Alors qu’officiellement, la renonciation du pape est le fait de l’affaiblissement du Saint-Père, le quotidien italien La Repubblica explique cette démission par la présence d’un réseau gay qui aurait exercé un chantage sur certains prélats.
Ce jeudi 11 octobre 2012, Rome célébre la mémoire de Jean XXIII. Benoît XVI apparaît au balcon et s’adresse aux jeunes de l’Action catholique : "Il y a cinquante ans, j’étais comme vous sur cette place, le regard tourné vers le ciel, écoutant les mots pleins de poésie et de bonté du pape. Nous étions, alors, heureux. Remplis d’enthousiasme, nous étions persuadés que l’Eglise allait vivre un nouveau printemps". Une brève pause. Nous étions heureux, au passé. "Aujourd’hui la joie est plus sobre, elle est humble. En cinquante ans, nous avons appris que la fragilité humaine est présente y compris dans l’Eglise".
Des passages "scabreux"
Personne n’a vraiment compris, cette après-midi d’octobre. Personne ne savait que, deux jours plus tôt, Benoit XVI avait une nouvelle fois rencontré le cardinal Julian Herranz, 83 ans, l’espagnol de l’Opus Dei, chargé par le pape lui-même de présider la commission d’enquête que la presse a baptisé Vatileaks. Le corbeau, les fuites, les documents dérobés dans l’appartement du pape… Herranz et Ratzinger se sont vus régulièrement d’avril à décembre. Le pape a suivi avec appréhension les développements de l’enquête : des dizaines et des dizaines d’entretiens avec des prêtres, des cardinaux et des laïcs. En Italie et ailleurs. Pour finir, ce jour d’octobre, le passage le plus "scabreux", pour reprendre le mot de La Repubblica. Pour la première fois, le mot "homosexualité" a été prononcé, à voix haute, dans l’appartement du pape. Pour la première fois aussi a été prononcé, le mot "chantage", en latin dans le texte : "influentiam".
Des "liens mondains" avec des laïcs
Deux tomes de 300 pages, qui consignent exactement l’ensemble des faits. Oui, certains hauts dignitaires de l’Eglise subiraient ainsi "l’influence extérieure" -comprendre le chantage- de laïcs avec lesquels ils entretiendraient des "liens mondains" - comprendre des rapports homosexuels. Selon La Repubblica, dans la semaine précédant Noël, le pape, fortement contrarié par ce rapport hyper détaillé, dans lequel figuraient même les lieux et les dates des ébats, a déjà pris sa décision. Réagissant officiellement, le Vatican juge cependant les déclarations des médias italiens fantaisistes. Son porte-parole, le père Federico Lombardi, a ainsi affirmé qu’il n’y aurait ni "démentis, ni commentaires, ni confirmations", évoquant des "affirmations et opinions" dans la presse.
Des raisons financières ?
Pour Odon Vallet, historien des religions, qui s’exprimait sur BFM TV, "il y a certainement des évêques qui ont des relations avec des hommes. Est-ce qu’il faut parler de réseau, c’est difficile à dire. Il y a des associations de croyants homosexuels chez les musulmans, les juifs et les catholiques dont font partie certains prêtres voire très discrètement certains évêques. Mais de-là à voir une espèce de fraternité entre homosexuels, c’est peut-être aller un peu vite en besogne". Selon lui, Benoît XVI a renoncé à ses fonctions simplement parce qu’il est "âgé et malade", les vraies raisons étant à chercher, toujours selon l’historien, plutôt du côté des problèmes financiers du Vatican. Il est vrai qu’en France, suite à l’affaire Vatileaks, les experts s’étaient succédé dans les médias pour porter des accusations fortes contre le Vatican, accusé d’être un "État voyou". En clair, Benoît XVI aurait été poussé à la démission pour un déficit record de près de 15 millions d’euros (lire ici).
Des raisons plus prosaïques
Preuve n°1 : début janvier, la banque d’Italie éjectait le Vatican du système Swift avec, pour effet immédiat, la cessation de la possibilité des paiements par carte bancaire. Entrée aux musées, boutiques, philatélie, numismatique, tout cela en espèces uniquement… Une perte sèche de pratiquement 1,2 million d’euros en près de 40 jours, "un long carême", comme l’écrit le site de nos amis suisses LesObservateurs.ch. Preuve n°2 : le rétablissement des transactions par carte au lendemain de l’annonce de la démission du pape. En réalité, les choses semblent de ce point de vue beaucoup plus prosaïques. La maison suisse Aduno SA a en effet annoncé (lire ici) la fin des tribulations bancaires du Vatican, grâce à l’installation de terminaux dernier cri dûment agréés par la Banque d’Italie, puisque c’était bien là la motivation de l’interdiction, la banque centrale italienne reprochant à la Deutsche Bank Italia, fournisseur des terminaux de paiement par carte bancaire sur le territoire du Vatican jusqu’alors, de procéder sans autorisation.
Saura-t-on jamais le vrai du faux et le successeur de Benoît XVI s’attaquera-t-il vraiment à ces affaires de mœurs, qui, au-delà du Vatican, donnent une bien piètre image de l’Eglise catholique dans le monde ? Nul ne le sait. Car si la Suisse a un peu ouvert ses comptes, les voies du Seigneur restent impénétrables.