À gauche, haro sur Cahuzac

L’affaire Cahuzac est bien encombrante pour la classe politique. Si le gouvernement a décidé de faire de l’ancien ministre du Budget un pestiféré de la République, condamnant le mensonge plus que les actes, dans l’opposition on refuse de tirer sur l’ambulance. Une question commence toutefois à se faire entendre de plus en plus : qui savait ?

François Hollande a donné le ton après que Jérôme Cahuzac a avoué détenir un compte en Suisse. Plus question de tenter de sauver l’ancien ministre du Budget. Ne surtout pas faire mine de lui tendre la main. Jamais un communiqué de l'Élysée sous la présidence de François Hollande n’avait paru si âpre : "Le président de la République prend acte avec grande sévérité des aveux de Jérôme Cahuzac devant les juges d'instruction concernant la détention d'un compte bancaire à l'étranger. C'est désormais à la Justice d'en tirer les conséquences en toute indépendance. En niant l'existence de ce compte devant les plus hautes autorités du pays ainsi que devant la représentation nationale, il a commis une impardonnable faute morale. Pour un responsable politique, deux vertus s'imposent: l'exemplarité et la vérité."

Le mensonge condamné

Une vérité "cruelle", pour Jean-Marc Ayrault. "Jérôme Cahuzac a menti devant le président de la République, le Premier ministre et la représentation nationale", a déploré le Premier ministre dans un communiqué. "Un homme politique doit être irréprochable. Il doit, plus que tout autre citoyen, respecter la loi. Le mensonge n’est pas acceptable en démocratie. C’est à lui désormais qu’il appartient d’assumer pleinement ses responsabilités devant la justice".

Le mensonge, c’est là que la tête du Gouvernement situe le problème. Ni François Hollande, ni Jean-Marc Ayrault ne condamnant directement l’existence du fameux compte bancaire suisse détenu par l’ancien ministre du Budget. Tout comme Claude Bartolone."Jérôme Cahuzac a reconnu sa culpabilité devant les juges. La parole prononcée dans l'hémicycle est sacrée. Au-delà de ma consternation et de ma colère, avoir menti devant la représentation nationale est impardonnable", estime le président de l’Assemblée nationale dans un communiqué.

"Il devrait quitter la vie politique"

Dans la droite ligne des consignes données par l'Elysée, les ministres s’évertuent à couper la corde qui lie encore le boulet Cahuzac au gouvernement. Et dans le domaine c’est peut-être la ministre de la Culture Aurélie Filippetti qui s’est faite la plus virulente. "Ce qui s’est passé là est tellement grave qu’il devrait quitter la vie politique.(…) vous croyez sincèrement que si François Hollande avait eu le moindre doute il aurait choisi ce ministre là et il l’aurait gardé auprès de lui jusqu’à maintenant ? (…) S’il avait eu le moindre doute il aurait immédiatement mis un terme aux fonctions de Jérôme Cahuzac", a-t-elle martelé sur BFM TV, avec l’ambition de circonscrire l’incendie Cahuzac et d’épargner le Président et le Premier ministre, déjà bien affaiblis dans l’opinion publique.

"Je ne veux pas accabler un homme déjà à terre"

A droite, en revanche, les réactions sont plus contrastées. Pas question de tirer sur l’ambulance. "Je ne veux pas accabler un homme déjà à terre qui se dit torturé par le remords. Mais j’ai un sentiment de très grand tristesse devant le gâchis de crédibilité du politique à la suite d’abord du déni devant l’Assemblée nationale de Jerome Chauzac. Il me semble que le Premier ministre devrait s’expliquer devant l’Assemblée nationale", a affirmé l’ancienne ministre Nathalie Kosciusko-Morizet.

De son côté, si François Fillon ne manque pas de constater que "M. Cahuzac n'était pas le dernier à porter des accusations qui n'ont jamais été prouvées, notamment contre Eric Woerth", il relève que "la faillite morale est du côté de la gauche qui est prompt à critiquer, qui se conduit souvent d'une manière très différente de ses principes et de ses valeurs".

Car au-delà de la question de l’homme c’est la question d’un système qui s’impose maintenant. "Où s'arrête la chaîne du mensonge ? Qui savait et n'a rien dit ?", s’interroge ainsi Jean-Luc Mélenchon. "Après des semaines d'un feuilleton où Jérôme Cahuzac a multiplié les mensonges, c'est une véritable bombe politique qui vient d'éclater", peut-on lire dans un communiqué du parti communiste qui salue "le travail de la presse et de la Justice qui ont mis un terme à ce scandale d'Etat".

Parmi les réactions les plus marquantes, celle d’Arnaud Montebourg, ministre du Redressement productif qui n’a pas été des plus prolixes. Interrogé en marge du passage du Train de l’Industrie à Marseille, il a simplement affirmé : "les bras m'en tombent, je n'ai pas de mots", avant de compléter : "Je ne pensais pas qu’on en était là".

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