Xiao Zhang

Mystique Mexique et Chine réelle

ÉVÉNEMENT - À l’occasion de ses trente ans, la galerie Le Réverbère reçoit en avant-première les lauréats du prix HSBC pour la photographie, soit la Mexicaine Alinka Echeverria et le Chinois Xiao Zhang.

Avec des expositions dans de nombreuses galeries et l’édition d’une monographie, le prix HSBC est un véritable tremplin pour les artistes. Alinka Echeverria, en résidence à l’École d’Arles cette année, a rarement exposé en France. En ce qui concerne Xiao Zhang, c’est la première fois que les Français peuvent admirer ses œuvres. La distinction qu’ils ont reçue met la lumière sur leur travail et les propulse au rang d’artistes phares de la génération montante de la photographie.

Les santons humains

Le travail d’Alinka Echeverria propose une déambulation dans un univers peuplé d’étranges santons humains. Ces pèlerins, rencontrés et photographiés sur le chemin de Tepeyac, se rendent vers la basilique de Guadalupe, près de Mexico, et portent sur leur dos des statues et des effigies de la Vierge – qui aurait fait plusieurs apparitions en ce lieu saint, ancien lieu sacré aztèque. L’artiste a photographié de dos ces pèlerins, chargés lourdement de l’icône, puis elle a détouré leur silhouette, qu’elle a placée sur un fond blanc. Hommes et femmes deviennent alors d’étranges figures, mi-humaines mi-statues. Ils ne sont plus que les porteurs de madones “customisées”, celles-ci deviennent sujet et fascinent, enveloppées de couleurs chaudes et multiples habillant leurs visages qui se déclinent à l’infini.

L’accumulation de ces étonnants portraits crée le vertige, entre le réel avec l’humain et le religieux avec la Vierge. Surréaliste et curieusement poétique, chaque photo raconte une histoire et laisse transparaître les différentes manières dont l’humain s’approprie la religion : fardeau, trophée, réinterprétation de la figure religieuse… La décontextualisation laisse libre cours à l’imaginaire et, devant la multitude de photos semblables dans la forme et en même temps très différentes, le regard se trouble, Vierge et formes humaines se fondent, tout devient mouvant et le spectateur réinterprète à son tour cette étrange série.

“Les fenêtres de la Chine sur le monde”

Xiao Zhang a quant à lui orienté son travail vers la photographie documentaire. Vivant en Chine, il s’est intéressé à l’évolution du littoral chinois et il a parcouru ces côtes qu’il trouve “belles et douloureuses”. Ses clichés immortalisent de captivants instants de vie : une mariée seule sur une plage au sable gris, des jeunes gens au regard perdu sur ce bord de mer où la beauté de l’eau côtoie de gigantesques usines, des baigneurs qui s’apprêtent à se jeter à l’eau sur un quai où plongent les buildings…Il émane une poésie de la mélancolie de chacun de ces sujets. La lumière s’avère troublante avec ces harmonies de gris infinies, dues aux couleurs du milieu naturel, mais aussi au traitement artistique qu’effectue le photographe en scannant les photos argentiques et en adoucissant les contrastes. Parfois triste, diablement poétique, la côte semble livrer ses secrets tout en gardant son mystère. Les œuvres de l’artiste sont au-delà du témoignage documentaire, c’est un vrai regard dépouillé d’artifice et sans mise en scène qu’il porte sur son pays et la mer, mer qui le fascine et qui entrouvre une porte de réflexion sur cette Chine inconnue.

Xiao Zhang et Alinka Echeverria. Jusqu’au 23 juillet, à la galerie Le Réverbère, Lyon 1er.

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