Les Stagiaires

Les Stagiaires : bienvenue à Googleland !

CRITIQUE – Quand deux quadragénaires un brin loosers se retrouvent stagiaires chez Google, ça donne une bonne comédie signée Shawn Levy (La Nuit au musée), et une pub de deux heures pas cher payée pour le géant informatique américain.

Owen Wilson et Vince Vaughn, dans Les Stagiaires © Twentieth Century Fox

Retour du duo comique qui avait fait les beaux jours de Serial Noceurs (David Dobkin, 2005), Owen Wilson et Vince Vaughn, le candide et le grand gaillard fantasque, désormais quadra, qui se sont rangés du tapage d’incruste dans les mariages pour vendre des grosses montres clinquantes. À l’heure où le smartphone est une extension de la main, plus de place pour ces antiquités qui font tic tac. Mis au rancart, les deux commerciaux dont les compétences sont limitées à la vente et aux techniques d’embobinage qui vont avec, découvrent la (difficile) recherche d’emploi, sur fond de crise conjugale pour Vince Vaughn (Billy) et de crise existentielle pour Owen Wilson (Nick).

Geekomédie

C’est alors que va se produire l’improbable : Billy et Nicky décrochent un stage chez Google, après une inscription express à une obscure université en ligne et un entretien par webcam ubuesque. À la clé, un CDI pour la team de stagiaires qui passera brillamment les épreuves avec le plus de “googlitude” (googliness dans la langue de Shakespeare). Coiffés de la casquette à hélices des Nooglers (contraction de new googlers), les deux “vieux” sont à la ramasse parmi les geeks. Leur équipe est constituée par ceux dont personne ne veut, eux compris : une chaudasse en réalité effrayée par les hommes, un asiatique trichotillomaniaque, un asocial et un geek qui se prend pour un gangsta-rappeur. Une fois ces clichés absorbés (non sans mal), le décalage entre les générations et les compétences en informatique donnera lieu à des situations cocasses, où le duo Vaughn-Wilson se montre particulièrement inutile, donc drôle.

Vince Vaughn, dans Les Stagiaires © Twentieth Century Fox

Tandis que leurs coéquipiers font fonctionner à plein leurs méninges pour résoudre des épreuves techniques, Billy et Nicky, dépassés par la technologie, divaguent ou proposent l’école buissonnière (dans une scène de club de strip-tease un peu trop longue et un peu trop “placement de filles nues” pour être honnête). Dans l’adversité, ce n’est pas tant le cerveau qu’ils convoquent que la théorie d’Alex, la soudeuse-danseuse de Flashdance (qui reviendra en gimmick comique et musical dans le film). Néanmoins, ces approches désinvoltes de la compétition porteront leurs fruits, notamment lors d’une partie de quidditch mémorable, qui donnera l’avantage à cette équipe de bras cassés.

Le film assume une certaine naïveté, les dialogues sont bien écrits et drôles (Vince Vaughn est pour la deuxième fois au scénario, après Thérapies de couple en 2009), les vannes fusent, portées par les routiers du Frat Pack (l’excellent Will Ferrell est également au casting, avec quelques petites scènes remarquables de beauferie), et de jeunes et très bons acteurs comme Josh Brener, qui tenait déjà le rôle d’un geek dans la série Big Bang Theory. La fin est assez prévisible : le rêve américain s’est accompli, dans un joyeux happy end. Le seul hic, c’est il ne s’est pas accompli n’importe où…

Conflit d’intérêts

Owen Wilson et Vince Vaughn, dans Les Stagiaires © Twentieth Century Fox

L’affiche annonçait la couleur. Ou plutôt les quatre couleurs : celles des lettres de Google inversées, que Vaughn et Wilson regardent avec des paillettes dans les yeux. Ce sera à l’image du film. Le géant américain y est montré comme une bulle paradisiaque où la nourriture est gratuite et à volonté, comme un parc d’attractions avec toboggan sur deux étages, des capsules pour se reposer et des terrains de beach volley pour se défouler entre deux lignes de code, où l’on valorise et bichonne ceux qui imagineront les innovations de demain (comme ces voitures sans chauffeur). Bref, une société modèle, classée quatre fois de suite “Meilleur employeur” par le magazine économique américain Fortune. C’est d’ailleurs un reportage télé sur l’entreprise qui aurait inspiré son scénario à Vince Vaughn.

Shawn Levy a poussé le vice jusqu’à tourner réellement au Googleplex, le siège de Google dans la Silicon Valley californienne. On apprend également que l’entreprise a avalisé les accessoires et les décors pour les parties réalisées en studio. Alors, forcément, il n’y a pas un plan ou une réplique critiques à l’encontre de Google. Mieux, certaines scènes valorisent les produits du groupe, telle cette épreuve de hotline pour utilisateurs de Gmail à laquelle les Nooglers doivent se frotter. Même Sergueï Brin, le cofondateur de Google, fait deux courtes apparitions dans le film, ce qui ne le rend que plus cool comme boss.

L’hagiographie gâche un peu l’élan comique du film, qui passe quand même à côté d’un sujet social essentiel. La crise, les angoisses des jeunes générations sorties de la fac quant au chômage sont certes évoquées mais rapidement balayées. Les Stagiaires, qui reste néanmoins une très bonne comédie et qui parvient à capter quelque chose de son temps, aurait gagné à jouer la carte de la parodie satirique, un poil plus critique, plutôt que celle de la promotion outrancière.

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Les Stagiaires, de Shawn Levy, 2013, 1h59, couleur. Avec Owen Wilson, Vince Vaughn, Rose Byrne, Max Minghella, Josh Brener, Dylan O’Brien, Tiya Sircar, Aasif Mandvi. En salles à partir de ce mercredi 26 juin.

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