La mesure phare du Gouvernement pour les jeunes sans diplômes peine à décoller. En cause : la crise, le temps de formation et un cahier des charges trop rigide. Mais les collectivités locales ne sont pas exonérées de responsabilités. Exemple en Rhône-Alpes, où seulement un quart des contrats prévus pour 2013 avaient été signés à mi-année.
“Il y a eu un effet d’annonce. Ce qui peut être positif dans la communication, pour faire parler des Emplois d’avenir, confie Mathilde Burgy, directrice adjointe de la mission locale de Vénissieux. Mais nous, sur le terrain, nous savions très bien que ça mettrait du temps à démarrer.” Fin mai, le quotidien Le Monde a jeté un pavé dans la mare en publiant la carte des contrats déjà signés sur l’ensemble du territoire français. Avec un taux de réalisation de 13 % sur son objectif de 2013, le Rhône figurait parmi les plus mauvais élèves de la classe.
À la moitié de l’année, avec 2 000 Emplois d’avenir signés – pour un objectif de 7 200 en 2013 –, la région Rhône-Alpes n’avait rempli qu’un gros quart de son contrat. “Peut-être que ce chiffre était optimiste. L’avenir nous le dira. En même temps, il est en adéquation avec les besoins de la population”, estime Anne Bailbé, directrice déléguée en charge du partenariat à la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte). “Dans le Rhône, c’est habituel, il y a de gros objectifs, et ça demande plus de temps, défend Martial Guiguet, directeur de la mission locale de Vénissieux. Nous ne sommes pas inquiets, il va y avoir une montée en puissance.”
Une belle réponse, sur le papier
Pendant ce temps-là, le chômage n’attend pas. Avec 26,5 % de chômeurs chez les moins de 25 ans, la France pointe au 17e rang sur 27 dans le classement européen. Dans les villes populaires, comme à Vénissieux, le taux de chômage dépasse 40 %. Face à ce constat, le Gouvernement a lancé fin 2012 une belle réponse sur le papier, les “emplois d’avenir”. L’idée : donner la possibilité à des jeunes de 16 à 25 ans, sans diplômes ou peu qualifiés, d’obtenir un CDD de 3 ans. Dans le secteur non marchand, prioritaire, l’État contribue à hauteur de 75 % du salaire du jeune, contre 35 % dans le secteur privé.
Les types de postes sont variables : “On signe des Emplois d’avenir dans tous les domaines. On a aussi bien des postes d’agent d’accueil dans les services administratifs que des postes dans les espaces verts ou dans les transports. Dans les services techniques, on va avoir des postes en maçonnerie, en peinture ou dans l’éclairage”, précise Brigitte Sebert, directrice de l’insertion et de l’emploi à la Ville de Villeurbanne.
Quant au public concerné, il est aussi “très variable”, selon Amandine Triboullet, de Pro Sport 69, employeur solidaire dans l’animation sportive : “On a des profils avec des BEP de comptabilité, d’autres qui n’ont qu’un brevet ou des personnes qui ont un diplôme non reconnu par l’État. L’objectif, c’est d’amener à une première qualification et de pérenniser l’emploi.”
“Les moyens, ils arrivent toujours après les annonces”
Début janvier, le ministre délégué à la Formation professionnelle (Thierry Repentin, à l’époque) s’était déplacé en grande pompe à Saint-Fons pour signer les premiers Emplois d’avenir. Mais depuis, spécialement dans les banlieues, le démarrage est poussif. En cause, le temps de formation de jeunes sans diplôme face à une toile administrative nébuleuse, constituée de missions locales, de Pôle emploi, des structures de quartier et de la Région, qui finance la formation.
“Pourquoi c’est si long ? Il y a eu tout un travail de recensement des postes disponibles, tout un travail d’information pour les différents responsables de service. Il fallait également recruter des tuteurs pour suivre les jeunes”, rappelle Olivier Baud, conseiller municipal délégué à l’insertion à Villeurbanne. “Les moyens, ils arrivent toujours après les annonces, soupire Mathilde Burgy. Les quatre premiers mois, nous n’avions même pas les objectifs. On attendait que la Région se positionne pour payer les formations des jeunes. Nous ne pouvions pas commencer à mettre en œuvre les Emplois d’avenir.”
Les missions locales, chargées de suivre, d’informer et d’orienter les jeunes en difficulté, se heurtent également à la difficulté de trouver des employeurs. “Dans la conjoncture actuelle, nous n’avons pas, dans le secteur non marchand, 300 employeurs qui viennent pour l’effet d’aubaine des Emplois d’avenir”, estime Mathilde Burgy.
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“Ce n’est pas parce qu’il y a des Emplois d’avenir que les employeurs créent de la demande”
Face à ce blocage, le Gouvernement communique pour plus d’ouverture au secteur marchand, au départ marginalisé. “Les Emplois d’avenir vont déboucher sur le secteur marchand. Nous y sommes déjà”, confie Jean-Claude Jouanno, président du comité départemental olympique et sportif (CDOS) du Rhône, qui s’est fixé un objectif de 300 contrats fin 2014. Ainsi, en partenariat avec le CDOS, l’OL Fondation s’est engagée à en signer 15 dans les clubs de foot de la région. À Lyon, des restaurants et des entreprises d’aide à la personne commencent à se mettre sur les rangs. Mais, là aussi, les débuts sont poussifs. “Ces contrats n’ont pas créé un appel d’air du nombre d’emplois, nous n’avons pas ressenti une inflexion pour l’instant. Ce n’est pas parce qu’il y a des Emplois d’avenir que les employeurs créent de la demande. Et nous savons très bien que ces jeunes sont en CDD, non en CDI”, analyse Mathilde Burgy.
Villeurbanne : une exception
Dangereusement, le dispositif des Emplois d’avenir peine à émerger dans les banlieues, dans les zones urbaines sensibles où les jeunes sont les moins qualifiés. Mi-juin, la mission locale de Vénissieux n’avait enregistré qu’une vingtaine de signatures, pour un objectif d’environ 240 contrats fin 2013. Même avec l’aide de l’État, les petites associations ou structures publiques n’ont pas toujours les moyens, ni le temps, de former et d’accompagner les jeunes. L’engagement de la collectivité locale, sa dynamique, reste dès lors essentiel. Mais, sagement, la Ville de Vénissieux ne signera que 20 Emplois d’avenir en 2013. “Nous avons un employeur prudent, qui ne veut pas avancer de gros volumes”, défend Mathilde Burgy. Bon élève, la mairie de Villeurbanne s’est engagée a contrario à signer 150 contrats en deux ans, et tient ses délais avec 51 recrutements validés en juillet. “La Ville fait un effort budgétaire conséquent, de l’ordre de 800 000 euros, alors que l’emploi n’est pas la compétence directe d’une commune”, se félicite Olivier Baud. Mais Villeurbanne reste une exception dans le Rhône.
Aucun contrat signé à la Ville de Lyon
“On constate que certaines collectivités ne signent pas. Il est vrai qu’aujourd’hui nous n’avons enregistré aucun contrat sur la Ville de Lyon”, reconnaît Anne Bailbé, à la Direccte. En avril, lors de l’inauguration du chantier de la tour Incity, Gérard Collomb aurait moqué le dispositif, selon le magazine Challenges : “Quand je vois ceux qui se battent péniblement pour trouver 10 ou 15 Emplois d’avenir, nous, je rappelle que c’est 2 500 d’un coup.” Si certains voient là un coup politique du maire de Lyon contre le Gouvernement, la Ville explique qu’une étude sur les Emplois d’avenir est en cours, et préfère mettre en avant les dispositifs existants : “Pour les 18-30 ans, plus de 200 personnes sont en contrat aidé chaque année au sein de la Ville de Lyon, sous la forme de trois dispositifs : contrats d’apprentissage, contrats d’accompagnement dans l’emploi et les services civiques.” Mais l’absence de signatures passe mal à la mission locale.
“La Ville de Lyon et le Grand Lyon ne signent rien, et ça énerve tout le monde”, confie Xavier Mercader, chargé de mission sur les Emplois d’avenir à la mission locale de Lyon, qui avait en juin signé 70 Emplois d’avenir, principalement dans l’économie sociale et solidaire, pour un objectif de 272 fin 2013. “C’est dommage, déplore-t-il, car la Ville de Lyon reste un potentiel d’emplois très important. Tout comme les Hospices civils de Lyon [HCL, présidés par Gérard Collomb, NdlR], qui n’embauchent pas d’Emplois d’avenir. C’est un souci, car la plupart des grands hôpitaux à Lyon sont des HCL.”
Face aux critiques, Jean-Marc Ayrault a décidé le 24 juin dernier de dégager une enveloppe supplémentaire d’un milliard d’euros pour tous les contrats aidés, dont les Emplois d’avenir. Mais, sans engagement significatif de toutes les collectivités locales, le chiffre de 100 000 Emplois d’avenir en France, dont environ 1 800 dans le Rhône, est-il tenable ?
900 000 jeunes en déshérence
“C’est un objectif ambitieux. Même s’il y a de l’espoir, ça sera dur, car on devra signer les deux tiers des Emplois d’avenir après l’été, en seulement quatre mois”, estime un employé de la mission locale de Lyon. Afin de remplir ses objectifs, François Hollande a par ailleurs annoncé en juin vouloir ouvrir le dispositif aux plus diplômés dans les quartiers sensibles. Une décision qui va à l’encontre d’un rapport du Conseil d’analyse économique et social (CAES), qui épingle, dans un rapport publié fin avril, les premiers mois des Emplois d’avenir.
S’adressant plutôt à des jeunes motivés et suivis, ceux-ci ne réduiraient pas le chiffre inquiétant de 900 000 jeunes en déshérence (ni étudiants ni en recherche d’emploi) en France. Le conseil révèle que près de 40 % de ces jeunes mettent plus d’un an avant de franchir le seuil d’une mission locale. Et 60 % des jeunes qui passent ce cap n’ont de toute façon pas décroché un emploi, six mois après l’inscription. La conclusion du rapport, plus de quatre mois après la mise en place des Emplois d’avenir est sans appel : “L’emploi des jeunes peu qualifiés en France est un sujet trop lourd pour ne pas lui accorder une attention spécifique en matière d’accompagnement, de formation qualifiante et de coût du travail. La dualité du marché du travail français, qui les pénalise tout particulièrement, doit aussi être corrigée.”
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Cet article est extrait de Lyon Capitale n° 724 (juillet-août 2013).
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