Jusqu’à la fin de la semaine, Lyon accueille le WWW2012, congrès mondial du web. Ce mercredi matin dans une salle 3000 bien remplie, Tim Berners Lee inventeur du net a livré sa philosophie et sa vision du futur. Selon lui, ouverture et transparence sont les clés tandis que la démocratie a besoin d’un Internet ouvert.
Durant une semaine, le monde numérique a les yeux rivés sur Lyon. La ville accueille le WWW2012, congrès mondial du web où se rencontrent chercheurs et acteurs du réseau. Cet évènement majeur ne pouvait se dérouler sans une keynote (présentation) de Tim Berners-Lee, inventeur du web et président du World Wide Web Consortium (W3C). Quelques minutes avant cette intervention, la salle 3000 est envahie par les écrans des ordinateurs portables, tablettes et autres Smartphones. Les organisateurs ont tenu à permettre la connexion en simultané de l’ensemble des gens présents dans l’amphithéâtre.
C’est un Tim Berners-Lee accompagné d’un mac recouvert d’autocollants qui s’est présenté devant le public composé d’une cinquantaine de nationalités. Au-delà des questions techniques il a tenu à rappeler les valeurs primordiales du web d’aujourd’hui et de demain : "ouverture, consensus, transparence, vie privée et protection de l’intimité". Par ailleurs, à quelques jours des élections présidentielles françaises, l’orateur n’a pas manqué de rappeler qu’il fallait demander aux gouvernements de publier les données. D'autre part, il considère qu’il est important de connaitre le programme des candidats en matière d’open data qui est : "une bonne idée pour la santé de l’économie et des pays". Quelles soient publiques ou personnelles, les données doivent pouvoir être transmises. Ainsi, dans une interview publiée sur le site Internet du journal The Guardian cette semaine, l’inventeur du web avait déjà milité pour que les internautes réclament leurs données personnelles aux firmes qui les collectent comme Facebook ou Google. Il serait ensuite possible de les utiliser pour de nouveaux services, toujours plus personnalisés.
"Faites des Web Apps"
L’inventeur du Web s'est ému des dérives engendrées par les applications sur Smartphone, tablettes et ordinateurs qui empêchent leurs utilisateurs de faire ce qu’ils souhaitent avec. Livrant une charge non dissimulée envers Apple et Android, Tim Berners-Lee s’est amusé à plusieurs reprises à vanter les bienfaits des applications web (Web app) qui permettent de se soustraire aux plateformes propriétaires : "Si vous n'aimez pas le monde fermé, faites des web applications ouvertes". Désormais, les Web App sont en mesure de rivaliser avec les applications classiques, tout en étant universelles et utilisables sur n’importe quel terminal.
"la démocratie dépend d'un Internet ouvert"
Tim Berners-Lee a transmis un véritable plaidoyer pour un web sans barrière allant jusqu’à affirmer que "la démocratie dépend d'un Internet ouvert", tout en prévenant qu’il faut se méfier de l’anarchisme de certains hackers. Loin de s’arrêter au présent et au futur proche, il estime aujourd’hui qu’il est nécessaire d’aller vers un réseau ouvert, un open data intelligent et une décentralisation des données pour le bien des générations futures. Dès lors, aucune négociation n’est possible sur les DPI, l’inspection des paquets en profondeurs, c'est-à-dire l’analyse pure et simple des contenus qui transitent sur Internet. Au-delà de menacer l’infrastructure en elle-même, le processus est une intrusion dans l’intimité de l’internaute. Littéralement qualifié de "dynamite", il permettrait à certains individus et Etats de récupérer des informations confidentielles.
Il est donc nécessaire d’agir dès maintenant pour empêcher les gouvernements d’opter pour des lois de surveillance : "nous devons passer 90 % de notre temps à créer pour Internet et les 10 % restant à protéger l’infrastructure. Nous ne pourrons plus innover si tout est verrouillé". Lors de la conférence de presse, Tim Berners-Lee est revenu sur la question affirmant que "même si les enfants téléchargent de la musique, ce n’est pas une raison pour menacer l’ouverture d'Internet". En 1989, Tim Berners-Lee fut un visionnaire en inventant le web ; en 2012, il nous avertit sur les dangers qui nous menacent tous : "il faut préparer le futur, en n'oubliant jamais que nous ignorons de quoi il est fait".