Corruption : 400 000 euros saisis après l'arrestation de policiers lyonnais

JUSTICE - Sept policiers, deux délégués du procureur et quatre membres d'une famille de Vénissieux sont suspectés de corruption et de trafic d'influence. Les perquisitions ont mis au jour 400 000 euros en espèces.

Après la déflagration, l'explication de texte. Lors d'une conférence de presse tenue ce mercredi matin, Marc Cimamonti, le procureur de la République de Lyon, a tenu à "resituer cette affaire dans les proportions exactes qui sont les siennes. Ni plus, ni moins". Révélée par Le Progrès, l'interpellation de 13 personnes, dont sept policiers de l'agglomération lyonnaise soupçonnés de corruption et de trafic d'influence, ne s'inscrit pas dans le cadre d'une "opération mains propres", a tenu à affirmer le procureur de la République.

"Ce n'est pas un coup dur pour la police lyonnaise", a-t-il dit en référence à la pluie d'articles de journaux évoquant ce nouvel épisode de flics ripoux. En préambule de ce point presse, Cimamonti cherche à balayer l'idée d'une police lyonnaise gangrenée. L'affaire n'est pourtant pas banale et vient nourrir un contexte déjà pesant, près d'un an après la chute de Michel Neyret et quelques jours seulement après sa révocation par Manuel Valls, le ministre de l'Intérieur.

Sous X

C'est un témoignage sous X qui a permis à la justice de lancer les premières investigations en août 2011. Des policiers, la plupart basés au commissariat de Vénissieux, se seraient laissés corrompre en échange d'avantages consentis à quatre frères de la famille Hammoud bien connus des services de police mais aussi à Vénissieux où l'un d'eux a même présidé, il y a quelques années, l'AS Minguettes, le club de foot phare de la ville.

Les fonctionnaires de police seraient également intervenus pour couvrir un trafic de stupéfiants. L'un des frères Hammoud suspectés dans ce dossier aurait quinze mentions de condamnations pour des faits de vol avec violence ou de trafic de stupéfiants. Le parquet de Lyon a ouvert une information judiciaire le 19 octobre 2011, confiée à Philippe Duval-Molinos, le juge lyonnais chargé des dossiers les plus complexes.

Durant treize mois, l'Inspection générale de la Police nationale, cosaisie de l'enquête avec la sûreté départementale, a multiplié les filatures et les écoutes téléphoniques, allant même jusqu'à utiliser le concours du RAID en raison de la dangerosité des corrupteurs potentiels.

Avantages

Les fonctionnaires de police sont suspectés de s'être renseignés sur des procédures dont des membres de la famille Hammoud pouvaient faire l'objet. Les investigations cherchent à vérifier s'ils ont tenté de compromettre certaines enquêtes. L'un des frères faisait l'objet d'un mandat de recherche pour l'exécution d'une peine de deux ans de prison. Il a été interpellé deux fois, en novembre 2011 et janvier 2012. A chaque fois, il a pu échapper aux poursuites grâce à la complicité de ces fonctionnaires de police.

Mais, en mars 2012, il est arrêté dans des conditions rocambolesques. Il aurait essayé de fuir, n'hésitant pas à foncer sur les policiers qui l'interpellaient. Ces derniers ont dû faire usage de leurs armes. Pour Marc Cimamonti, "ceux qui ont permis à cet individu d'avoir échappé aux arrestations en novembre 2011 et janvier 2012 ont un rôle dans le fait d'avoir exposé la vie de leurs collègues en mars 2012".

Albert Doutre et Marc Cimamonti

En échange, les policiers ont obtenu des invitations à déjeuner, des fournitures de téléphones portables ou du matériel hi-fi. L'un d'eux a par exemple obtenu le prêt d'une Porsche pour le mariage de sa fille. "Ces gens-là ne font plus partie de la communauté policière", s'est insurgé Albert Doutre, le directeur de la sécurité publique du Rhône, qui a rappelé l'exemplarité de la Police nationale et des 3.150 fonctionnaires de la sécurité publique du département.

400 000 euros

400.000 euros en espèces ont été découverts après les perquisitions effectuées hier, dont 350.000 saisis au sein de l'entreprise dirigée par celui qui est considéré comme le chef de famille. Il est à la tête d'un magasin d'électroménager. Cette somme d'argent pourrait être liée à une escroquerie sur du matériel de marque Samsung, a expliqué le procureur Cimamonti. Selon nos informations, des personnels au sein du parquet de Lyon pourraient être auditionnés dans le cadre de cette enquête.

A Lyon, les procédures à l'égard de policiers s'accumulent. Après l'affaire Neyret, il y a eu le dossier des policiers lyonnais accusés de viol. Demain, jeudi 13 septembre, ce sont sept autres fonctionnaires qui seront vraisemblablement présentés au juge Duval-Molinos après leurs 48 heures de garde-à-vue. Ils restent présumés innocents, comme toutes les personnes inquiétées dans ce dossier. Des actes isolés, nous dit-on. Certainement. Mais, en un an seulement, cette répétition de cas de dérives policières interroge.

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