants aux étals sur-dimensionnés au regard des produits disposés dessus. Et en février 2012, l'épicier et le maraîcher devront partir. Car la Ville entend confier le site à un gestionnaire particulier, via un bail emphytéotique, pour le relancer. Un recours au privé qui provoque l'ironie de l'opposition. "Quand Gérard Collomb va finir son mandat, il ne restera que l'Hôtel de Ville dans le patrimoine municipal", lâche grinçant Michel Havard.

2600 pétitionnaires

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Face à la crainte de voir une enseigne de type Carrefour Market ou Casino arriver, la mobilisation bat son plein. 2600 personnes ont signé la pétition pour sauver la halle d'un projet qui souffre de trop d'inconnues. "C'est un village", expose l'épicier Lionel Fourcade (photo ci-contre), pour expliquer l'attachement des gens à cette institution, premier marché couvert de Lyon. Couve ici une tradition de producteurs indépendants, d'artisans du bon goût aimant à faire connaître des produits savoureux, de terroir. "Les gens ici ne prennent pas souvent la voiture. Il faut attirer des marques pour faire venir le chaland", exhorte Fabienne Lévy, conseillère municipale d'opposition (lire ci-dessous). Les deux commerçants restants ne comprennent pas que le maire ne s'emploie pas à conserver cette alchimie. Lionel Fourcade et ses soutiens ont fait le calcul : selon eux, la Ville a investi 7,8 millions d'euros pour la halle Paul Bocuse et moins de 100.000 euros pour celle de la Martinière.

"La halle se mourrait"

Pourtant, la municipalité a bien essayé de relancer la Martinière. En 2003, un projet est dans les cartons, porté par Casino qui dessine alors de belles esquisses. "J'ai mis mon véto", tranche la maire du 1er arrondissement, Nathalie Perrin-Gilbert. La Ville s'emploie ensuite à faire venir des produits bio, du commerce équitable. Et mène des actions de communication, telles que la Semaine du goût ou la Fresh attitude. En vain. Selon Nathalie Perrin-Gilbert, les commerçants établis ont presque tous dû partir, faute d'activité. "Même la poissonnerie alors qu'il n'y en a pas dans le quartier", relève-t-elle."La halle se mourrait", assène-t-elle encore.

C'est pour cette raison que le maire refuse l'arrivée de nouveaux commerçants depuis 2008. Lionel Fourcade réfute ce constat de déclin. "Le boucher qui a pris sa retraite l'an dernier a fait toute sa carrière ici". Même si le chiffre d'affaires de cet épicier n'a rien de mirobolant, il affiche un bénéfice de 3419 euros l'an dernier.

Ouvrir la halle sur la place Rambaud

Pour la municipalité, la relance de la halle passe par un gestionnaire unique qui porte un projet d'ensemble, via un bail emphytéotique de 15 ans. Le cahier des charge va être établi d'ici à cet été. Il comportera nécessairement une offre de produits bio ou issus de l'agriculture raisonnée, de circuit court. Et un lien économique et social avec le quartier, par des animations sur l'art culinaire. Le repreneur s'acquittera aussi de travaux estimés à un million d'euros en 2003, pour ouvrir la halle sur la place Rambaud. Objectif : améliorer sa visibilité. Pour Nathalie Perrin-Gilbert, il serait nécessaire de revoir ce chiffrage. "Nous ne sommes pas obligés de tout casser sur les quatre faces. On peut aussi faire les travaux en deux temps", propose-t-elle. Il n'empêche, ce niveau d'investissements empêche les petits commerces de concourir à l'appel d'offres. Au mieux certains pourront s'associer, sous une même signalétique. C'est pour cela qu'ils craignent la venue de grosses enseignes, qui elles disposent des fonds nécessaires.

La municipalité se veut rassurante. Adjointe au maire en charge du commerce, Marie-Odile Fondeur évoque la communauté du goût ou Eat Italy, comme possibles lauréats. "Nous voulons un repreneur qui partage nos valeurs", insiste-t-elle. Lionel Fourcade aimerait que ces engagements soient couchés sur papier. Une demande à laquelle les élus ne peuvent accéder. Car il y aura un appel d'offre. Affirmer d'emblée que Casino, Cerise et Potions ou Carrefour Market ne l'emporteront pas est à coups sûrs le meilleur moyen de voir des recours se constituer. "Mais c'est clairement pas notre souhait de voir ces enseignes", souffle-t-on à la Ville.

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Fabienne Lévy : "Une poubelle du secteur"

"La halle fait partie d'un secteur abandonné, avec d'autres poubelles comme l'amphithéâtre des trois Gaules, l'école des Beaux Arts, l'église de Bonne Aventure. Et là on va s'en débarrasser. Gérard Collomb s'occupe de grands projets mais il devrait prendre sa petite loupe pour regarder le joli Lyon historique. La halle, c'est un point central entre les Terreaux et les quais de Saône. C'est un super coin pour les petits vieux, à l'abri du grand public. Il y avait le projet de faire de la Martinière une annexe de la halle Bocuse. Il faut aussi s'inspirer du marché des enfants rouges, dans le Marais parisien, où les maraîchers côtoient des petits troquets où l'on boit et mange toute la journée. En tous cas, il faut ouvrir la halle sur l'extérieur".

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