Camp de Vaulx-en-Velin : Roms et riverains à bout

Alors qu'un incendie a détruit une grande partie du camp de Roms de Vaulx-en-Velin, les esprits sont tendus. Roms et riverains défendent deux circonstances différentes à l'accident. Si les premiers évoquent l'accident, les autres affirment que le feu serait né d'un différent opposant deux clans au sein du camp.

Le dramatique incendie qui a ravagé une partie du camp de Roms de Vaulx-en-Velin jeudi 15 août ne surprend pas vraiment les riverains du quartier. "C'est pas étonnant qu'on en arrive à une telle situation", s'indigne même une habitante. En tout, une quarantaine de familles ont perdu leur habitation de fortune et le peu qu'elles possédaient : vêtements, nourritures, papiers... Alors que sur le camp il se raconte que le sinistre serait d'origine accidentelle – une casserole laissée sans surveillance – les riverains ont une autre explication. Cette catastrophe serait le résultat de rivalités entre les deux communautés qui occupent le terrain.

Car ce sont bien deux groupes différents qui cohabitent sur l'espace situé à l'angle de l' avenue Roger Salengro et avenue des Canuts. Alors qu'une ordonnance du Tribunal exigeait le démantèlement du campement le 15 février 2013, quatre mois plus tard, un deuxième camp est venu s'installer, expulsés de Saint-Priest. Depuis, les relations seraient très tendues entre les deux "clans", rapportent les riverains comme certaines associations.

Riverains excédés

Les habitants du secteur sont à bout et ne le cachent pas. Dans cette ambiance fiévreuse, faits et rumeurs se mêlent sans qu'il soit toujours possible de démêler le vrai du faux. "Toutes les nuits, il y a des coups de feu, des femmes qui crient. Ils ont déjà retrouvé des morts ici. Et quand on demande au maire, il nous répond que tout va bien", s'indigne un groupe d'habitantes qui s'est amassé pour "témoigner de la réalité du vrai monde".

Pour ces femmes, c'est sûr, ce n'est pas une casserole qui a pris feu mais bien une balle tirée par le deuxième camp de Roms sur une bonbonne de gaz. Le fils de l'une d'entre elles affirme l'avoir vu.

Il faut dire qu'un peu plus tôt dans la journée, une bagarre au couteau survenue entre des membres des deux groupes de Roms avait fait grimper la tension d'un cran. Si les forces de l'ordre évoquaient uniquement un blessé léger, les riverains, plus suspicieux n'y croient pas. "Malgré ce que les flics disent il y a eu des morts, et même un bébé égorgé", affirme une des femmes du groupe qui se dit témoin. C'est même cela qui aurait justifié, selon elle, la présence d'un hélicoptère de secours sur place. La police dément.

Insécurité

Pour les riverains, ce qu'il s'est passé hier, n'est donc pas le fruit du hasard. Cela fait presque un an qu'ils demandent au maire d'agir. Mais la cohabitation entre les habitants du quartier et les Roms est devenue quasiment impossible. Certains Vaudais évoquent des actes de "cambriolage, racket, incivilités en tout genre, prostitution...". L'odeur - mélange de saleté et de fumées toxiques – est omniprésente. "Les personnes logées juste en face du campement ne peuvent pas ouvrir leurs fenêtres", explique un homme.

L'insécurité est aussi devenue un réel problème. Détours, couvre feu le soir, surveillance constante des enfants, les habitants vivent dans un climat de méfiance permanent. "Il y a un ras-le-bol général dans le quartier", explique excédé un autre riverain. "C'est au Gouvernement que j'en veux, témoigne un habitant accoudé à sa fenêtre, s'ils décident de les accepter il doit alors s'en occuper, pas les laisser comme ça".

Sans solution, les Roms forcés de se réinstaller

Marie Higelin, présidente de l'association Enfant sans toit pointe justement du doigt "l'inaction des autorités". "Rien ne se passe. A partir de là il y a non-assistance à personne en danger", s'indigne-t-elle. Car au lendemain de l'incendie, les familles semblent livrées à elle-même. Le préfet délégué à la sécurité comme le maire de Vaulx-en-Velin ont d'ailleurs affirmé qu'il n'y aurait ni ouverture de gymnase ni dispositif d'hébergement d'urgence.

C'est au milieu des décombres ou dans des coffres de voiture que certains enfants ont passé la nuit, faute d'avoir ailleurs où aller. La situation déjà critique s'est dégradée d'avantage. À 600 sur ce grand terrain vague - à deux pas du nouveau centre commercial de la Soie - sans eau, sans électricité, les conditions d'hygiène sont désastreuses.

Malgré cela les familles sinistrées commencent déjà à reconstruire des logements de fortune faits de palettes. "On veut juste un endroit où se poser pour que nos enfants puissent aller à l'école et que nous puissions avoir un travail comme tout le monde", demande résigné un habitant du camps. Pour Marie Higelin, la situation est devenue insupportable. "Ils n'ont pas le droit de laisser les gens comme ça, j'en arrive à vouloir qu'on les expulse au moins ils chercheront un autre endroit", s'indigne-t-elle.

Car malgré la forte animosité qui les habite, les riverains entendent que les Roms, comme tous les habitants du quartier aient "le droit de vivre correctement, dans le calme et des conditions d'hygiène décentes". "Le maire, le préfet, les associations, personne ne fait rien, c'est nous qui leur donnons de la nourriture ou des couvertures comme cette nuit où ils ont du dormir dans les pelouses de nos immeubles", témoignent des habitantes. Mais personne ne se fait d'illusion, aucune décision ne sera prise avant la semaine prochaine. Roms comme habitants du quartier vont devoir encore faire preuve de patience.

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